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Un bâtiment d’élevage, ça doit respirer énormément!

Dans le cadre de roadshows organisés l’Amcra, l’Afsca, l’Afmps et la Fwa afin de réduire l’utilisation d’antibiotiques en bovin laitier, François Claine, vétérinaire à la Direction de la santé de l’Arsia s’est penché sur la question de la ventilation des bâtiments car «  maîtriser l’art de vivre, c’est se rendre moins dépendant de l’art de guérir ! »

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«  Réfléchir la ventilation des bâtiments, c’est avoir une influence directe sur les maladies respiratoires mais également indirecte sur la résistance et la pression infectieuse de n’importe quel pathogène à l’intérieur de la structure(sur les murs, sur le matériel d’élevage…) », explique François Claine, vétérinaire à la Direction de la santé à l’Arsia.

Le contrôle de ces paramètres à donc une influence non seulement sur la santé des animaux mais également sur celle de l’éleveur. Et qui dit impact sur la santé dit aussi sur la croissance, sur la production et sur la durabilité de l’infrastructure, que ce soit les possibilités d’évacuation de l’air vicié, de l’humidité…

« Je ne dis pas que tous les bâtiments agricoles doivent être des structures très ouvertes comme on en voit apparaître ces dernières années mais il y a des recommandations, des notions de base à prendre en compte, que l’on soit dans la réflexion d’une nouvelle structure, dans une phase de questionnement par rapport au bâtiment dans lequel on travaille. »

Les paramètres à maîtriser

Dans ce contexte, quatre paramètres sont à maîtriser :

– l’orientation de la structure ou comment celle-ci est positionnée par rapport aux vents dominants. Chez nous ils viennent majoritairement du sud-ouest (70 %), et du nord-ouest (plutôt en période hivernale, 30 %) ;

– l’aspect température dans le bâtiment et la maîtrise des écarts de température entre l’intérieur et l’extérieur du bâtiment, ainsi qu’au sein même de celui-ci entre les saisons et entre jour et nuit. Il nous arrive de constater que des écarts entre le jour et la nuit dans un bâtiment mal isolé, sont extrêmement importants. Si ce n’est pas forcément néfaste pour les bovins adultes, ça l’est pour les veaux ;

– l’aspect vent est bien entendu à prendre en compte ! Si la structure doit ventiler, on ne doit pas être dans un concept de courant d’air. Ce dernier est néfaste pour la santé du bovin ;

– l’excès d’humidité qu’une bonne ventilation permet de gérer. Ce paramètre est pénible à supporter pour les animaux, en particulier en période hivernale dans des bâtiments trop hermétiques dans lesquels s’accumule chaleur et humidité. Un tel climat peut entraîner une souffrance respiratoire, en particulier pour les jeunes bêtes.

Ces éléments sont fondamentaux en ventilation naturelle. En « assistée» ou «artificielle», l’orientation du bâtiment est secondaire, puisque les ventilateurs et gaines de ventilation sont là en renfont.

Ne pas confiner les animaux

Et d’évoquer le confort climatique ! «On a tendance à trop confiner les animaux. La raison? Une vision anthropomorphique pousse certains éleveurs à penser que les animaux vont avoir trop froid.»

Or, au vu des gammes de températures liées au confort climatique du veau en fonction de son âge : de moins de 24 h à 3 à 6 mois(Cf Tab. 1), les conditions de température de vie idéales vont tendre à se décaler vers le bas plus l’animal prend de l’âge. Un animal en début de vie préfère des conditions plus chaudes ; un individu plus âgé  peut donc se satisfaire de conditions plus fraîches.

CONFORT CLIMATIQUE PS

Dans la zone de confort acceptable (verte), les animaux s’y sentiront bien et ne devront pas dépenser d’énergie pour maintenir leur température corporelle en adéquation avec le milieu. « Les éleveurs sont parfois étonnés de voir qu’un veau de 36 – 48h peut accepter une température minimale de 3ºC. Pour un veau sec, cela ne pose aucun problème ; s’il est humide, les problèmes commencent à poindre », poursuit le vétérinaire.

« De manière générale, le ruminant se satisfait beaucoup mieux de températures fraîches qu’il ne supporte les températures chaudes.

Bien sûr, il n’est pas question que de température, mais aussi de vitesse d’air. Il est estimé que dans un courant d’air, un animal sec a un ressenti de température de -1 ºC. S’il est humide, le ressenti de ce même individu sera de -4ºC. «Quand on est déjà limite aux conditions idéales de vie, on arrive vite dans des zones d’inconfort pénibles à supporter pour l’organisme ; d’autant plus pénibles que l’animal est jeune.»

Si le ruminant est une chaudière, le veau est une qui ne tourne pas. Sa capacité de chauffe est minimale puisqu’il ne rumine pas. Et ce sont bien les ruminations qui dégagent de la chaleur. Un jeune est donc beaucoup plus sensible aux courants d’airs, aux entrées d’air parasite et à des températures de vie qui sont inadaptées à ses besoins.

Il existe des recommandations (reprises dans le Tableau 1) en termes de volume et de vitesse d’air pour un animal en fonction de son stade de croissance. Les retours de terrain montrent souvent que les conditions dans lesquelles vivent les veaux leurs sont souvent très pénibles car les recommandations ne sont souvent pas respectées.

VOLUME

François Claine : « On case souvent les nouveaux-nés là où il y a encore un peu de place plutôt que de réfléchir réellement à l’endroit qui leur serait optimal. Le détenteur cherche parfois à adopter des solutions de logement qui lui paraissent être de bon sens mais qui causent davantage de problèmes. Leur placement en niches n’est pas une solution si on ne réfléchit pas à la ventilation de ce petit bâtiment; d’où l’importance de bien penser à les placer dans un endroit adéquat. »

Privilégier d’abord la ventilation naturelle !

« Que l’on soit dans un trop-plein d’aération ou à l’inverse dans un bâtiment où règnent chaleur et humidité, les extrêmes sont toujours l’ennemi du bien ! L’idée est donc de rendre le bâtiment perméable à l’air mais de manière douce, diffuse, et si possible contrôlée. »

 Une étable est toujours soumise à une ventilation, qui doit toujours s’établir d’un long pan à celui opposé. « On ne doit jamais ventiler une structure de pignon à pignon ! D’abord parce que l’ouverture des portes du couloir d’alimentation va déjà créer une certaine circulation d’air. En outre, ventiler le béton et non les logettes n’a aucun sens. D’autant que cela revient à travailler dans un « tunnel de gare » avec un effet de courant d’air monstrueux ! », explique l’orateur.

La ventilation d’un long pan à l’autre a tout son sens si la largeur du bâtiment n’est pas trop large, au risque de voir le vent entrant ne jamais parvenir à repousser l’air vicié par le pan opposé. Au-delà de 17 ou 18 m de largeur, l’effet-vent devient très compliqué.

Le second effet recherché ? « L’effet cheminée, que tout le monde connaît mais que peu d’éleveurs travaillent ! Il s’agit d’un effet provoqué par l’ouverture dans la faîtière. L’air chaud plus léger monte en emportant la vapeur d’eau hors du bâtiment. »

« Dans 90 % des cas visités, ledit effet est nul. Pire même, la faîtière peut y devenir une zone d’entrée d’air froid. Celle-ci n’a donc pas l’effet attendu », explique-t-il

« Mieux vaut donc avoir bon effet vent dans un bâtiment plutôt qu’aller chercher un effet cheminée qui sera très difficile à obtenir, soit parce que la structure est beaucoup trop haute, soit parce que la faîtière peut être beaucoup trop fermée. »

Pratiquement, un bâtiment doit être orienté de sorte que ses longs pans soient perpendiculaires à l’axe des vents dominants (chez nous : SO- NE). Évidemment plus le bâtiment se déporte par rapport à cet axe, moins la ventilation est efficace. On peut ensuite y associer une vraie ouverture au faîtage si l’on veut avoir un effet cheminée. Le problème à l’heure actuelle? De plus en plus de structures couvrantes sont positionnées au-dessus de la ligne de faîtage mais trop proches des pans de toiture, ce qui réduit très fortement le tirage.

Des surfaces opérantes !

Pour obtenir l’effet vent, encore faut-il avoir des surfaces ouvertes réellement opérantes. Pour l’orateur, il n’est pas rare de voir un enchevêtrement de végétation ou d’autres structures d’élevage venant réduire la possibilité pour le vent d’arriver au niveau de la surface ventilante. D’autres surfaces peuvent également laisser entrer l’air mais de manière totalement inadéquate : des ouvertures style meurtrière, des oscillo-battants, et écarts au niveau des portes… qui sont autant d’entrées d’air parasite.

Une surface n’est donc opérante que s’il y a une surface d’entrée à laquelle en correspond une autre de sortie. On y place en général un dispositif qui va couper une vitesse d’air excessive (filet brise-vent, claire-voie…). Ils sont toujours caractérisés par le coefficient de réduction de vitesse d’air, soit sa capacité à réduire la vitesse du vent ; le coefficient multiplicateur, soit un indice qui donne la surface qui va effectivement laisser passer l’air. C’est sur base de cette information que le calcul de pose doit se réaliser. Sans connaissance de ce paramètre, il est impossible d’assurer une ventilation correcte du bâtiment.

En termes de surfaces d’ouverture, il existe des recommandations. Encore trop méconnues, celles-ci sont encore souvent malmenées par des desiderata urbanistiques, esthétiques.

Ventilation naturelle ou dynamique ?

Ventilation naturelle ou dynamique? La question se pose souvent. Pour l’orateur, « la ventilation naturelle c’est le choix de l’économie, mais également de se soumettre aux aléas de la météo et donc d’être dans le non-contrôle des paramètres de ventilation. »

La réflexion est évidemment liée à l’orientation du bâtiment. Si celle-ci ne permet pas une bonne ventilation naturelle, l’option dynamique assure une réelle flexibilité dans ce domaine puisque ce sont des dispositifs capables de s’adapter à la météo, à la période de l’année mais aussi à la charge d’animaux dans le bâtiment. C’est donc un confort dans le travail mais qui représente un certain coût à l’achat mais aussi un coût au quotidien en termes de fonctionnement.

Si l’orientation du bâtiment le permet, mieux vaut d’abord réfléchir à la possibilité de travailler avec l’option « naturelle ». C’est souvent une question de bon sens en termes d’effets vent, et de possibilité de bien ventiler la structure plutôt que de directement se poser la question d’un investissement sur une ventilation dynamique. Attention que ces systèmes ne règlent pas tout ! Ils sont parfois mal installés, car mal conseillés.

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Si vous êtes dans un projet de construction ou de réaménagement de bâtiment, que ce soit pour des bovins adultes ou de jeunes bêtes… ou si vous voulez tout simplement faire le point sur l’ambiance de votre étable, il est possible de vous adresser à l’Arsia qui propose ce service. N’hésitez pas à la contacter au 083/23.05.15. (option 4 pour l’administration de la santé).

P-Y L.

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