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«C’est l’idée de produire des champignons avec de la bière»

« Produire une alimentation saine en revalorisant les ressources organiques de notre ville », c’est le credo du Champignon de Bruxelles, installé depuis 1 an et demi dans les caves de Cureghem, sous les halles des abattoirs d’Anderlecht.

Temps de lecture : 4 min

À l’origine du concept, deux économistes saisis par l’envie d’entreprendre et de développer un projet d’économie circulaire, Hadrien et Sevan. Pour ce faire, ils choisissent un produit facilement cultivable en milieu urbain et présentant des opportunités de marché : le champignon, et plus particulièrement, les champignons japonais Shiitake, Maitake et Nameko.

Quelque temps après, les jeunes gens rencontrent Thibault au détour d’un voyage à la découverte de l’agriculture urbaine de Montréal. Ce dernier prend très vite part à l’aventure.

Une coopérative

Après une première phase de mise en œuvre, le projet prend véritablement son envol fin 2016, lors de la création de la coopérative : « Une cinquantaine de coopérateurs ont alors investi dans notre champignonnière. Dans la foulée, une ingénieure civile et un biologiste ont rejoint l’équipe et nous nous sommes installés dans les caves de Cureghem », explique Thibault. Situées sous les halles des abattoirs d’Anderlecht, ces caves forment un environnement idéal pour la culture des champignons.

Sur drèches de brasserie bio

Outre sa localisation, la particularité du champignon de Bruxelles réside également dans son substrat de développement : les drèches de brasserie. « Nous sommes la première champignonnière à utiliser les drèches de brasserie bio comme matière première. Cette méthode nous permet d’utiliser un sous-produit organique du secteur brassicole. Nous le transformons en ressource, minimisant par conséquent l’impact écologique de notre culture. De plus, après utilisation, les substrats créés à partir de drêche et de sciure sont donnés à des potagers périurbains tels que «Nos Pilifs», pour en faire du compost. On est en plein dans le concept d’économie circulaire », explique les jeunes entrepreneurs.

Au commencement, c’est le marc de café qui a été testé comme substrat : « Mais nous avons vite compris que le shiitake préfère la douce allégresse de la bière à l’excitation du café », disent les jeunes gens. « Conscients qu’il nous faudrait du temps pour élaborer un substrat tout à fait inédit et 100 % Bruxellois, nous avons d’abord démarré une production plus classique de champignons sur sciure de bois, avec l’aide d’un partenaire hollandais », continuent-ils.

Des champignons

et des micropousses

Aujourd’hui, les tests de culture sur la drêche de brasserie sont concluants et une ligne de production propre a été créée. « Notre laboratoire de pasteurisation et inoculation du mycélium est en phase de finalisation mais fonctionne déjà. À termes, 100 % du substrat sera produit chez nous. L’objectif sera de réaliser une pasteurisa tion par jour. Mais, pour l’instant, nous travaillons encore en partie avec notre partenaire. Cela nous permet de produire en continu et d’assurer nos arrières si le substrat n’est pas disponible. En effet, les brasseries bios en périphérie de Bruxelles sont peu nombreuses et ne brassent pas forcément toute l’année », dit Thibault. La coopérative produit actuellement1.200 kg de champignons par mois (jusqu’à 2.000 kg en bonne saison) mais, à termes, les installations devraient permettre d’en produire 3.000 kg.

Néanmoins, durant la saison estivale, les producteurs doivent faire face à une chute de la demande. « Les champignons se vendent très bien en automne et en hiver mais sont moins prisés durant l’été. C’est pourquoi nous avons décidé de développer des micropousses de moutarde, tournesol…

L’environnement leur convient très bien puisque les champignons leur fournissent la chaleur et le CO2 dont elles ont besoin », explique-t-il encore.

De la pasteurisation

à la récolte

En pratique, la drèche (70 % du mélange) et la sciure de bois (30 % du mélange) sont pasteurisées pendant deux heures afin d’en éliminer tous contaminants. Après refroidissement, le mycélium est inoculé et l’ensemble est conditionné en sacs de 3 kg hermétiquement fermés pour empêcher toute contamination. Les sachets sont ensuite placés en salle d’incubation, à 22ºC, pendant environ 3 mois.

Après ce laps de temps, les sachets sont ouverts et placés dans un environnement à près de 90 % d’humidité (15ºC). En l’espace d’une semaine, les champignons sont prêts à être récoltés. « Pour 1kg de substrat nous récoltons en moyenne 180 gr de champignons. Ceux-ci sont ensuite vendus autour de 12 euros du kilo, 15 euros pour le maitake, à des magasins bruxellois bio que nous livrons à vélo et aux grossistes bios classiques », dit Thibault. « Locale et biologique restent deux lignes directrices du projet, d’abord parce qu’on est convaincu des bienfaits du bio, mais aussi pour la plus-value que cela nous apporte », concluent les entrepreneurs.

DJ

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