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Réforme du bail à ferme: l’obligation d’écrit pour tous les nouveaux baux

Le 30 avril 2019, le parlement Wallon a adopté un décret modifiant diverses législations en matière de bail à ferme. Ce décret n’a pas encore été publié au Moniteur belge. L’article 55 de ce décret prévoit l’entrée en vigueur du décret au 1er janvier 2020. Nous en expliquerons les modifications les plus importantes dans une série d’article.

Temps de lecture : 4 min

La première grande réforme concerne la forme du bail à ferme. Actuellement, l’article 3 de la loi sur le bail à ferme stipule que le bail doit être constaté par écrit, mais celui qui exploite un bien rural a la possibilité de fournir la preuve de l’existence du bail et de ses conditions par toutes voies de droit, témoins et présomptions compris. Par contre, le nouvel article 3, § 1er dispose que « tout bail tombant sous la présente section ainsi que sa modification ou sa reconduction expresse, sont établis par écrit ».

Aucune sanction

En ajoutant l’obligation d’écrit en cas de modification ou de reconduction expresse du contrat, le législateur incite les parties à recourir à l’écrit mais l’exigence n’est toutefois pas assortie de sanction. (A. GREGOIRE, « La réforme de la loi sur le bail à ferme », Le Pli juridique – nº 49 – Octobre 2019, 22)

Contenu minimal

En cas d’écrit, le législateur impose désormais un contenu minimal :

– l’identité des parties ;

– la date de prise de cours ;

– la durée du bail ;

– la désignation cadastrale des parcelles ;

– le revenu cadastral non indexé de chaque parcelle ;

– la région agricole dans laquelle se situe chaque parcelle.

Directement inspiré des dispositions applicables aux baux d’habitation, le texte permet désormais aux deux parties de s’adresser au juge de paix pour obtenir un jugement valant titre de bail, moyennant le respect de diverses conditions.

À défaut d’écrit ou en présence d’un écrit incomplet, chacune des parties peut requérir l’autre d’établir un écrit respectant le prescrit légal. (E. BEGUIN et A. CAPRASSE, La réforme du bail à ferme en Région wallonne, Larcier, 2019, 112)

La partie contractante la plus diligente peut, faute d’exécution dans les vingt jours d’une mise en demeure signifiée par envoi, contraindre l’autre partie, par voie judiciaire s’il échet, à dresser, compléter ou signer une convention écrite telle que prévue au présent paragraphe.

La compétence du juge est limitée par l’existence préalable d’un contrat oral entre les parties.

Dispositions transitoires

Le nouvel article 52 prévoit des règles pour la période de transition et plus précisément pour les baux en cours.

L’obligation de l’écrit et des mentions prescrites par l’article 3 ne s’impose que pour les nouveaux baux, c’est-à-dire ceux conclus à dater du 1er janvier 2020, date de l’entrée en vigueur du décret. Il en va de même de la possibilité de contraindre l’autre partie à établir un écrit par voie judiciaire. (A. GREGOIRE, « La réforme de la loi sur le bail à ferme », Le Pli juridique – nº 49 – Octobre 2019, 23)

Les baux oraux en cours peuvent, d’un commun accord, être transformés en baux de carrière ou de longue durée. Les baux ainsi transformés sont réputés être de nouveaux baux.

Selon le nouvel article 52 de la Loi sur le bail à ferme, les baux verbaux n’ayant pas fait l’objet d’un bail écrit dans un délai de cinq ans à dater du 1er janvier 2020, date de l’entrée en vigueur du décret, seront considérés comme commençant une troisième période d’occupation de neuf ans.

Remarquons que sous le même article 52, le droit transitoire concernant les congés donnés avant le premier janvier 2020 est réglé. La validité et les effets des congés donnés antérieurement à l’entrée en vigueur du présent décret sont appréciés conformément aux dispositions légales en vigueur au moment de leur notification.

Un écrit autrement formulé

Nous terminons ce premier article en abordant une règle qui n’a pas été modifiée. L’article 3, § 2 in fine stipule : « S’il existe un écrit autrement formulé, celui qui exploite un bien rural peut fournir la preuve de l’existence d’un bail et des conditions par toutes voies de droit, témoins et présomptions compris. »

La Cour de Cassation a, par le passé, décidé que nonobstant l’article 1341, alinéa 1er, du Code civil, le prétendu usager d’un bien rural peut fournir à l’encontre d’un écrit autrement formulé la preuve par toutes voies de droit de l’existence d’un bail à ferme qui tombe dans le champ d’application de la loi sur les baux à ferme. Cette preuve n’est, toutefois, autorisée qu’à celui qui fournit la preuve qu’il exploite un bien rural au sens d’une exploitation agricole conformément à l’article 1er, alinéa 1er, 1º et 2º de la loi sur le bail à ferme, dans la période pour laquelle il prétend avoir été fermier. (Cass. 29 octobre 2010, Arr. Cass. 2010, liv. 10, 2664)

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