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Sur la route avec mon bétail: devoirs, responsabilités et précautions

Producteur laitier, durant la bonne saison, j’emprunte une portion de route d’environ 50 mètres avec mes vaches. Il s’agit d’une voie agricole qui fut aménagée lors du remembrement. Hormis les engins agricoles, celle-ci est aussi admise aux cyclistes et aux promeneurs. De temps à autre, je suis confronté à des cyclistes qui n’apprécient pas (c’est le moins que l’on puisse dire) le fait de se retrouver face à mes vaches. Quels sont les droits et devoirs de chacun ? Qui serait responsable en cas d’accident ?

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D ’après l’article 1er du code de la route, une voie publique est toute voie accessible à la circulation terrestre. N’est pas considérée comme voie publique une voie ouverte uniquement à certaines catégories d’usagers. Étant donné que le chemin est accessible aux cyclistes et promeneurs, vous devez, en tant que propriétaire d’animaux, tenir compte de ces usagers.

Des animaux à maîtriser dans le trafic…

Le législateur a pensé aux animaux lors de l’élaboration du Code de la route. L’article 55 stipule que le conducteur d’animaux de trait, de charge ou de monture, ainsi que de bestiaux, doit, le cas échéant, être assisté de convoyeurs en nombre suffisant. En outre, le conducteur d’animaux et les convoyeurs doivent constamment se tenir à proximité des animaux et être en état de les maîtriser afin d’empêcher qu’ils entravent la circulation et provoquent des accidents.

Par ailleurs, l’article 8.3 du Code de la route mentionne que tout conducteur doit être en état de conduire, présenter les qualités physiques requises et posséder les connaissances et l’habileté nécessaires. Il doit être constamment en mesure d’effectuer toutes les manœuvres qui lui incombent et doit avoir constamment le contrôle du véhicule ou des animaux qu’il conduit.

Des obligations pour l’usager

En vertu de l’article 8.3 du code de la route, le propriétaire des animaux n’est pas le seul à avoir des devoirs. Les autres usagers de la route, les cyclistes par exemple, en ont également. Sur la base de l’art. 10.3 du Code de la route, tout conducteur doit ralentir lorsqu’il approche d’animaux de trait, de charge et de monture, ou de bestiaux se trouvant sur la voie publique. Il doit même s’arrêter lorsque ces animaux montrent des signes de frayeur. L’obligation de ralentir à l’approche de ces animaux existe sans égard au fait que ces animaux montrent des signes de frayeur ou tout autre comportement craintif, et même s’ils sont encore assez loin du conducteur.

Selon le Tribunal de Police de Bruges, le conducteur ne doit toutefois pas tenir compte de l’effroi d’un cheval au moment même du dépassement. (Trib. Pol. Bruges 25 mars 2002, T.A.V.W. 2003, éd. 3, 254.). Cette déclaration est conforme à la position classique de la Cour de Cassation qui a jugé, il y a longtemps déjà, qu’il n’est pas possible de prendre en compte le sursaut de l’animal au moment du passage. Par conséquent, il est essentiel que les animaux présentent des signes de frayeur au préalable (Cass. 5 mai 1947, Pas., I, 186).

La responsabilité des animaux

L’article 1385 du Code civil précise que « le propriétaire de l’animal ou celui qui s’en sert, pendant qu’il est à son usage, est responsable du dommage que l’animal a causé, soit que l’animal fût sous sa garde, soit qu’il fût égaré ou échappé ». Cette disposition institue une présomption de responsabilité du fait des animaux à charge de leur propriétaire ou gardien. Pour que cette présomption de responsabilité trouve à s’appliquer, il suffit que le dommage ait été causé par un fait de l’animal. Aucune faute ne doit être prouvée dans le chef du gardien.

Selon la Cour de Cassation, pour que la personne qui a la garde d’un animal soit déclarée responsable du dommage causé par celui-ci, il suffit qu’au moment du fait dommageable, le gardien ait la maîtrise de l’animal, comportant un pouvoir de direction et de surveillance, sans intervention du propriétaire, et un pouvoir d’usage égal à celui de ce dernier ; il n’est pas requis que le gardien dispose d’un pouvoir incontesté, exercé pour compte propre.

Comme dit plus haut, le propriétaire de l’animal est, en vertu de l’article 1385 Code civil, même responsable du dommage causé par l’animal qui s’est échappé.

Prendre des précautions et placer des panneaux

Vu les différentes obligations résultant du Code de la route et le principe de responsabilité pour ses animaux, un agriculteur qui doit emprunter la voirie avec son troupeau a tout intérêt de prendre des précautions.

Tout d’abord, vous pouvez signaler, par vous-même, aux cyclistes et promeneurs, de la façon la plus visible possible, que la route est utilisée par l’agriculture et pour le passage et la traversée de bétail. Il serait tout aussi bien, sinon mieux, de demander à la commune d’implanter des signaux de danger au bord de la route. Le placement des panneaux de signalisation par la commune a une valeur supérieure à vos propres panneaux ou avertissements. Il existe d’ailleurs un panneau de signalisation spécifique pour la traversée de bétail, le panneau de danger A 29. Ce panneau de signalisation avertit les cyclistes et piétons qu’ils peuvent être confrontés à des animaux se trouvant sur le chemin.

L’article 66 du code de la route stipule que les signaux de danger sont placés à droite. Ils peuvent être répétés aux endroits où la circulation le justifie. Les signaux de danger sont placés à une distance approximative de 150 m de l’endroit dangereux. Dans des circons tances particulières, ils peuvent cependant être placés à une distance inférieure ou supérieure à 150 m. Dans ce cas, la distance approximative entre le signal et l’endroit dangereux est in diquée sur un panneau additionnel.

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