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Un rendement de 20t/ha en froment d’hiver, l’ambitieux objectif de Syngenta

Si la sélection variétale joue un rôle clé dans l’augmentation des rendements, elle n’est assurément pas le seul élément à prendre en compte. Semis, choix et application des fertilisants, agriculture de précision… influencent également les résultats observés à la récolte. C’est pourquoi Syngenta et ses différents partenaires souhaitent agir sur ces différents leviers pour accroître significativement les rendements en froment d’hiver.

Temps de lecture : 7 min

Le semencier, accompagné de plusieurs partenaires, s’est lancé depuis un an dans l’ambitieux projet « 20 t en froment d’hiver ». L’objectif : accroître durablement le rendement en grains de cette culture en agissant sur différents leviers, tout au long de l’itinéraire technique (choix variétal, travail du sol et semis, fertilisation et protection, technique de récolte et agriculture de précision). Pour expérimenter cela, deux essais comparatifs ont été menés – l’un à Ittre, en Brabant wallon, l’autre à Ooike en Flandre orientale – sous la supervision d’Edward Vander Linden, responsable du projet pour Syngenta Benelux.

« Passer d’un rendement de 10-12 t/ha à 20 t/ha est un objectif ambitieux. Infaisable, diront peut-être certains… Mais si l’on regarde le monde du sport, il était autrefois impossible d’atteindre 6 m au saut à la perche. Aujourd’hui, c’est chose faite. Alors pourquoi ne pas élever les rendements en froment d’hiver et, par conséquent, la rentabilité de la culture ? », s’enthousiasme M. Vander Linden. Outre la hausse des rendements, le projet a pour ambition d’accroître la durabilité de la culture céréalière, en utilisant moins d’intrants qu’actuellement ou en les utilisant mieux.

« L’objectif du projet « 20 t en froment d’hiver » est d’accroître les rendements, mais aussi  la durabilité de la culture, en utilisant moins d’intrants ou en les utilisant mieux »,  détaille Edward Vander Linden, responsable du projet.
« L’objectif du projet « 20 t en froment d’hiver » est d’accroître les rendements, mais aussi la durabilité de la culture, en utilisant moins d’intrants ou en les utilisant mieux », détaille Edward Vander Linden, responsable du projet. - Foto: Syngenta

Gleam, une génétique « maison »

Concernant le choix variétal, le semencier s’est, en toute logique, tourné vers son catalogue et a sélectionné la variété Gleam. « Il s’agit d’une variété à haut rendement, qui se comporte correctement dans toutes les régions du pays. Elle présente un bon profil face aux maladies et est résistante à la cécidomyie orange du blé. Enfin, elle est très résistante à la verse », explique Roel Van Avermaet, Technical manager.

Les essais officiels conduits par le CPL-Végémar, le Carah, le Cra-w et le LCG montrent encore que Gleam affiche des rendements supérieurs à la moyenne des témoins.

« Avoir une bonne génétique ne suffit pas. Il convient également de penser au traitement de semence. Ainsi, Vibrance Duo (25 g/l sedaxane + 25 g/l fludioxonil), qui a été utilisé dans le cadre du projet, protège les semences contre les germes et champignons du sol et permet une germination plus rapide, un développement racinaire accru et sain ainsi que de meilleurs rendements », ajoute-t-il.

Modifier la densité de semis

En Brabant wallon comme en Flandre orientale, les différents partenaires ont mené leurs essais pendant que l’agriculteur local se concentrait sur sa culture. Des comparaisons peuvent donc être effectuées entre les deux parcelles mais aussi, au sein d’une même parcelle, entre les techniques de travail du sol et de semis utilisées.

« Pour le projet « 20 tonnes », le travail du sol a été réalisé en deux temps à Ittre. Nous avons effectué un premier passage avec le décompacteur Karat 9, équipé de dents fines (8 cm) suivies d’un rouleau trapèze pour le rappui », explique François Dumonceau, responsable commercial Lemken pour la Wallonie. « La préparation du lit de semence était tout à fait correcte malgré les conditions pluvieuses des jours précédents. » Le semis a eu lieu le lendemain : le tracteur était équipé d’un rouleau VarioPack à l’avant, et d’un semoir Saphir 8 à distribution électrique combiné à une herse rotative Zirkon 12 à l’arrière.

Du côté d’Ooike, le travail du sol a débuté par un labour, avec une charrue Isobus Juwel 8i, entièrement réglable depuis la cabine. « Dans la foulée, la même combinaison qu’à Ittre a été utilisée pour le semis », poursuit Stijn Vercauteren, son homologue pour la Flandre.

Une profondeur de semis de 2 cm a été choisie pour les deux parcelles. Différentes densités ont été testées, en vue d’observer les levées (voir tableau). Ainsi, les essais ont montré qu’il n’est pas nécessaire d’opter pour une densité supérieure à 300 graines/m² pour obtenir une levée correcte et, plus tard, de bons rendements (lire ci-dessous).

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Fertilisation printanière : deux fractions, avec enrobage

À Ittre, la fertilisation a été réalisée à l’aide d’un distributeur Lemken Polaris 14/3200, un outil Isobus disposant de la coupure de section et de la modulation de dose. À Ooike, le distributeur de l’agriculteur partenaire a été utilisé ; de marque Kverneland, il était également compatible pour la modulation de dose.

Pour l’engrais en tant que tel, Frank Duijzer, de la société ICL, suggère d’intervenir une première fois à l’automne avec un engrais riche en sulfate, le polysulphate, à raison de 100 kg/ha. Cet engrais est riche en sulfate de potassium, sulfate de magnésium et sulfate de calcium.

Au printemps, les partenaires ont appliqué un autre engrais, l’Agromaster 30-0-0-16SO3, en deux fractions plutôt que trois habituellement (pour un total de 250 unités à Ittre et 175 unités à Ooike). Il s’agit d’un produit à diffusion lente (ou libération contrôlée) se présentant sous la forme de granulés enrobés qui libèrent progressivement les éléments nutritifs qui les composent. « Cela permet de réduire le lessivage, la dénitrification et la volatilisation de l’engrais tout en répondant aux besoins de la culture », insiste M. Duijzer.

Mais épandre de l’engrais, aussi qualitatif soit-il, ne suffit pas. La précision de l’application est également importante. C’est ici que CNH et ses capteurs SoilXplorer et CropXplorer Basic, issus de la gamme AgXtend, entrent dans le jeu (à ce sujet, lire aussi notre édition du 10 septembre 2020). « Le premier collecte de très nombreuses données sur le sol de manière directe et instantanée. On dispose ainsi d’informations relatives à la conductivité, au bilan hydrique, à la structure du sol… », détaille Pieter-Jan Auman, spécialiste agriculture de précision chez CNH Industrial.

Le second permet, quant à lui, de cartographier la biomasse ainsi que l’absorption d’azote. « Les cartes générées sur base des relevés du CropXplorer Basic permettent de moduler les doses de fertilisants épandues en fonction des besoins réels de la culture. »

Les premiers enseignements, avant un prochain essai

Pour la récolte, une moissonneuse-batteuse dotée d’un capteur de rendement a été utilisée. Le dit capteur, couplé à la localisation GPS, permet d’établir une carte de rendements. « Ainsi, nous pouvons vérifier les préconisations faites en amont, notamment au niveau de la fertilisation, et valider leur bien-fondé. » Les nombreuses cartes générées pendant la saison culturale passent également entre les mains du centre de recherche Inagro, installé en Flandre. Elles y sont analysées en vue d’affiner les pratiques phytotechniques pour les années à venir.

« Car nous ne comptons pas nous arrêter après une saison. L’ambition d’atteindre un rendement de 20 t/ha repose sur l’expertise acquise au fil du temps. Il n’est donc pas possible d’élaborer des solutions concrètes après seulement un an d’essais ; cela nécessite plusieurs années », détaille Edward Vander Linden.

Quelques enseignements peuvent néanmoins déjà être tirés du projet, notamment sur base des rendements obtenus (voir tableau). À Ittre, on observe qu’une densité de semis supérieure (375 graines/m²) donne davantage d’épis qu’une densité de semis de 300 graines/m². Toutefois, c’est bien ce dernier essai qui révèle le rendement le plus élevé. « Il existe un plafond à ne pas dépasser. Aller au-delà de ce seuil pénalise le rendement », observe-t-il.

À Ooike, l’agriculteur opte pour une densité de semis très basse : 157 graines/m² seulement. « Le nombre d’épi est inférieur mais le rendement final se rapproche malgré tout de la densité choisie pour le projet « 20 t » mis en place sur sa parcelle. On peut donc être tenté de travailler de cette manière, notamment pour réduire le coût d’achat des semences. Mais rappelons qu’une densité plus élevée permet d’accroître le nombre de plants à l’hectare et, in fine, de réduire la pression des adventices sur la culture. »

Par ailleurs, l’essai a permis d’observer une bonne corrélation entre les mesures effectuées et les cartes générées d’un côté, et les rendements de l’autre. « L’agriculture de précision est, à ce titre, un grand allié. Travailler avec la modulation de doses, en matière de semis ou de fertilisation, permet de remédier aux problèmes rencontrés ponctuellement sur la parcelle. »

De nouveaux objectifs pour 2021

Pour la saison à venir, les partenaires du projet se sont déjà fixés de nouveaux objectifs. Ils souhaitent ainsi combiner divers aspects de l’itinéraire phytotechnique (mécanisation, agronomie et recherche) en vue d’identifier la meilleure façon d’utiliser l’agriculture de précision en froment d’hiver. Un travail sera également effectué pour optimiser l’usage des intrants (semences, engrais et produits phytosanitaires), sans négliger la gestion des sols et tout en se basant, une fois encore, sur l’agriculture de précision. Le but : obtenir un rendement le plus élevé possible, de manière durable et rentable.

« Nous avons, bien sûr, encore beaucoup à apprendre. L’agriculture de précision et la modulation de dose, sur base de cartes de préconisation, constituent les bases du prochain essai. La future récolte devrait, à nouveau, être riche d’enseignements », conclut Edward Vander Linden.

J. Vandegoor

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