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Le Fiat 550, un double médaillé d’or à la conquête de nos campagnes

En 1969, tandis que les américains Neil Armstrong et Buzz Aldrin marchent sur la lune, Fiat règne en maître sur le travail de la terre avec son modèle 550. Ce tracteur vient en effet de remporter le championnat du monde de labour, et ce pour la seconde fois consécutive. Pour mettre en avant cet événement, Fiat Trattori n’hésite pas à publier une brochure spécifique de quatre pages qui y est intégralement dédiée, et que nous avons retrouvée dans nos archives.

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La première page de ce document est sans équivoque : sur ses deux tiers supérieurs trône la photo du gagnant, triomphant, soulevant à bout de bras la Charrue d’Or, debout sur son Fiat 550 avec, en arrière-plan, des drapeaux Fiat flottant au vent. Sous cette illustration s’affiche, en caractères gras et en oblique, le très simple mais très explicite titre « Champion du Monde 1969 ».

Des publicités sans égal

Par cette publication, le constructeur italien démontre qu’il maîtrise parfaitement l’art publicitaire. Il faut dire que l’enjeu est de taille : Fiat Trattori a lancé l’année précédente la commercialisation de sa nouvelle série de tracteurs « Nastro d’Oro », dont fait partie le 550, et sur laquelle mise beaucoup la marque. L’appellation « Nastro d’Oro », que l’on peut traduire littéralement par « Ruban d’Or », fait référence aux noces d’or et a été retenue pour qualifier cette nouvelle série de tracteurs dont la sortie coïncide avec le cinquantième anniversaire de la division agricole du groupe Fiat.

Annoncée en 1967, cette nouvelle gamme est officiellement présentée et directement commercialisée en janvier 1968 à l’occasion de la Foire agricole de Vérone. Comportant initialement huit modèles, dont le 550, cette gamme s’étoffera et évoluera progressivement au fil des années et comptera dans ses rangs des modèles bien connus dans nos fermes, tels le 640, le 750, le 850, le 900, ou encore les illustres 1000 et 1300.

M. Fleming Thyssen est sacré champion du monde de labour  en 1969 au volant d’un Fiat 550.
M. Fleming Thyssen est sacré champion du monde de labour en 1969 au volant d’un Fiat 550.

En 1968, Fiat compte beaucoup sur ces nouveaux tracteurs arborant un design épuré, élégant et uniforme pour tous les modèles de la gamme, quelle que soit leur puissance, qu’ils soient à roues ou à chenilles. D’un point de vue technique, le constructeur a joué, dès la conception, la carte de la modularité, permettant de simplifier l’engin et d’en réduire les coûts de production.

Les victoires au championnat du monde de labour du Fiat 550 dès sa sortie en 1968, et celle en 1969 confortant encore la première, constituent à n’en point douter des publicités sans égal à l’époque. Le constructeur n’hésite d’ailleurs pas à mettre en avant le caractère conquérant des vainqueurs, à l’image de sa volonté de partir à l’assaut du marché européen. Un défi visiblement relevé puisque, plus de cinquante ans plus tard, bon nombre de tracteurs « Nastro d’Oro » sont toujours en service aux quatre coins du continent.

Un prospectus savamment réfléchi

Pour dévoiler largement cette série, Fiat distribue à travers son réseau commercial différents types de prospectus : il existe des folders dépliables présentant dans les grandes lignes les différents modèles de la gamme. Parallèlement à ceux-ci, le constructeur a édité des documents recto-verso en format A4 alloués à chacun des modèles.

Le format et le canevas de présentation sont identiques, seule change la couleur de la face avant du document. Dans le cas du Fiat 550 qui nous intéresse, celle-ci est verte. L’appellation du modèle est reprise dans le coin supérieur droit, tandis qu’une photo de face et une photo de profil du tracteur en noir et blanc sont insérées à l’avant-plan d’un quadrillage blanc. Ce dernier n’est pas anodin puisqu’une légende renseigne qu’un côté d’un carré représente cinquante centimètres ; il permet donc de se faire une idée en un coup d’œil de la taille du véhicule.

La couverture de couleur verte du prospectus dédié au Fiat 550.
La couverture de couleur verte du prospectus dédié au Fiat 550.

Mais ce quadrillage revêt aussi une portée symbolique, en rappelant subtilement celui des papiers quadrillés des planches à dessin, et évoquant alors une conception soignée et étudiée. Au verso sont repris les différentes spécifications techniques de l’engin, les listes d’équipements standards et d’options, deux schémas du tracteur avec ses principales dimensions, le logo de Fiat Trattori, et les coordonnées de la société Fiat Belgio S.A. à Waterloo.

4 cylindres, 58 ch

Le Fiat 550 est mû par un moteur de la maison, à savoir le bloc Fiat type 854 à quatre cylindres, injection directe et refroidissement liquide, développant une puissance de 58 ch. La boîte de vitesses dispose de série de huit rapports en marche avant et deux rapports en marche arrière. Les 3e, 4e, 7e et 8e  vitesses sont synchronisées. Le différentiel est muni d’un dispositif de blocage commandé par pédale avec déblocage automatique.

Ce tracteur, pesant 2.050 kg, possède un embrayage indépendant pour la prise de force et un relevage hydraulique Controlmatic à effort et position contrôlés. Au rayon des options, il peut, à titre d’exemples, recevoir un distributeur auxiliaire, une poulie de battage, des masses de roue, des vitesses ultra-lentes (4 AV + 1 AR) ou encore une direction assistée hydrauliquement.

Maniabilité et puissance

Fiat vante naturellement son modèle 550 au travers du prospectus dédié à la victoire au championnat du monde de labour 1969. C’est ainsi que le titre principal du sujet annonce : « Pour la deuxième fois consécutive, le tracteur Fiat 550 remporte le championnat du monde de labour ». Et l’auteur de poursuivre en mettant en exergue une « nette affirmation du tracteur Fiat 550 » dans une « importante confrontation internationale ».

Il faut dire que ces propos ne sont pas démentis par les résultats finaux puisque deux Fiat 550 terminent la compétition sur le podium en ravissant les 1ère et 2e  places tandis que trois autres tracteurs identiques se classent également dans les dix premiers, sur un total de 37 concurrents. Les marques engagées se répartissent comme suit : Massey-Ferguson (avec 14 tracteurs, dont deux occuperont les 3e et 4e  places), Fiat (6 tracteurs), IMT, David Brown, Belarus, Zetor, Dutra, Volvo, John Deere, International Harvester, Nuffield et Bicher. Pour l’anecdote, deux Belges concourraient sur des Fiat 550, l’un se classant neuvième, l’autre seizième.

L’auteur enfonce une nouvelle fois le clou en réaffirmant les indéniables qualités de ce nouveau Fiat au labour : « Cette victoire, qui renouvelle le succès remporté l’an dernier par le hollandais Marinus Schoonen, toujours avec un Fiat 550, confirme en plus de l’habileté personnelle des gagnants les points de supériorité du tracteur Fiat 550 : maniabilité et puissance ».

Plonger l’acheteur dans le concours

La seconde partie du document relate, sous forme d’une chronique, le déroulement de ce 16e  championnat du monde de labour ayant eu lieu à Belgrade les 26 et 27 septembre 1969. La première journée s’ouvre sur des chants et danses folkloriques de la Yougoslavie de l’époque, entrecoupés par des discours, tantôt des autorités publiques locales, tantôt du président de la World Ploughing Organization (Organisation Mondiale du Labour). Le coup d’envoi du championnat est ensuite donné par le dernier vainqueur en date.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, les concurrents défilent en parade devant les spectateurs, puis s’avancent vers le terrain de concours. La première journée est dévolue au labour sur chaumes. Une fois les participants positionnés, une première fusée rouge est tirée pour donner le signal « Prêts ». Quelques instants plus tard, une autre fusée, verte cette fois, annonce le véritable départ. Les concurrents doivent labourer la surface du terrain qui leur est allouée. La victoire réside dans la recherche de la perfection.

Sillon d’ouverture tracé par un concurrent australien qui terminera second,  également au volant d’un Fiat 550.
Sillon d’ouverture tracé par un concurrent australien qui terminera second, également au volant d’un Fiat 550.

Les sillons doivent être impeccablement droits et de largeur parfaitement contrôlée. Les machines et les hommes évoluent donc à vitesse très réduite et il n’est pas rare de voir les conducteurs descendre de leur engin pour affiner leurs réglages ou mesurer la largeur résiduelle. « De la largeur de la tranche ultime dépend le succès ; en effet, pour une parfaite fermeture, il faut qu’il reste à retourner une tranche aussi large que la largeur de travail de la charrue : c’est la classique fermeture par dérayure », nous est-il expliqué. Le travail accompli, les participants quittent le champ, laissant leur place aux membres du jury qui commencent alors la fastidieuse et délicate opération de cotation des prestations.

Le second jour voit les concurrents rivaliser dans une compétition en tous points identiques, si ce n’est la surface sur laquelle ils évoluent : ce ne sont plus des chaumes qu’il faut labourer mais de la prairie. Pour l’occasion, certains modifient les réglages de leur charrue ou adoptent des versoirs plus hélicoïdaux. Des compétiteurs changent même carrément de charrue.

Le service d’assistance technique du constructeur n’est jamais loin en cas de besoin.  Il en est de même au quotidien pour les travaux des champs.
Le service d’assistance technique du constructeur n’est jamais loin en cas de besoin. Il en est de même au quotidien pour les travaux des champs.

Au fur et à mesure que s’égrène le temps, la tension devient de plus en plus palpable : « Il y a une grande tension dans l’air, aujourd’hui on désigne celui qui, pour un an, sera le détenteur de la charrue d’or tant convoitée. Les dérayures ont lieu avec une lenteur exaspérante ; les labours tiennent plus de la dentelle que du travail agricole normal », nous commente le narrateur.

Fiat assoit sa notoriété

Le soir, au cours d’une réception à la hauteur de l’événement, le secrétaire général de la World Ploughing Organization proclame le vainqueur, à savoir celui qui a obtenu le meilleur score sur l’ensemble des deux journées de compétition. Il s’agit d’un jeune danois, d’une vingtaine d’années, M. Fleming Thyssen.

Cette victoire, obtenue de haute lutte, permet d’assoir la notoriété naissante du Fiat 550 et, plus généralement, de l’ensemble des modèles « Nastro d’Oro » du constructeur italien, des tracteurs à la robe orange si caractéristique qui ont laissé encore de très nombreux autres souvenirs à leurs utilisateurs dans nos campagnes…

N.H.

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