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Le projecteur sur la rhubarbe!

La rhubarbe est un des rares légumes dont seuls les pétioles sont consommés. C’est aussi un des rares légumes vivaces, avec l’asperge. Elle est cultivée en Asie d’où elle est issue, tandis que dans l’UE, sa culture ne sort de l’anonymat qu’en Angleterre, Allemagne et Pays-Bas où des fermes se sont spécialisées dans cette production.

Temps de lecture : 7 min

Modestement cultivée en Belgique, la rhubarbe appartient à la famille des polygonacées et comprend diverses espèces. Sa culture peut être envisagée sous plusieurs modes : destinée à la forcerie, pour une récolte de décembre à mars (très peu pratiqué chez nous), culture hâtée pour une récolte en avril, début mai et culture normale, récolte de mai à juillet. La rhubarbe issue de culture normale convient aussi bien pour le marché du frais frais que pour l’industrie.

La rhubarbe ne représente pas de grandes surfaces de cultures maraîchères en Wallonie. Elle est pourtant cultivée chez quelques agriculteurs ayant négocié un contrat avec l’industrie et chez quelques fermes maraîchères diversifiées où elle occupe valablement des petites zones aux formes peu adaptées à d’autres cultures. La croissance de la rhubarbe est très rapide au printemps et en été. Elle ralentit sensiblement du milieu de l’été à l’automne. Le feuillage meurt en automne-hiver.

La culture reste en place environ 6 ans, puis est déplacée en un autre site.

Un sol bien drainé

La culture s’installe dans la plupart des sols cultivables de chez nous pourvu que le drainage soit correct. Dans les sols où les phénomènes de gleyfication sont visibles à moins de 1 m de profondeur, la culture sera plutôt menée sur ados surélevés de 0,25 m.

Une analyse de sol permet de situer le niveau de pH, sachant que l’objectif est d’atteindre un pH KCl proche de 6,0. Si le pH est élevé, la fertilisation inclura des apports foliaires de bore au printemps.

Les besoins en eau sont importants en période de forte croissance, ils peuvent atteindre 10 mm lors des journées aux plus fortes évapotranspirations.

Pour maintenir une belle production pendant plusieurs années, il est préférable de changer la culture de place après 5 ou 6 années de récolte
Pour maintenir une belle production pendant plusieurs années, il est préférable de changer la culture de place après 5 ou 6 années de récolte

Des variétés performantes

Pour le forçage, la précocité est demandée. Pour le frais, la rectitude des pétioles, la couleur de leur peau, la facilité de récolte et le rendement importent. Pour la transformation, il est en outre demandé de bonnes qualités technologiques.

Des variétés s’imposent depuis plusieurs années. Goliath convient à la plupart des demandes, en frais comme en industrie. Frambozenrood est appréciée pour le forçage, Timperley Early également. Versteeg est adapté aux exigences industrielles. Cawood Deligh convient pour le frais et pour l’industrie.

Le choix variétal dépend du débouché. Pour le marché frais, une rhubarbe rouge est demandée, pour l’industrie, une verte.

Six ans

La rhubarbe reste en place durant plusieurs années. Quelques espèces de nématodes peuvent s’y développer : Ditylenchus dipsaci, D. destructor, Heterodera schachtii, H. trifolie. Tant que la culture demeure, il n’y a que peu de souci. Par contre, si nous replantons des jeunes plants aux endroits infestés, si nous y produisons des plants, si des pieds sont retirés pour être placés en conteneurs en vue d’un forçage, la présence de ces nématodes aura un impact certain!

Fumure: tenir compte des exportations!

Nous ne devons pas hésiter pour demander une analyse de terre avant l’installation de cette culture pluriannuelle. Les exportations sont importantes, le calcul des besoins en tient compte.

Les apports organiques de fumier ou de compost seront bien valorisés par cette culture en se basant sur le maximum de 230 kg d’azote avant l’implantation de la culture. L’analyse de sol permettra aussi de déterminer les apports phosphatés et sulfo-calcaro-magnésiens éventuels.

Les besoins en azote sont partiellement rencontrés par la minéralisation des matières organiques du sol. Les apports complémentaires sont possibles après chaque récolte. Les 230 kg sont une référence pour les besoins totaux annuels dont une partie importante provient de la minéralisation de la matière organique du sol et des reliquats des années antérieures.

Le calcul des éventuels apports en phoshore doit se baser sur l’analyse de sol. La rhubarbe est plutôt exigeante pour cet élément dont la disponibilité dépend de la vie dans le sol et du pH. La littérature mentionne des apports de 125 kg de P2O5 avant la culture, dont une large part peut être fournie par le fumier ou le compost.

C’est la teneur déterminée au labo et la teneur du sol en argile qui permettront d’estimer les besoins en potassium . La rhubarbe n’en exporte pas de grandes quantités lors de la récolte des pétioles,

Les techniques de culture

Le marché belge n’a pas la même structure et les mêmes possibilités commerciales que les marchés hollandais, allemands ou britanniques. Le forçage en salle ou la production en conditions chauffées y sont très particulières. Les productions que nous connaissons en Wallonie se font en pleine terre, avec ou sans voile de protection, à destination du marché du frais (récolte étalée) ou de l’industrie (récoltes groupées).

Au printemps, les bourgeons démarrent leur croissance pour rapidement produire les feuilles dont nous récoltons les pétioles.
Au printemps, les bourgeons démarrent leur croissance pour rapidement produire les feuilles dont nous récoltons les pétioles. - F.

Des plants certifiés

Les plants certifiés s’imposent pour démarrer la culture. Ils peuvent être issus de semis. Nous plantons en automne ou au printemps pour espérer une récolte deux années plus tard. Nous plantons de manière à ce que les bourgeons de croissance foliaires émergent tout juste du sol. La densité de plantation est de 15.000 plants /ha, avec des distances plantation qui varient de 0,75 x 0,90 m à 0,45 x 1,50 m.

Il est aussi possible de multiplier la rhubarbe par éclats de souches (4 à 6 éclats par souche). C’est une technique aisée et qui convient bien pour les amateurs. Pour les professionnels, il faut pouvoir maîtriser les risques sanitaires.

Le désherbage

Nous pouvons aussi broyer la végétation des inter-routes et pailler. Les feuilles de rhubarbe sont très couvrantes et concurrencent bien la végétation adventice. Le paillage présente aussi l’avantage de maintenir les pétioles propres. Plusieurs herbicides sont homologués en rhubarbe, notamment des produits à base de propyzamide, isoxaben, clomazone, clopyralide.

L’écimage

Au printemps, les rhubarbes peuvent produire une importante hampe florale au détriment du rendement en pétioles. Les hivers avec de longues périodes froides favorisent ce développement au printemps suivant. Les variétés précoces semblent plus sensibles. Il est préférable d’écimer au début de leur développement.

Maladies et ravageurs

La rhubarbe n’est pas très sensible aux maladies. La ramulariose (Ramularia rhei) peut se développer sur les sites humides et où la végétation est exubérante. La rouille (Puccinia phragmitis) se développent en certains sites où les phragmites sont présents à proximité de la parcelle. Le faux-mildiou (Peronospora jaaplane) peut se développer en années fraîche et humide.

Sur certaines parcelles, où le nématode des tiges et des bulbes Dytilenchus dipsaci s’est installé, les pétioles se déforment au cœur de la plante et pourrissent.

La récolte

Pour maintenir une belle production sur plusieurs années, il est préférable de changer la culture de place après 5 ou 6 années de récolte.

La période de repos végétatif

En automne, le feuillage se dessèche. Le pied entre en repos végétatif. La période froid est nécessaire pour vernaliser les pieds, elle se mesure en comptant la somme des degrés-froid quotidien sur base de 10°C. En plein air chez nous, les besoins en froid sont satisfaits naturellement chaque hiver. Pour la rhubarbe en plein pair, la quantité de froid est obtenue naturellement durant la période de repos hivernal. La question se pose pour les fermes où la rhubarbe est forcée, en serre par exemple.

En plein air, la récolte se fait d’avril à juillet, pour le marché du frais ou pour l’industrie (contrats). Nous décrochons les pétioles par torsion et coupons le limbe. Le rendement varie fortement suivant l’état de la parcelle et la variété, de 15 à 60 tonnes/ha. Le rendement reste bon durant environ 6 années de récolte. Les normes pour le marché du frais mentionnent 25 cm de longueur minimale des pétioles en classe 1 et 20 en classe 2. Elles mentionnent une largeur de pétiole en milieu de longueur d’au moins 20 mm en classe 1 et 15 en classe 2. En pratique, les livraisons se font avec des contraintes commerciales supérieures.

Le forçage

La technique de forçage en conteneurs est peu utilisée chez nous. Il s’agit de soulever les souches de rhubarbe installées à cette intention, de les placer dans des conteneurs avec de la terre et d’installer le tout dans une ambiance (10 à 17°C, 80 à 90% d’humidité relative) favorable à une repousse rapide.

La récolte peut aussi être avancée en recouvrant la parcelle d’un tunnel, avec ou sans chauffage du sol. Elle peut être intéressante pour les jeunes parcelles plantées deux ans auparavant et qui n’ont donc pas encore été récoltées. En plantant à 1,5 d’écartement, il est possible de cultiver d’autres légumes dans les inter-rangs. Pour les années suivantes, les pieds de rhubarbe deviennent progressivement plus massifs et le travail du sol pour installer d’autres cultures devient compliqué.

La récolte peut être avancée de quelques jours par rapport au plein air par la pose de voiles de forçage ou de films de plastique perforées.

F.

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