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Des feuilles pour tous les goûts: des blanches, des vertes et des pas mûres

En septembre, les feuilles en voient de toutes les couleurs, c’est peu de le dire : feuilles d’arbre qui s’étiolent et jaunissent, feuilles de betteraves et de pommes de terre qui fanent et flétrissent, feuilles de papier qui se lisent ou s’emplissent. Ces feuilles-là, et toutes les autres méritent bien quelques lignes en leur honneur !

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En septembre, les feuilles en voient de toutes les couleurs, c’est peu de le dire : feuilles d’arbre qui s’étiolent et jaunissent, feuilles de betteraves et de pommes de terre qui fanent et flétrissent, feuilles de papier qui se lisent ou s’emplissent. Ces feuilles-là, et toutes les autres méritent bien quelques lignes en leur honneur !

Le 1er de ce mois de septembre siffle la fin de la longue récréation des grandes vacances. Les enfants retournent sur les bancs de l’école et ouvrent à nouveau livres et cahiers, bon gré, mal gré. Que de feuilles blanches à noircir de leur écriture appliquée ! Volantes ou agrafées, chiffonnées ou glissées dans une farde chemise, photocopiées ou imprimées, surlignées ou gribouillées, elles vont accueillir les savoirs inculqués à nos chers petits agneaux, recueillir leurs graffitis, les taches de chips ou de bonbons grignotés en étudiant. Soit dit en passant, nous aussi, agriculteurs, recevons tout au long de l’année des monceaux de feuilles imprimées, à lire ou à remplir, et celles-là nous en font voir de toutes les couleurs…

Mais reprenons les choses dans l’ordre : avant d’être feuilles de papier, avant d’envahir nos boîtes aux lettres et nos classes d’école, leur cellulose était partie constituante d’arbres de la forêt, lesquels sont parés chacun de milliers de feuilles. Celles-ci sont vertes et fabriquent du sucre à l’aide de leur chlorophylle. Et cet été, j’ai découvert à quel point elles pouvaient être utiles ! Un ami en visite lors de la Foire de Libramont, m’a assuré qu’elles pouvaient constituer un fourrage d’appoint pour les ruminants. Pourtant, même en 1976, je n’ai jamais vu personne nourrir son bétail avec du feuillage dans notre région et, en Ardenne, ce ne sont pas les arbres qui manquent ! J’ai donc testé cette affirmation sur nos quelques moutons, utilisés dans nos prairies comme faucheuses de refus en année normale, et moins à la fête en cet été de sécheresse. Ô surprise, ils en raffolent ! Mais pas n’importe quelles feuilles !

Mes moutons gourmets apprécient particulièrement les feuilles de tilleul, très fournies sur les branches ; elles sont d’un vert profond, en forme de cœurs, larges et tendres. Celles de frêne leur plaisent également, ainsi que celles de noisetier et de saule. Par contre, ils rechignent à brouter les feuilles de charme, de hêtre et de chêne, sans doute trop ligneuses en été. Je n’ai pas osé tester la bourdaine, la viorne obier, et l’érable sycomore aux rameaux chargés de samares, lesquelles contiennent du poison pour les chevaux, paraît-il… Les résineux ne les attirent pas du tout ; peut-être n’avaient-ils pas assez faim ? Les pépiniéristes pourraient employer des moutons pour entretenir leurs plantations de sapins de Noël, je parie, au lieu de les pulvériser avec toutes sortes de pesticides.

Braves moutons ! Ils mangent n’importe quoi, et sont tellement sympathiques avec ça ! Aucun des nôtres n’a été malade. Quelle est la valeur nutritive d’une feuille d’arbre ? Je n’en sais fichtre rien. Celle d’une herbe de qualité moyenne, sans doute ? Par contre, je suis persuadé que les feuilles de certains arbres contiennent des oligo-éléments intéressants, puisés bien profond dans le sol, sauf si celui-ci est pollué, évidemment. Celles de saule contiennent de l’aspirine en petite quantité, avec un effet anti-inflammatoire et vermifuge. Sans doute le tilleul, tellement apprécié des moutons et des vaches, offre-t-il des molécules réellement bénéfiques ; de plus, il supporte bien la taille et donne un feuillage très abondant.

Dès lors : aux arbres, citoyens ! Il suffirait de planter des tilleuls, des saules, noisetiers et autres frênes, au bord des prairies. Ils serviraient d’abris et de coupe-vent, de parapluies ou de parasols selon les humeurs du temps, et en option fourniraient un fourrage d’appoint lors des sécheresses. Cela pourrait s’appeler de « l’agroforesterie pastorale ». N’est-elle pas pratiquée dans d’autres régions du globe ? Sans doute en Afrique Subsaharienne ?

On apprend des choses tous les jours ! Si les feuilles blanches imprimées nous en font voir des vertes et des pas mûres, les feuilles vertes naturelles de nos arbres sont par contre beaucoup plus intéressantes. Celles-ci mourront bientôt, après avoir pris des tons fauves et repeint nos forêts de fort jolie manière. Les feuilles de papier, hélas quant à elles, ne mourront jamais et continueront leur ronde infernale autour de nous…

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