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De nouvelles références disponiblespour la ventilation naturelle des bâtiments

Dans le cadre de l’édition Space 2020, l’Institut de l’Élevage a proposé une série de conférences, dont l’une sur la ventilation naturelle des bâtiments d’élevage pour ruminants. Bertrand Fagoo, chercheur à l’Idele s’est intéressé aux nouvelles références et au nouvel outil qui les intègre : Shelt-air.

Temps de lecture : 9 min

C’est un fait : renouveler l’air des bâtiments est essentiel non seulement pour la santé et le bien être des animaux, mais également pour la santé de l’éleveur et la durabilité des bâtiments et de ses équipements.

Avant d’en venir aux nouvelles références pour calculer les surfaces ventilantes en bâtiments pour ruminants, Bertrand Fagoo, chercheur à l’Idele, revient sur les variables qui ont une incidence sur le confort des animaux.

La crainte de la chaleur

Que l’on soit en laitier ou en allaitant, les ruminants craignent peu le froid. En effet, les vaches ont des conditions thermoneutres qui s’échelonnent de 2ºC à 15ºC. Mais pour un ruminant adulte, des températures allant jusqu’à -10ºC ne posent aucun problème. Une attention particulière doit toutefois être portée sur les nouveaux nés qui y sont plus sensibles.

Par contre, ces animaux craignent fortement le chaud avec un ressenti différent de celui de l’homme. À partir de 22ºC, la vache laitière entre en stress thermique (léger). Chez les petits ruminants et les bovins allaitants, le niveau de stress arrive un peu moins rapidement qu’en laitier. En été, il est donc nécessaire de réduire la température ressentie quand les animaux sont à l’étable.

Mais ce ressenti ne dépend pas que de la température mais également de l’hygrométrie, de la vitesse du vent et du rayonnement solaire.

Le taux d’humidité joue un rôle essentiel quand il est élevé, que l’on soit en hiver ou en été. « En hiver, la condensation est plus rapide quand la température baisse. D’autre part si le ruminant a un pelage humide, il se refroidira plus vite. Si la vitesse d’air s’ajoute à l’humidité ambiante et au froid, c’est la porte ouverte à des soucis sanitaires, notamment des problèmes respiratoires qui frappent surtout les plus jeunes animaux », explique M. Fagoo.

En été, c’est l’inverse mais l’humidité reste gênante. Au plus, le taux est élevé, au plus l’animal a du mal à évacuer de la chaleur.

Savoir profiter de la vitesse de l’air…

Raison pour laquelle avoir une certaine vitesse d’air en bâtiment est important. En hiver, une vitesse élevée va permettre de diminuer la température ressentie par l’animal. Si ce n’est pas forcément gênant pour les bovins adultes puisqu’ils supportent des vitesses d’air de 0,5 à 1m/s. C’est par contre beaucoup plus incomodant pour de très jeunes animaux qui vont supporter des vitesses d’air de maximum 0,25m/s. Il est donc difficile pour cette catégorie d’animaux de renouveler l’air dans une étable. Autant pour les bâtiments vache laitière on peut avoir des bâtiments très ouverts, autant pour les logements des individus les plus jeunes, ce sera compliqué au vu de la vitesse d’air maximale « autorisée ».

En été les vitesses d’air sont bénéfiques, de sorte que l’éleveur va devoir les rechercher. Elles vont permettre aux animaux d’avoir une température ressentie plus faible que la température de l’air. C’est un moyen de lutte contre le stress thermique.

Deux solutions pour en bénéficier : l’aménagement d’ouvertures dans les parties basses des bâtiments et, dans un second temps, l’installation d’une ventilation mécanique qui peut être utile dans certaines configurations d’étable.

… et du rayonnement solaire

Si le rayonnement solaire est bénéfique l’hiver (assécher la litière et apporter du bien-être aux animaux, notamment de la vitamine D), il est à éviter en été. Aujourd’hui, les bâtiments sont conçus pour réduire le rayonnement solaire direct et indirect à l’intérieur en été.

Des situations très diverses

En France comme en Belgique, les situations des bâtiments sont très diverses. Nombreux sont ceux qui peuvent être plus ou moins handicapés dans leur ventilation naturelle par divers éléments.

« Chez nous, contrairement à d’autres pays d’Europe du nord, qui ont de grandes plaines avec peu d’obstacles à la circulation de l’air et du vent, il existe peu de modèles standards. Toutes les structures sont différentes. Rares sont les bâtiments qui en copient un autre. Les conditions d’implantations et d’exposition au vent sont aussi très variables. Entre les bâtiments de plaine, en fond de vallée ou en plus haute altitude, il y a donc forcément des conséquences sur le fonctionnement de leur ventilation naturelle.

Par ailleurs, avec l’évolution des élevages, la tendance est à l’agrandissement tant des troupeaux que des étables. Celles-ci deviennent plus difficile à ventiler. Il est donc primordial de penser davantage en termes de ventilation naturelle.

Pour l’orateur, la ventilation par effet vent, a aujourd’hui un effet prépondérant. Pour les bâtiments anciens de petit volume, on parlait plutôt d’effet cheminée. « L’effet vent est dû à la pression du vent sur un long pan, et à la dépression occasionnée sur celui opposé qui favorisent un balayage et un renouvellement de l’air à l’intérieur de la structure. Toutefois pour que ledit effet soit efficace, les bâtiments ne doivent pas être trop larges (20m max), à moins que dans certaines configurations, l’éleveur accepte d’avoir un peu plus de vitesses d’air.

L’effet cheminée dans des bâtiments dits «cathédrales» est souvent nul car l’air chaud va se refroidir en arrivant au niveau de la faîtière et l’humidité va rester coincée dans le bâtiment. Ce sera d’autant plus marqué pour des jeunes animaux se trouvant dans de trop grands volumes. En effet, ils produisent moins de chaleur et l’effet cheminée est d’autant plus illusoire.

L’implantation et la conception des bâtiments très impactantes

En période hivernale, le fait d’avoir une grande enveloppe de bâtiment va induire une toiture qui va davantage rayonner le froid, qui au contact de l’air chaud des animaux va produire une condensation beaucoup plus rapide, suivie d’une baisse rapide de la température interne de l’étable. L’effet cheminée y est donc perturbé voire inopérant.

À l’inverse l’été, une très grande structure aura du mal à faire circuler l’air en son sein et risque d’accumuler de la chaleur en son centre. L’isolation du toit peut être une solution efficace mais seulement pour les bâtiments relativement bas.

Le renouvellement de l’air dans les bâtiments dépend fortement de son orientation. Aujourd’hui, avec le changement climatique, il y a de moins en moins de vents dominants. On parle de vents fréquents qui sont beaucoup plus changeants qu’auparavant. L’implantation de la structure doit donc se raisonner par rapport à ceux-ci. Il est dès lors déconseillé de positionner des structures dans un angle de 0 à 20º par rapport auxdits vents.

L’implantation a de lourds impacts sur le fonctionnement du bâtiment. La situation, les obstacles peuvent induire un moins bon bénéfice de l’effet vent dans certaines étables. Notons que la conception d’une structure va elle aussi avoir un effet plus ou moins favorable sur la ventilation (cf. Figure 1).

Fig. 1: La conception d’une structure va elle aussi avoir un effet plus ou moins favorable sur la ventilation naturelle de celle-ci.
Fig. 1: La conception d’une structure va elle aussi avoir un effet plus ou moins favorable sur la ventilation naturelle de celle-ci.

Pour ce faire une bonne exposition aux vents est nécessaire, tout comme des bâtiments relativement étroits. C’est la raison pour laquelle il faut viser des structures les plus indépendantes possibles en limitant notamment l’impact de l’implantation du bloc traite et des annexes (silos, stockage, nurserie…) en ne les accolant pas à l’aire de repos des bêtes.

« Regrouper tous les blocs a pu être largement adopté par le passé dans les troupeaux moyens pour une meilleure ergonomie du travail (tous les animaux regroupés sur un même site) ; mais aujourd’hui cela pose des soucis lors de l’agrandissement du troupeau, surtout en conditions estivales, avec des chaleurs plus importantes. Notons pour ne pas interagir sur la ventilation, les blocs de bâtiments doivent êtres séparés d’au minimum 15m. L’optimum se situe davantage entre 25 et 30m, ce qui pour beaucoup d’exploitations est totalement impossible », explique bertrand Fagoo.

Des références qui évoluent

« Face à l’ensemble de ces éléments, et à l’agrandissement des structures d’élevage, les références de calculs de surfaces ventilantes ont évolué pour être adaptées aux étables d’aujourd’hui. Elles ont été largement diffusées auprès des experts en bâtiments, conseillers…

Les références de base pour une structure bipente ne changent toutefois pas. Nombreux sont ceux qui connaissent la référence 0,15m² d’ouverture libre par vache laitière, 0,12m² par vache allaitante. »

« Par contre, ces références de bases sont modulées en fonction du volume. Un rapport de volumes a donc été calculé afin d’obtenir une correction des surfaces d’ouvertures ventilantes (CF. Tableau 1). Notons que la modulation suivant les niveaux de production se fait toujours sur la base d’une vache à plus ou à moins de 7.000 l de lait.

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L’environnement du bâtiment doit être lui aussi pris en compte, notamment par le biais de l’exposition au vent, son altitude (cf. Tableau 2)…

3937-STANDARD

L’outil va permettre également de dimensionner et de conseiller la réalisation d’ouvertures en toiture  : les écailles, décalage en toiture libre ou bardée, toiture à fente.

Pour les relais de toiture, la règle est de dire que de 20 à 26m, on intègre un relais par rampant, de 26 m à 36 m deux relais, au-delà de 36 m au moins 3 relais. Dans ce dernier cas, les contions de ventilation seront très difficiles. Mieux vaut donc privilégier la conception de bâtiment étroits quand c’est possible ! »

À noter que des relais en toiture sont encore conseillés quand le décalage intermédiaire entre deux bâtiments est insuffisant ou lorsque l’ouverture au faîtage est insuffisante.

Autre tendance du moment : adapter les bâtiments qui sont de plus en plus occupés l’été soit à cause de la réduction du pâturage, soit à cause du manque d’herbe. L’orateur évoque la notion de rayonnement d’ouverture libre en partie basse. « Il y a des choses simples comme le démontage du bardage, la pose de panneaux articulés, de bardage ajourés coulissant, de guillotines, de rideau avec ouverture du haut vers le bas ou l’inverse…

Pour M. Fagoo, la ventilation mécanique reste une solution de recours dans des bâtiments qui accueillent de jeunes animaux, dans des structures trop larges et mal exposées, ou pour apporter de la vitesse d’air par temps chauds lorsque la ventilation naturelle est inopérante. Trois solutions existent : la plus ancienne l’extraction d’air, la gaine à pression positive ou la pose de ventilateurs pour diminuer la température ressentie.

Shelt-air, un nouvel outil accessible à tous

Shelt-air, issu de la collaboration entre l’Idele et Eternit, est un outil de dimensionnement des ouvertures ventilantes en ventilation naturelle. Disponible sur tout support, il permet d’intégrer, dans les diagnostics ou conceptions de nouveaux bâtiments, les dernières recommandations en termes de ventilation. Les références usuelles sont aujourd’hui modulées en fonction des volumes des bâtiments, de leur localisation géographique et de leur degré d’exposition au vent. Shelt-air en facilite donc l’utilisation.

Ce diagnostic se réalise en 4 phases :

la définition de l’environnement du projet ; la sélection de la filière, la description du bâtiment et l’analyse du projet.

La sortie finale est un fichier de type pdf reprenant les différentes côtes du bâtiment ainsi que le détail des ouvertures ventilantes.

Les projets seront archivés et pourront être modifiés ou dupliqués. L’appli Shelt-air sera disponible en fin d’année 2020.

P-Y L.

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