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Nouvelle procédure d’expropriation en Région Wallonne: unique et rapide, avec contestation immédiate

Un nouveau décret relatif à la procédure d’expropriation a été publié dans le Moniteur Belge du 18 décembre 2018. Ce décret de la région wallonne remplace l’ensemble des procédures ordinaire, d’urgence et d’extrême urgence en matière d’expropriation pour cause d’utilité publique. Voici dans les grandes lignes ce qui change.

Temps de lecture : 5 min

C onformément à la Sixième Réforme de l’État, les régions sont devenues compétentes pour fixer la procédure judiciaire spécifiquement applicable en cas d’expropriation pour cause d’utilité publique d’un bien situé dans la région concernée, moyennant une juste et préalable indemnité telle que visée à l’article 16 de la Constitution. En région flamande, le décret flamand du 24 février 2017 relatif à l’expropriation d’utilité publique réglemente cette matière. Il a été publié au Moniteur belge le 25 avril 2017. Avec le Décret relatif à la procédure d’expropriation du 22 novembre 2018, la région wallonne a également modernisé l’expropriation.

Le but de la réforme

Le but de ce décret est de rationaliser et simplifier la procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique. La volonté du législateur est d’accélérer les procédures d’acquisition et d’expropriation, tout en veillant strictement au respect des principes d’égalité, de proportionnalité et des droits de la défense.

La réforme instaure une procédure d’expropriation efficiente et adaptée aux besoins actuels. C’est pourquoi, il est ainsi prévu d’instaurer une procédure unique pour les phases administrative et judiciaire.

L’extension du champ d’application de l’expropriation

Jusqu’ici, l’expropriation s’est toujours limitée à l’acquisition forcée de la propriété d’un immeuble. Or, il s’impose parfois de pouvoir exproprier d’autres droits plus limités ou certaines parties d’un immeuble, notamment lorsque l’ensemble du bien ou de la propriété n’est pas nécessaire à la réalisation du but d’utilité publique.

Pour résoudre cette problématique, l’article 2 du nouveau décret prévoit que l’expropriation peut avoir pour objet soit le transfert d’un droit de propriété sur un bien immobilier soit la suppression d’un droit réel démembré, d’un droit indivis d’un droit réel ou d’un droit personnel sur le bien en vue de permettre à l’expropriant de réunir en ses mains l’ensemble des droits sur le bien immobilier exproprié. L’expropriation peut être limitée à un volume en sous-sol.

Une seule procédure ordinaire d’expropriation

Les pouvoirs expropriants sont actuellement contraints de choisir entre la procédure ordinaire, trop lente, et la procédure d’extrême urgence, d’une rapidité souvent excessive. Il a été décidé de ne pas maintenir cette dichotomie pour ne mettre en place qu’une seule procédure assortie de délais stricts et relativement brefs, permettant néanmoins de garantir les droits de la défense.

Une négociation amiable obligatoire

L’article 26 du nouveau décret prévoit que la requête en expropriation n’est recevable que si, au préalable, une tentative de cession amiable a eu lieu. Celle-ci peut se limiter à l’envoi par l’expropriant d’une offre de cession des droits visés dans l’arrêté d’expropriation, laquelle doit contenir au moins quelques données minimales.

Contestation immédiate nécessaire

D’après une première lecture, l’article 33 de ce nouveau décret nous semble d’une grande importance. Cet article dispose que la partie citée et les parties intervenantes font état, lors de la comparution sur les lieux, de leur intention de contester la légalité de la procédure, à défaut de quoi ils sont forclos à le faire. Cela veut dire que les expropriés doivent se prononcer quant à leur intention de contester la légalité de l’expropriation lors de la vue des lieux. S’ils ne l’ont pas fait in limine litis, le tribunal prononcera le jugement fixant l’indemnité provisionnelle et la procédure en estimation débutera.

Celui qui risque d’être exproprié et qui veut contester cette expropriation ferait donc bien de consulter dès l’annonce de la procédure. De cette manière, l’avocat aura le temps nécessaire pour examiner la légalité de la décision d’expropriation.

Le délai laissé au tribunal pour prononcer le jugement sur la légalité de l’expropriation sera de vingt jours.

Sans contestation

Lorsqu’aucune partie n’a manifesté l’intention de contester la légalité de l’expropriation lors de la comparution sur les lieux, le tribunal statue sur la requête en expropriation dans les huit jours qui suivent la comparution.

S’il fait droit à la requête de l’expropriant, il fixe, dans le même jugement, par voie d’évaluation sommaire, le montant de l’indemnité provisionnelle dont l’expropriant est redevable vis-à-vis de l’exproprié et des parties reçues intervenantes.

Le montant de l’indemnité n’est pas inférieur à nonante pourcents de la somme offerte par l’expropriant.

Indemnisation

Les principes d’indemnisation sont inchangés. Si possible, la valeur vénale doit être déterminée au moyen de la méthode des points de comparaison. Celle-ci consiste à rechercher la valeur du bien exproprié en procédant par comparaison avec des cessions de biens similaires intervenues à une date la plus rapprochée possible du jugement provisionnel.

Le texte explicatif du projet de décret dispose que la hauteur de l’indemnisation est déterminée par la valeur vénale du bien, soit la valeur que l’on obtiendrait en exposant en vente un bien dans des conditions normales de publicité en suite d’un concours suffisant d’amateurs. La règle de base en matière d’indemnité d’expropriation consiste donc à rechercher ce qu’aurait offert un acheteur normalement prudent.

En vigueur ?

Le décret relatif à la procédure d’expropriation entrera en vigueur à une date fixée par le Gouvernement. Évidemment nous vous tenons au courant.

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