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Prairie occupée et payée par virement:Y a-t-il bail à ferme? Puis-je donner congé?

Suite au décès de nos parents, nous sommes trois enfants à vouloir vendre leur maison et une pâture adjacente. Cette prairie a été donnée en location à un agriculteur du village sans écrit. À l’époque, il avait promis de quitter la prairie à la première demande. Ces dernières années, la location a été payée par virement et aujourd’hui, il ne veut pas libérer notre pâture et il invoque la protection de la loi sur le bail à ferme.

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Nous pensons en effet qu’un bail à ferme est en cours. Il y a bail à ferme dès qu’un agriculteur professionnel (à titre principal ou à titre complémentaire) exploite un terrain dans son exploitation agricole contre le paiement d’un loyer. Toutes ces conditions semblent remplies.

Un bail peut être conclu par écrit ou verbalement. Dans votre cas, il n’y a pas d’écrit mais l’agriculteur n’aura guère de difficultés à prouver qu’il y a un bail à ferme en sa faveur. Si la convention de bail n’existe pas par écrit, l’agriculteur lui-même doit prouver l’occupation, l’exploitation et le paiement d’un fermage.

La Loi sur le bail à ferme prévoit un système spécial pour prouver l’existence d’un bail à ferme. L’article 3 stipule que celui qui exploite un bien rural pourra fournir la preuve de l’existence du bail et de ses conditions par toutes voies de droit, témoins et présomptions compris. Vu les virements, il ne nous semble pas possible de contester l’existence d’un bail à ferme.

Résiliation amiable

La vente globale de la maison et la prairie sera plus intéressante que la vente de la maison seule. Vous avez donc tout intérêt à attendre la fin du bail à ferme pour pouvoir vendre la totalité libre d’occupation.

L’article 14 de la loi sur le bail à ferme prévoit une possibilité pour les parties de mettre fin au bail à ferme de commun accord. Dans la pratique, le bailleur offre un certain montant au preneur afin qu’il accepte de mettre fin au bail.

Votre preneur ne se rappelant plus sa promesse, vous pouvez tenter de le convaincre en lui proposant une indemnité de sortie. S’il accepte, il faudra alors s’adresser au Juge de Paix ou à un notaire pour prendre acte de cet accord.

Congé pour vendre ?

Lors la dernière réforme de la loi sur le bail à ferme, une nouvelle possibilité de donner congé pour vendre une parcelle louée a été inscrite dans la loi sur le bail à ferme.

Ainsi, le bailleur a maintenant la possibilité de notifier un congé dès qu’il souhaite mettre en vente un bien loué, et ce, quelle que soit la situation du locataire.

Ce nouveau genre de congé est subordonné au respect des trois conditions cumulatives : la parcelle qui fait l’objet de la vente doit être identifiée préalablement dans le contrat de bail ; la parcelle doit présenter une superficie maximum de deux hectares ou pas représenter plus de 10 % d’un ensemble de parcelles d’un seul tenant faisant partie d’un même bail entre le même bailleur et le même preneur ; le locataire a bénéficié du bail portant sur la parcelle durant au moins trois ans préalablement au congé donné par le bailleur.

Ce type de congé ne semble pas applicable dans votre cas, la première condition ne pouvant pas être respecté. Le texte de la loi stipulant que la parcelle agricole doit être identifiée préalablement dans le contrat de bail suppose en effet que le bail ait été conclu par écrit. N’ayant pas d’écrit dans votre cas, vous ne pouvez pas donner congé sur base de l’article 6 § 4 de la Loi sur le bail à ferme.

Néanmoins, rien ne vous empêche d’établir avec votre preneur un contrat de bail à ferme écrit dès aujourd’hui pour lui donner congé par après.

Notons aussi que, même après un congé pour vendre la pâture louée, le preneur garde son droit de préemption sur la pâture.

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