Courrier des lecteurs : «Viens, poupoule, viens…»
Quand on habite au village, il est quand même fréquent de se rendre en ville pour moult raisons. Ma ville de proximité est connue pour ses remparts, son Carnaval et comme beaucoup d’autres, pour son marché hebdomadaire.

Le marché, c’est une image d’Épinal. Elle renvoie aux temps anciens, avant les grandes surfaces et l’e-commerce, avec un petit air de vacances, à la manière de Pagnol en Provence. Quand j’y vais, je ne manque jamais les deux exposants du fond, au pied de la collégiale : un pépiniériste et un vendeur de poules et de lapins. Ils ont l’accent du nord du pays. Ils connaissent Le Sillon Belge mais lisent Landbouwleven.
Depuis des décennies, j’y achète quelques poules, tous les deux ou trois ans. Soit elles ont fait leur temps, soit une fouine ne leur a pas donné cette chance. La dernière fois, je lui ai dit : « Tiens, je me réjouis de vous voir toujours là. J’avais cru comprendre que la Région wallonne voulait interdire votre présence sur le marché ».
Il me répond en me tendant une carte pour écrire au ministre, le dossier étant au stade de la réflexion menaçante mais pas encore exécutive. Il m’explique que quelques activistes font plus de bruit qu’une majorité silencieuse qui pense le contraire. Évidemment !
À l’heure où les gens des villes sont en manque de nature, c’est assez paradoxal d’empêcher ou de compliquer les petits élevages familiaux. Quatre poules, ça ne casse pas trois pattes à un canard mais c’est une petite visite tous les jours au fond du jardin. C’est un plaisir que de les voir plonger sur les déchets ménagers comme s’il s’agissait de friandises. Mon chien, un border collie, adore y passer quelques heures régulièrement et les poules apprécient sa présence. Elles se sentent bien gardées. Bref, c’est un petit monde qui vit en harmonie, paisiblement. Rien à voir avec celui de l’Homo-sapiens anxieux qui nous est décrit au quotidien dans les médias.
Je ne pense pas une seconde que Monsieur Dolimont soit à la solde d’ONG dont l’idéologie cultive autant l’intolérance que la méconnaissance du terrain. Évidemment, en politique, il faut souvent marcher sur des œufs, mais là franchement, il devrait pouvoir dire aux activistes d’aller se faire cuire un œuf.
Bref, à mon petit niveau, je prends la plume (que je n’ai pas arrachée violemment à mes poules) pour apporter ma voix de citoyen lambda aux défenseurs du petit élevage de proximité et à ceux, comme le vendeur du marché, dont la présence rappelle que c’est toujours possible aujourd’hui.
Apparemment, Bruxelles et Liège font du zèle en la matière. Je comprends que pour les citadins, la place des poulets, c’est dans les caddies du supermarché, pas dans le jardin.
Pour le moment, je peux encore y descendre en chantant : « Viens, poupoule, viens poupoule, viens ». Puissent les politiques ne pas faire les poules mouillées et laisser les petits éleveurs chanter Cocorico.





