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Amendements et engrais: de précieux alliés, aussi en maraîchage!

Comme en grandes cultures, l’apport d’amendements et d’engrais est un impératif en maraîchage. De même, les analyses de sols constituent d’importantes sources de renseignements et guident le maraîcher dans la fertilisation de ses parcelles.

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L a fertilisation d’une parcelle maraîchère en plein air ou abritée par un tunnel maraîcher inclut les améliorations foncières et la fertilisation proprement dite. Les premières sont des interventions lourdes, qui seront amorties sur plusieurs années. Elles comprennent les corrections de niveau et nivellement, le drainage, le défoncement et l’épierrage. La fertilisation proprement dite qui fait l’objet de ces propos concerne les apports d’amendement en vue d’améliorer les caractéristiques agrophysiques du sol. Elle intègre également la fertilisation par apports de fertilisants organiques ou minéraux destinés à corriger et compléter les caractéristiques agrochimiques du sol.

Quels amendements apporter ?

Comme pour les grandes cultures, une analyse chimique de sol nous renseigne sur quelques paramètres indicateurs de l’état du sol. La carte numérique des sols disponible sur l’application WalOnMap permet rapidement de connaître la classe pédologique du sol, sa classe de drainage, et d’autres renseignements encore. Cela nous évite de devoir procéder à une analyse physique du sol.

En fonction de deux indicateurs de base que sont le pH et la teneur en carbone (C) du sol, nous pouvons orienter et prioriser les apports d’amendements. Les laboratoires du réseau Requasud indiquent le conseil de correction du pH et le type d’amendement calcaire, calcaro-magnésien ou sulfo-calcaro-magnésien requis. Pour la teneur en carbone, ce seront les apports de composts, de fumier, l’incorporation d’engrais verts et les techniques de travail du sol qui permettront des améliorations sur le long terme.

Les amendements calcaires ou sources de carbone apportent aussi des éléments fertilisants. Nous devons en tenir compte dans la fertilisation des cultures maraîchères. La capacité d’échange cationique (CEC) déterminée par les laboratoires est assez stable mais évolue aussi lentement suite aux apports d’amendements. Ce paramètre est particulièrement important pour les cultures sous tunnels maraîchers ou sous serre. Il permet d’évaluer les seuils limites de salinité à ne pas dépasser. Lorsque le taux de saturation est élevé, il pourra être nécessaire de lessiver le sol sous abris afin de « désaturer » le complexe argilo-humique. Dans un tel cas, il ne faut surtout pas apporter de fertilisant minéral ou organique à minéralisation rapide tant que la salinité n’est pas corrigée. Les Sillon Belge des 21 novembre 2014 et 17 avril 2015 traitent la question de la salinité.

Lors de l’apport d’amendements organiques, n’oublions pas les recommandations et obligations légales quant aux quantités autorisées par ha et par an, ainsi que les périodes d’épandage permises. Ces renseignements sont bien connus des agriculteurs, pas toujours des maraîchers. Le site web de Protect’eau (ex-Nitrawal) reprend ces indications.

Les fumiers sont apportés à raison de 30 à 50 t/ha, soit l’équivalent à de forts apports en grandes cultures. La composition des fumiers est extrêmement variable d’une source à l’autre. Un fumier composé essentiellement de paille et de quelques crottins de chevaux n’a pas du tout la même composition qu’un fumier de stabulation libre bovine. Des tables indicatrices existent sur les sites web précités, des analyses sont possibles sur base d’échantillons représentatifs.

Les composts urbains sont apportés en fonction de leurs teneurs analysées. Les doses recommandées tiennent compte de la réglementation wallonne.

Notons encore qu’il est interdit par la réglementation « azote » d’implanter des légumes dans les deux années qui suivent le retournement d’une prairie permanente.

Engrais : à adapter selon la culture

Les engrais organiques ou les minéraux sont choisis en fonction du cahier de charge en vigueur (bio par exemple) et des corrections à apporter sur base de l’analyse de sol. Les déséquilibres entre éléments et le niveau général des teneurs du sol sont les contraintes dont nous tenons compte. Les laboratoires d’analyses donnent des indications précieuses à ce sujet, mais pour les cultures maraîchères, les informations restent générales. Nous devons les adapter à chacune des cultures en place et aux niveaux des rendements et donc au niveau des exportations d’éléments escompté.

En comparaison avec les grandes cultures, la fertilisation tiendra compte d’une plus faible proportion de cultures à enracinement profond. Les apports seront donc répartis en fractions plus modestes et plus fréquentes au fil de la rotation.

L’azote

Comme pour les grandes cultures, la quantité d’azote apportée par application sera réduite, pour tenir compte des risques de lessivage par les pluies en cultures à enracinement peu profond.

Nous déterminons les apports totaux en tenant compte des reliquats présents dans le profil à la profondeur explorée par les racines de la culture concernée, de la minéralisation de l’humus du sol, de la minéralisation des résidus de la culture précédente ou de l’effet blocage pour les résidus pailleux et bien sûr des apports organiques (fumiers, composts, etc.).

En tenant compte de la cinétique d’absorption de la culture, les apports seront répartis au fil de la pé riode utile. Les irrigations, fréquentes en maraîchage, facilitent la mise à disposition aux plantes.

Le phosphore

Le pH, la teneur en humus et en matières organiques en général et l’activité biologique du sol sont également déterminants pour cet élément. C’est la teneur en phosphore assimilable qui importe. Celle-ci est estimée par le laboratoire sur base de méthodes d’extraction censées simuler la réalité de terrain. Le choix de laboratoires ayant développé leur compétence dans des conditions identiques à celles que nous connaissons est important.

Le potassium

Les apports organiques (fumiers, composts, etc.) sont importants également dans le calcul des besoins de compléments éventuels. Bien que les risques de lessivages soient moins grands que pour l’azote, des excès auront des conséquences sur la salinité du sol, en particulier sous abris.

Pour un bon développement de nombreuses cultures maraîchères, nous devons veiller à disposer d’un bon équilibre entre les teneurs du sol en potassium échangeable, en magnésium et en calcium. Les analyses de sol nous apportent les données paramétriques nécessaires aux ajustements.

Le magnésium

Cet élément est très important en cultures maraîchères. Utilisé par la plante dès le début de la croissance en parallèle avec l’azote, il intervient notamment pour maintenir les pigmentations des feuillages des légumes. Or, le client achète aussi en voyant directement ceux-ci à l’étal. Une carence réelle ou induite se manifeste par des pâlissements internervaires des feuilles.

Le soufre

Autre élément utilisé en parallèle avec l’azote, le soufre doit faire partie des éléments mis à disposition en suffisance par le sol pour une bonne croissance des cultures. Les crucifères (choux notamment) et les alliacées (dont les échalotes, les oignons et les poireaux) ont des saveurs liées à des composés soufrés. Cet élément doit être apporté régulièrement aussi, il peut être lessivé et les racines des cultures maraîchères sont souvent peu profondes.

Le calcium

Déterminant dans la résistance naturelle des plantes aux maladies, le calcium est souvent présent en suffisance, notamment suite aux apports calcaires nécessaires dans nos conditions climatiques. En cas de manque, les apports sont faciles à corriger.

Les oligo-éléments

Le bore, manganèse, le zinc, le molybdène sont des éléments importants, même si les besoins s’expriment en grammes par hectare. Le fer l’est également.

Ces éléments sont souvent présents en suffisance dans nos sols, mais des manques de disponibilités liés à des insolubilités ou des blocages sont fréquents. Ils surviennent après des corrections trop rapides du pH, par exemple, ou lorsque le sol devient trop compacté suite à des façons aratoires inappropriées. Avant d’envisager des apports, il convient de corriger l’origine des blocages ou insolubilités. Les analyses de sols sont précieuses pour guider le raisonnement.

En pratique

Ces informations restent très générales. En pratique, le maraîcher doit en tenir compte et décider des apports qu’il devra envisager pour ses sols. Plusieurs cas se présentent.

 L’assolement est très diversi fié , les sols ne sont pas homogènes, les dimensions des parcelles sont modestes. Cette situation est relativement fréquente chez nous, notamment chez les nouveaux maraîchers installés sur les terrains qu’ils ont pu dénicher.

Il faut alors commencer par les fondamentaux. Le drainage, la correction d’éventuelles dénivelées gênantes, l’analyse du profil par un spécialiste sont les bienvenus. Ensuite, faire analyser le sol quant au pH et à la teneur en carbone : nous pourrons déduire quels sont les apports d’amendements qui seront à programmer lors des années suivantes. Enfin, estimer les besoins des cultures et s’assurer du bon maintien de la fertilité des sols en compensant par d’éventuels apports. Tous ces apports se feront en respect des cahiers de charge de la ferme et des règles régionales citées plus haut.

  Les cultures maraîchères entrent dans une rotation avec de grandes cultures : suivre la logique de fertilisation des grandes cultures dans un concept de rotation.

  La ferme est très spécialisée dans une ou quelques cultures peu nombreuses. La fertilisation sera pointue pour ces cultures, parce que l’organisation de la ferme le permet. Les apports se refont parcelle par parcelle, suivant les besoins physiologiques des cultures en place. La fertirrigation est possible pour coordonner les apports d’éléments et l’eau, en culture conventionnelle seulement, bien sûr.

F.

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