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Le potager sous paillage permanent: plus sobre,mais pas sans attentions !

La culture de légumes sous une couverture végétale permanente présente de nombreux avantages, mais aussi quelques points faibles à bien connaître avant de se lancer dans cette technique alternative.

Temps de lecture : 8 min

Le paillage permanent consiste à épandre à la surface du sol des matières organiques végétales. Les organismes du sol vont dégrader progressivement ces matières organiques et laisser au sol une partie minéralisée utilisable par les plantes et une partie humifiée. Parmi ces organismes, nous identifions des vers de terre, des bactéries et des champignons décomposeurs.

Lorsque l’on pratique le paillage permanent, le sol n’est pas retourné mécaniquement, nous n’y effectuons pas de bêchage. La matière organique fraîche et en cours de décomposition reste en surface. Pourtant, un certain mélange est réalisé par les organismes anéciques du sol, c’est-à-dire les espèces qui vivent en permanence dans des galeries verticales qu’ils creusent.

Les vers de terre, notamment, vont jouer un rôle essentiel dans la création d’une perméabilité verticale grâce aux galeries laissées par leur passage. Ils sont aussi des agents actifs dans la formation du complexe argile-humus et la stabilité de la structure du sol.

Une des difficultés rencontrées dans les conditions climatiques propres à notre pays est la tendance au tassement et à la compaction du sol. Le jardinier se gardera d’aggraver ce phénomène en ne marchant jamais sur les espaces cultivés. Il aménagera donc son jardin en zones cultivées et en zones de passages. Ce dispositif peut prendre la forme de bandes cultivées séparées par des sentiers d’accès. Mais la créativité est de mise pour les formes et agencements les plus variés.

Lorsqu’il est amené à réaliser les plantations ou les semis, le jardinier écarte localement le mulch de surface pour disposer les plants ou les graines. Le seul travail du sol consiste en un éventuel griffage très léger et superficiel pour disposer d’un peu de terre fine.

Comme la matière organique de surface est dégradée par les organismes du sol, nous devons prévoir de nouveaux apports réguliers chaque année.

Des avantages…

Le premier aménagement du potager demande du travail puisqu’il s’agit de créer les zones de culture et les sentiers et ensuite d’apporter les premières couches de matières organiques végétales. Pour la suite, le jardinier ne doit plus travailler le sol en profondeur. Il n’a plus besoin d’outils ou d’engins mécaniques pour ces tâches.

Le mulch de surface protège très efficacement le sol des effets érosifs causés par les pluies violentes ou abondantes. Il empêche également l’érosion et les ruissellements.

L’humification des matières organiques végétales exige de l’oxygène et une bonne aération. Comme les matières végétales restent en surface du sol, l’aération est très bien assurée. La formation de l’humus peut se dérouler en bonnes conditions.

Par ailleurs, la couche de mulch en surface permet d’économiser l’eau en limitant fortement l’évaporation d’eau.

Cette couche est aussi un tampon thermique, un isolant. Elle limite les variations de température entre la nuit et le jour et adoucit progressivement les variations saisonnières.

La décomposition progressive des matières en surface de sol apporte des minéraux de manière progressive aux plantes.

Une couche d’une bonne épaisseur permet de maîtriser le développement de certaines plantes adventices.

… mais aussi des inconvénients

Tous les légumes peuvent être cultivés de cette manière, les engrais verts également. Mais les levées de carottes ou d’autres cultures aux semences fines peuvent en pâtir. En outre, les alliacées à bulbes (ail, échalote, oignon) se développent moins bien si leur espace n’est pas bien aéré et éclairé.

Autre point noir : si les matières organiques de surface libèrent trop d’azote, ce n’est pas l’idéal pour la conservation des légumes à bulbes et pour la production de chicon.

Sous la protection permanente du paillage, les limaces et escargots trouvent des conditions idéales pour leur multiplication. Ils y sont aussi protégés des oiseaux prédateurs.
Sous la protection permanente du paillage, les limaces et escargots trouvent des conditions idéales pour leur multiplication. Ils y sont aussi protégés des oiseaux prédateurs.

Enfin, la fraîcheur sous le mulch est favorable à la multiplication des limaces, escargots et campagnols. De plus, ce paillage protège ces ravageurs des attaques des oiseaux et autres prédateurs.

L’art de l’installation du couvert végétal

Les meilleurs résultats seront obtenus… sur les meilleurs sols ! Nous pouvons commencer à mettre en place la couverture végétale au printemps ou en automne, les deux meilleures époques de l’année. Comme repère, apportons la première couverture végétale au moment où la vie dans le sol est intense, lorsque la température du sol dépasse 12ºC.

Quand le système sera mis en place depuis plusieurs mois, les apports complémentaires de matières en surface pourront se faire à tout moment de l’année.

Bien décompacter et aérer le sol

Le travail de décompactage préalable est fastidieux, mais nécessaire. C’est l’occasion d’évacuer les pierres et souches éventuelles. Les rhizomes et racines de plantes vivaces (chardons, liserons…) seront enlevés également.

S’assurer du bon état initial du sol

Le principe d’un potager sous paillage permanent du sol est de ne plus le bêcher, le labourer, de ne plus mélanger mécaniquement la couche arable. Mais si le sol était carencé en certains éléments minéraux ou si ceux-ci étaient présents en quantités déséquilibrées, il est préférable de procéder aux corrections nécessaires avant l’installation des apports de surface.

Une analyse de sol nous guidera. Le réseau Requasud renseigne sur les coordonnées des laboratoires officiels officiant pour ce type d’analyses en Wallonie.

Épandre le compost mûr ou le fumier composté

La couche à aménager dépend d’abord des quantités disponibles. Ensuite, les sols de qualité moyenne ont besoin de plus de compost ou de fumier que les sols fertiles et de bonnes qualités.

Recouvrir d’un paillage plus grossier

Du compost peu décomposé fera bien l’affaire, de la paille hachée ou des feuilles mortes également. Des aiguilles de pin, des écorces broyées conviennent bien. Par contre, le BRF (bois raméal fragmenté) ne convient que s’il provient du broyat des rameaux jeunes de feuillus. Le bois broyé apporte beaucoup de carbone qui mobilisera l’azote présent pour sa décomposition au point de léser provisoirement la croissance végétale ; cela peut être un défaut en sols moyens ou pauvres, mais c’est un atout en sols riches où il permet d’éviter les excès d’azote dans le sol. Les fumiers de ferme ou de manège sont des apports de choix.

Chaque année, nous pouvons apporter un complément à ce paillage pour compenser ce qui a été décomposé lors des derniers mois.

Si le paillage est trop riche  en matières carbonées,  sa décomposition amènera les organismes du sol à mobiliser l'azote présent dans le sol au détriment des cultures en place.
Si le paillage est trop riche en matières carbonées, sa décomposition amènera les organismes du sol à mobiliser l'azote présent dans le sol au détriment des cultures en place.

Et on l’entretient comment, ce potager?

La forte couverture végétale à la surface du sol limite sensiblement l’évaporation. Les besoins en eau d’arrosage sont donc réduits par rapport à un potager sans paillage. Sous nos conditions climatiques, nous ne devrons intervenir qu’à des moments précis ou lors d’années exceptionnellement sèches, comme tout récemment par exemple.

Arroser lors des plantations  : juste après la plantation des plantes venant de la pépinière, nous arrosons au goulot au pied des plants. L’objectif est de favoriser le contact intime entre les racines du plant et le sol.

Arroser lors des périodes exceptionnellement sèches  : la couverture végétale empêche de bien voir l’état d’humidité du sol. Nous devons nous baser sur l’aspect des plantes et repérer les signes de flétrissement. Lorsque ceux-ci se manifestent, par exemple à la fin d’un après-midi fort ensoleillé, nous pouvons décider d’arroser au goulot au pied des plantes. L’objectif n’est pas de mouiller le paillage de surface, mais bien d’amener l’eau jusqu’au niveau de la zone d’enracinement des plantes cultivées.

Une autre méthode : les jardineries proposent des appareils simples qui indiquent l’état d’humidité du sol en profondeur.

F ertilisation « supplémentaire » inutile

La décomposition progressive de la couverture végétale de surface par les organismes du sol libère des éléments minéraux. Ceux-ci sont mis à la disposition des plantes. De manière générale, nous n’apportons pas d’autre fertilisant.

Notons l’importance de disposer des matières de surface variées pour éviter des excès ou des manques en certains éléments. Un fumier riche en déjections animales peut apporter de grandes quantités d’azote et de potassium. Un BRF apporte de grandes quantités de carbone.

Le désherbage reste de mise, différemment

La forte couverture de surface modifie la flore qui se développe sur le terrain. Elle n’empêche pas le développement d’adventices.

D’une part, de nombreuses plantes vivaces ont la capacité de croître aisément même sous une forte couverture végétale de surface. Si des foyers de rumex, de liserons ou de chiendent se forment, il faudra revenir à l’emploi d’outils pour extirper les racines et les rhizomes !

D’autre part, nous sommes amenés à dégager les lignes de semis de nos légumes pour permettre leur installation ; les graines d’adventices voisines profitent également de ce dégagement de lumière.

Les techniques pour éliminer les mauvaises herbes sont différentes de celles employées sans couverture végétale de surface. L’emploi de rasettes est réduit. On veillera à arracher les adventices gênantes avant qu’elles n’aient pu produire un nouveau stock de semences.

Avoir l’œil sur les limaces , escargots et campagnols

Généralement, la culture sous couverture végétale permanente n’augmente pas les risques de développement de maladies ou de populations de ravageurs.

Mais les limaces et escargots trouvent des conditions idéales pour leur développement et leur multiplication. La lutte devra se faire dans la durée en utilisant les techniques respectueuses des carabes et hérissons. Ceux-ci trouveront progressivement de bonnes conditions d’installation.

Les campagnols devront être surveillés également pour éviter que des colonies ne deviennent envahissantes.

F.

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