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Chez les Fafchamps (Bolland), la course à la productivité n’est pas forcément liée au nombre de laitières!

L’Aredb de Herve-Fléron-Visé a retrouvé ses bonnes vieilles habitudes en organisant de nouveau avec le soutien du Ceta de Dalhem ainsi que d’Elevéo, les portes ouvertes de deux exploitations laitières du Pays de Herve qui ont une excellente maîtrise de leurs coûts alimentaires notamment par le biais du pâturage et de la bonne valorisation des fourrages grossiers. Cap sur Bolland, à la rencontre de Laurent Fafchamps et de son père, Paul.

Temps de lecture : 7 min

La famille Fafchamps s’est installée en élevage laitier en 1962, à Bolland, sous l’impulsion de Paul, le père de Laurent. Ce dernier s’associe à son paternel au 1er avril 2007, après avoir travaillé une dizaine d’années à l’extérieur, chez Joskin. Il décide toutefois de garder mi-temps dans l’entreprise, dont les installations sont relativement proches. Il le réduira à une dizaine d’heures par semaine au moment de la 2e reprise en 2013, à la pension de son père.

L’installation en 2007 s’accompagne de la construction d’une nouvelle étable. Pour le jeune éleveur, il est important de relocaliser l’étable de façon plus optimale par rapport aux pâtures et à la topographie des terrains. Il quitte donc le creux dans lequel son père s’était installé pour « grimper » la colline. Il a alors un parcellaire de 18 ha disponible directement autour de la ferme. Le bâtiment est clairement pensé pour pouvoir s’adapter à terme à une seule unité de main-d’œuvre. Il en profite du nouveau bâtiment pour installer une salle de traite 2 x 6 en épi avec décrochage, compteurs et alimentateurs manuels. Dans la laiterie, le refroidisseur jouxte l’ancien afin de permettre un chargement à n’importe quelle heure (prime logistique Arla). Elle est en outre équipée d’un pré-refroidisseur et d’un récupérateur de chaleur.

Les génisses seront les premières à passer l’hiver 2007-08 dans la nouvelle structure. Elles y seront rejointes par le reste du troupeau à partir d’avril 2008. Pour les deux éleveurs, la priorité est de conserver une exploitation à taille humaine afin de se dégager d’une trop forte astreinte et profiter du temps passé en famille. Les quelques heures de travail par semaine prestées à l’extérieur sont un bol d’air pour Laurent.

Laurent estime d’ailleurs qu’actuellement, il peut être à 95 % autonome. S’il venait un jour à devoir travailler seul, il réduirait simplement son cheptel de quelques têtes, toujours dans l’esprit de pouvoir prendre de la hauteur par rapport à son travail.

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P-Y L.

Près de 90 % des prairies valorisées par les bovins

L’exploitation s’étend sur 61,5 ha : 45 de prairies permanentes ; 11,5 ha de maïs ensilage et 5 ha de froment. Quelque 85 à 90 % de la surface fourragère sont valorisés par le troupeau bovin. Le reste de la superficie est consacré à des ventes de fourrages à des tiers ou à l’élevage de chevaux géré par l’épouse de Laurent.

De la place pour les animaux

Chez les Fafchamps, les places sont comptées. En 2019, le troupeau moyen était constitué de 73 vaches et 52 jeunes bêtes.

Il n’y a pas d’exagération au niveau des animaux. Avec 66 logettes, et 71 places au cornadis, père et fils ne veulent pas surcharger leur infrastructure. C’est une manière pour eux d’assurer la bonne santé du troupeau, d’avoir des bons résultats au niveau du lait (le taux cellulaire moyen avoisine les 150.000 cellules) et de réduire les frais vétérinaires. S’il y a une course à la productivité par vache, elle n’est donc pas liée à leur nombre !

Le côté jeunes bêtes est constitué d’un espace pour petits veaux, d’un box d’apprentissage caillebotis logettes, et de 52 logettes, tant pour les jeunes bêtes que les taries.

Dans l’étable les places sont comptées. Il n’est pas question de surcharger la structure. Et cela participe aux bons résultats de l’exploitation.
Dans l’étable les places sont comptées. Il n’est pas question de surcharger la structure. Et cela participe aux bons résultats de l’exploitation. - P-Y L.

Du bon lait pour les veaux

S’il était de coutume que les vaches vêlent à l’extérieur sur une petite parcelle à proximité de l’étable, une aire paillée est disponible depuis peu.

Cette installation permet à l’éleveur de laisser les veaux quelques heures après la naissance sous leur mère. Après séparation, ils reçoivent pendant quelques repas le lait des premières traites. Jusqu’à leur sevrage, les veaux sont soignés au lait de la ferme (2 x 2 l de lait par jour à partir d’1,5 mois). Ajoutez à cela 1kg de concentrés/jour jusqu’à un an, en plus du foin. Seuls les croisés et les jeunes mâles, destinés à la vente, ne reçoivent aucun concentré, et ce, afin d’éviter les diarrhées.

À 3-4 mois, le préfané sec entre dans la ration. De 12 mois au 1er vêlage, les génisses ne reçoivent que de l’herbe enrubannée avec un petit complément de minéraux. Elles peuvent d’ailleurs sortir en pâture une fois qu’elles sont en début de gestation.

Il est clair que les quantités de concentrés par jeune bête sont très faibles, et l’âge au 1er vêlage n’est pas exceptionnel : 30 mois. Toutefois, les Fafchamps sont dans un système qui leur correspond et qui fonctionne ! L’intervalle vêlage moyen est correct : 404 jours, avec 40 % de ceux-ci inférieurs à 380 jours. Notons que le taux de réforme est de 21 % avec un âge moyen de 68 mois.

Les jeunes veaux sont tous démarrés à la tétine. Après 15 jours, les génisses passent  au seau individuel, puis reçoivent le lait dans un bac collectif après 1,5 mois.  Ils reçoivent environ 2 x 2 l de lait par jour jusqu’au sevrage vers 3-4 mois.
Les jeunes veaux sont tous démarrés à la tétine. Après 15 jours, les génisses passent au seau individuel, puis reçoivent le lait dans un bac collectif après 1,5 mois. Ils reçoivent environ 2 x 2 l de lait par jour jusqu’au sevrage vers 3-4 mois. - P-Y L.

Une ration pour une production de 30 l/ jour

À l’auge, les laitières reçoivent 15 kg brut d’ensilage d’herbe, 20 kg brut d’ensilage de maïs, près de 800 g de foin et 2 kg de drêches de riz. « Nous avons la chance d’avoir un producteur de glucose et d’amidon qui utilise du riz et des céréales pour en extraire les sucres non loin de l’exploitation. Les drèches sont proches du Gluten Feed et relativement bon marché (environ 55 €/t) car l’approvisionnement n’est pas constant. »

Avant de soigner avec le mélange du jour, près d’1 kg/vache/jour de pulpes sèches est distribué sur les restes de la veille.

En outre, les vaches reçoivent une noix de production à 16 % de protéines dans la salle de traite. La ration est calculée pour une production journalière par vache de 30l. Selon la méthode compta, la production moyenne est de 8.548 l/vache ce qui est plutôt bien (9.500 l au contrôle laitier), étant donné que les dosages en concentrés sont faibles (3,67 kg de concentrés de production/VT/j) et que la moyenne de la région est de 7.600 l/vache.

Selon les données du contrôle laitier, en janvier, la production moyenne journalière était de 30 l/ jour à 3,94 % MG et 3,32 % de protéines. La moyenne annuelle est quant à elle de production par vache de 9.300l à 4,04 % MG et 3,34 % de protéines. La production viagère moyenne des bêtes réformées est de 48.582 l de lait.

Un suivi des animaux poussé

À Bolland, le suivi des animaux est particulièrement poussé. Les différents résultats zootechniques le démontrent, et ce sans dérapage au niveau des frais de cheptel. En effet, le total des frais de reproduction, vétérinaires, médicaments, litières, contrôle laitier, cotisations sanitaires… est de 185 €/vache alors que la moyenne des exploitations laitières spécialisées de la région est de 223 €/individu.

Un bon résultat qui s’explique en partie par la politique de tarissement. Les productrices sont généralement taries entre 6 et 8 semaines. À l’approche de cette étape, elles ne sont plus traites qu’une fois sur deux pendant quelques jours.

Les vaches de 1ère et 2e lactation n’ayant pas eu de mammites sont taries uniquement à l’aide d’obturateurs. Les vaches de 3 lactation et + (ainsi que les 1ères et 2e lactation avec mauvais indice cellulaire) sont taries avec antibiotique.

Côté reproduction, l’ensemble du troupeau est inséminé. Il n’y a pas de place pour un taureau de rattrapage. Les vaches ne sont généralement pas inséminées à moins de 3 mois après vêlage. Pour ce faire, Paul choisit les reproducteurs, en collaboration étroite avec l’inséminatrice. Les priorités de sélection : amélioration des taux, de la fertilité, avoir de bonnes pattes, vitesse de traite, et qualité du pis (dont écartement des trayons arrière). Par cette sélection, l’éleveur tend également à rectifier quelques problèmes d’inclinaison de bassin.

L’éleveur ne réalise pas énormément de croisement industriel. Du croisement B-BB est pratiqué à partir de la 3e ou 4e IA sur certaines vaches.

Des coûts de production corrects

Pour 2018, le total des coûts de production hors main-d’œuvre familiale est de 33,87 €/100 l chez Laurent Fafchamps et de 30,78 €/100l en moyenne pour les éleveurs laitiers spécialisés du Pays de Herve.

Dans ces 33,87 €/100l, la part de l’alimentation y représente 20,34 €/100 l, la moyenne pour la région est de 20,06 €/100 l. Les achats d’aliments compensent donc les frais (fixes) de superficie fourragère (SF) (relativement élevés de par l’achat de nouveaux matériels, et d’une superficie plus élevée que la moyenne).

« Nous sommes dans des coûts tout à fait raisonnables et c’est en partie le pâturage qui permet de les réduire », conclut Laurent.

Propos recueillis par P-Y L.

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