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La stratégie européenne «de la fourche à la fourchette» laisse entrevoir ses premiers éléments d’actions

Le secteur agricole, et la pac en particulier, sera fortement mobilisé par la très attendue stratégie de la « fourche à la fourchette » que la Commission européenne devrait dévoiler le 31 mars, comme le montrent les premiers éléments du plan d’une quarantaine d’actions qui circule dans les différents services de ladite institution.

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L es ministres de l’Agriculture de l’UE qui étaient réunis le 27 janvier à Bruxelles ont appelé à être impliqués au plus près dans la préparation et la mise en œuvre de ces actions et mesures qui couvriront un vaste éventail de dossiers depuis les pesticides jusqu’à l’agriculture biologique, en passant par les engrais, l’agroforesterie, les nouvelles techniques de sélection végétales, l’utilisation des protéines animales transformées, le gaspillage alimentaire ou le bien-être animal.

Réduction des pesticides, des engrais et des antibiotiques

Selon un projet, en phase de consultation dans les différentes directions générales de la Commission européenne, et susceptible d’être assez largement modifié, celle-ci fixe comme premier axe le renforcement de l’ambition des États membres en matière de production alimentaire durable en particulier dans le cadre des plans stratégiques nationaux de la politique agricole commune. Ce premier volet prévoit de réduire significativement l’utilisation et les risques liés aux pesticides chimiques, de stimuler l’adoption de pesticides à faible risque et de solutions de remplacement non chimiques à l’utilisation des pesticides mais aussi d’améliorer les systèmes d’approbation et d’autorisation des pesticides et faciliter l’accès au marché des substances et produits actifs biologiques.

Farines animales et biotechnologies

Autre action prévue par la Commission européenne : réduire l’utilisation des engrais – tous types confondus – en définissant une stratégie sur la manière d’optimiser l’utilisation des éléments nutritifs dans l’agriculture, ainsi que des antibiotiques en adoptant des « restrictions concrètes pour la prescription et l’utilisation d’antimicrobiens à des fins de prévention et une interdiction complète de l’utilisation d’antimicrobiens chez les animaux pour favoriser leur croissance ».

La Commission pourrait également rouvrir la réglementation sur la commercialisation des aliments pour animaux pour notamment « faciliter l’utilisation de matières premières plus durables, y compris les aliments protéiques, comme les sous-produits de la bioéconomie, les nouveaux substrats pour les insectes, les aliments pour animaux provenant des océans, les nouvelles protéines animales et la biomasse provenant de la fermentation microbienne ». Des dispositions – notamment celles concernant les protéines animales transformées – que la Commission européenne hésite depuis des années à mettre sur la table.

Bruxelles évaluera, comme prévu, le statut des nouvelles techniques génomiques de sélection végétale dans le cadre du droit européen « y compris leur potentiel pour améliorer la durabilité tout au long de la chaîne alimentaire ». Une proposition, accompagnée d’une analyse d’impact, sera présentée si nécessaire.

Le bien-être des animaux

La Commission européenne envisage également de progresser dans l’amélioration du bien-être animal. Au menu : une évaluation de la législation existante, le renforcement de l’application des mesures actuelles grâce aux outils de la pac et aux indicateurs de bien-être des animaux, la désignation d’un troisième centre de référence de l’UE pour le bien-être des ruminants et des équidés. Des propositions législatives pourraient être mises sur la table une fois qu’une évaluation approfondie des règles existantes aura été réalisée.

Un plan 2021-2026 pour le bio

La Commission souhaite que les plans stratégiques de la pac soutiennent le recours à des pratiques durables telles que l’agriculture de précision, l’agroécologie, l’agroforesterie ou l’agriculture biologique. La direction générale de l’Agriculture aura donc la charge d’élaborer un nouveau plan d’action sur l’agriculture biologique pour la période 2021-2026 afin de renforcer son rôle dans la lutte contre le changement climatique, de stimuler la demande globale de produits biologiques, d’assurer la confiance des consommateurs, et d’inciter les producteurs à adhérer au régime. Le vice-président de la Commission européenne Frans Timmermans a aussi suggéré que, dans ce cadre, les États membres réfléchissent à des mesures fiscales comme une TVA réduite pour les fruits et légumes issus de l’agriculture bio.

Autres dispositions en vrac de cette stratégie : renforcer la surveillance de la santé végétale ; promouvoir une consommation alimentaire durable, en facilitant le passage à des régimes alimentaires sains ; la lutte contre le gaspillage alimentaire ; stimuler les pratiques durables dans les domaines de la transformation alimentaire, de la vente au détail, de l’hôtellerie et des services de restauration ; lutter contre la fraude alimentaire et renforcer les contrôles tout au long de la chaîne d’approvisionnement ; ou encore rechercher des accords à l’échelle mondiale pour assurer la transition vers des systèmes alimentaires durables.

Une question de moyens

Déjà la plupart des ministres de l’Agriculture de l’UE s’inquiètent du budget dont ils disposeront dans le cadre de la pac 2021-2027, surtout si celle-ci doit contribuer à une ambition renforcée en matière climatique et environnementale dans le cadre du Green deal. Une position à laquelle le commissaire européen à l’Agriculture, Janusz Wojciechowski, a apporté son soutien. « Avec un budget réduit, il est évident que les résultats seront moindres », a-t-il admis. Le président du Conseil européen, Charles Michel, a invité les chefs d’État et de gouvernement des 27 États membres à un sommet exceptionnel, le 20 février à Bruxelles, pour, espère-t-il, « parvenir à un accord » sur le cadre financier pluriannuel de l’UE pour 2021-2027.

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