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Domaine de Glabais: «La viticulture, un métier complexe dans lequel on ne s’engage pas à la légère»

Il y a environ deux semaines, les vendanges battaient leur plein sur le Domaine de Glabais, les troisièmes depuis la plantation des vignes en 2016. Cette année, elles furent moins productives que les précédentes, la faute aux conditions climatiques : le gel printanier, la sécheresse et la grêle. Anne Geldhof et Christian Balduyck, les propriétaires, ne comptent pas moins faire du raisin récolté un produit de qualité, étendard de leur village.

Temps de lecture : 6 min

Le Domaine de Glabais est un rêve qui a vu le jour plus vite que prévu, à la grande joie des ses fondateurs, Anne et Christian Balduyck. «Cela fait plus de 15 ans que l’idée de travailler dans les vignes nous trotte dans la tête mais, on se voyait plutôt finir notre vie dans un domaine en France. Il y a une dizaine d’années pourtant, un collègue nous a proposé de l’accompagner pour faire du bénévolat au sein des vignes des ruines de Villers-la-Ville. Une expérience qui nous a vraiment plu et qui nous a donné des idées pour le développement de notre activité sur la ferme», explique Anne.

Pourquoi pas un vignoble?

Le couple s’installe à Glabais, dans la ferme des parents de Christian en 2012. Se pose alors la question du devenir des bâtiments abritant auparavant un élevage de Blanc-Bleu belge mixte. « L’idée du vignoble a alors germé mais c’était un projet à réfléchir et organiser», dit Anne. Des analyses de sol sont ainsi faites sur les différentes parcelles de l’exploitation. « Coup de chance, nous avons constaté que les terres situées autour de la ferme convenaient parfaitement à la culture de la vigne et décidé de nous lancer ».

« Comme en agriculture, la météo joue un rôle essentiel »

Du vin mousseux pour le plaisir et le climat

S’en suivent les choix pour la plantation: «Il faut d’abord savoir vers quel produit on veut s’orienter: des vins tranquilles ou des vins mousseux. Nous avons privilégié le mousseux parce que c’est ce que nous préférons mais également car c’est plus adapté à notre climat. En mousseux, les vendanges peuvent être réalisées à des taux de sucre permettant un taux d’alcool potentiel entre 10,5° et 11°, c’est-à-dire assez tôt, dans la seconde quinzaine de septembre. En vins tranquilles, on doit viser un taux d’alcool potentiel de 12,5°, ce qui nous renvoie dans l’arrière-saison, le taux évolue plus lentement et on peut vite se retrouver fin octobre. En Belgique, on ne sait jamais ce que ça peut donner, c’est donc plus risqué », explique Christian.

Le Domaine s’étend actuellement sur 3,30 situés aux abords de la ferme.
Le Domaine s’étend actuellement sur 3,30 situés aux abords de la ferme. - D.J.

« Vient alors le choix des cépages, un choix très technique aux multiples possibilités », poursuit-il. « La première question est : va-t-on utiliser des cépages traditionnels (Vitis vinifera) ou interspécifiques (croisements d’espèces leurs procurant certaines résistances) ? Ensuite, dans chaque cépage, on peut se diriger vers 60 à 100 clones différents qui peuvent eux-mêmes être associés à une quarantaine de porte-greffes. Vous imaginez les possibilités ! Nous avons choisi la tradition avec les cépages classiques de Chardonnay, Auxerrois, Pinot Blanc et Pinot Noir. Pour chacun d’entre eux, nous avons privilégié un seul clone et un seul porte-greffe ».

A moyen termes, les vignerons espèrent pouvoir installer leur propre chai dans la grange de la ferme.
A moyen termes, les vignerons espèrent pouvoir installer leur propre chai dans la grange de la ferme. - D.J.

En 2016, près de 15.000 plants ont ainsi été plantés sur une surface de 3,30 ha. « A l’avenir, nous n’excluons pas d’étendre la surface, dans ce cas, je m’orienterais sans doute vers plusieurs clones sur un même porte-greffe par cépage. Cela nous permettrait d’avoir plus de complexité dans le vin », explique encore Christian.

Lorsqu’une vigne est plantée, le raisin peut être cueilli en troisième année de plantation. Une règle qui a fait exception dans le cas du domaine de Glabais, « L’année 2016 a été pluvieuse et les vignes se sont très bien implantées. Sous les conseils de plusieurs spécialistes, nous avons donc réalisé nos premières vendanges en 2017. 3,5 tonnes de raisin ont été récoltées et nous avons pu produire 2.700 bouteilles. Une vigne est en plein rendement à partir de la sixième ou septième année. Le résultat était donc tout à fait honorable», précise Anne.

Avec « Prémices », la première cuvée du Domaine de Glabais, le couple souhaitait toucher un large public.
Avec « Prémices », la première cuvée du Domaine de Glabais, le couple souhaitait toucher un large public. - D.J.

Vinifié selon la méthode champenoise traditionnelle

Dans un premier temps, le couple a choisi de réaliser la vinification chez un professionnel. « Nous travaillons tous les deux à l’extérieur et nous avons besoin de formation. La viticulture n’est pas un métier qui s’improvise. Quand on nait dedans et qu’on peut y suivre son père ou un mentor, c’est différent. Pour nous, il s’agissait d’apprendre un tout nouveau métier. Pour l’entretien de la vigne, la taille, l’effeuillage…, nous nous faisons aider par un indépendant. Pour le suivi et la vinification, nous travaillions avec Jean-François Baele du Domaine du Ry d’Argent. Nous sommes très attentifs à leurs conseils et, en parallèle, Christian suit une formation en viticulture en cours du soir », explique Anne.

Après la récolte, le raisin est directement conduit au pressoir. Le crémant y est élaboré selon la méthode champenoise avec double fermentation et un vieillissement sur lattes de 9 mois. « La première année, nous avons réalisé un seul assemblage. Il a été dévoilé en 2018 et a reçu l’appellation de crémant de Wallonie. En 2018, année exceptionnelle pour nous comme pour les autres vignerons avec un gros volume de vendanges, nous avons reproduit le même assemblage mais également choisi de diversifier la gamme afin de toucher un public plus large. Nous avons ainsi réalisé un 100% Chardonnay Blanc de Blancs vieilli 15 mois sur lattes et un 100% Pinot Noir rosé ».

«Nous apprécions l’idée que notre produit représente notre village et notre région», dit Anne.
«Nous apprécions l’idée que notre produit représente notre village et notre région», dit Anne. - D.J.

Priorité à l’aspect local

La première cuvée « Prémices » a remporté un franc succès et s’est rapidement écoulée sous l’impulsion des Glabaisiens. « C’est quelque chose de très important pour nous. Notre concept se veut local, d’où le nom du Domaine. Nous apprécions l’idée que notre produit représente notre village et notre région. C’est pourquoi nous avons donné la priorité aux gens des environs et ils ont finalement été de véritables ambassadeurs du projet ».

« Le rendement n’est pas immédiat et la vigne est en place pour 40 ans.»

Un nouveau métier qui donne également l’opportunité à Anne d’échanger sur celui d’agricultrice et de démonter les clichés.
Un nouveau métier qui donne également l’opportunité à Anne d’échanger sur celui d’agricultrice et de démonter les clichés. - D.J.

Investissement sur le long terme

Le couple insiste : la vigne, c’est leur passion mais ce n’est pas un métier dans lequel on se lance à la légère. « C’est un projet qui demande beaucoup de réflexion, un gros investissement financier mais aussi personnel. Le rendement n’est pas immédiat et, une fois qu’elle est en place la vigne est là pour 40 ans. Pour le suivi, les tailles, l’effeuillage, l’entretien…, il faut compter 500 heures par hectare. Ça peut être très contraignant ». Heureusement, le couple a pu trouver du personnel qualifié et peut compter sur la famille pour quelques coups de main et des bénévoles pour les vendanges. « L’idée, c’est de développer le concept avec, à moyen terme, la construction de notre propre chai et, pourquoi pas, le développement de gîtes à plus long terme ».

D.J.

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