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Accord UE-Mercosur: plusieurs États membres se disent encore sceptiques

Très décrié en raison de son impact sur la déforestation notamment, l’accord UE-Mercosur a encore essuyé les critiques de certains ministres de l’Agriculture de l’UE qui se sont plaints, le 16 novembre, de la célérité de la Commission à soumettre au Conseil une proposition relative à l’accord d’ici la fin de l’année alors que de nombreuses questions restent encore en suspens.

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Alors que l’accord UE-Mercosur fait l’objet de nombreuses critiques (impact sur la déforestation, distorsions de concurrence…), l’Autriche suivie par la Bulgarie, la Roumanie, le Luxembourg et la Slovaquie se sont plaints dans une déclaration commune, lors du Conseil des ministres de l’UE de l’Agriculture du 16 novembre, que la Commission veuille soumettre au Conseil une proposition relative à cet accord d’ici la fin de l’année. « Malgré le fait que certaines questions très sensibles, notamment les impacts sur l’agriculture européenne mais aussi sur l’environnement et le climat restent ouvertes », estiment les délégations.

D’autres pays, comme la France, l’Irlande, la Belgique, la Bulgarie, l’Allemagne et la Hongrie ont soutenu la déclaration commune, tandis que le Danemark et la Suède ont soutenu l’accord commercial pour autant que les pratiques durables soient respectées. Quant à l’Espagne et au Portugal, elles ont souligné les avantages de l’accès à un marché largement inexploité d’environ 268 millions de personnes. De leur côté, les Pays-Bas souhaitent une analyse d’impact détaillée.

Produits sous pression

Dans leur déclaration, les délégations soulignent avant tout le risque d’une « détérioration de la balance commerciale de l’UE ainsi qu’une baisse des prix du marché pour les produits déjà sous pression tels que le bœuf, l’éthanol, le sucre, le miel et la volaille ». Alors que l’UE est aujourd’hui confrontée à une série de défis – dont la pandémie de Covid-19, la peste porcine africaine, les distorsions potentielles du marché liées au Brexit – l’accord avec le Mercosur « constitue une menace supplémentaire pour les agriculteurs européens », assurent-elles.

De fait, les cinq délégations appellent l’exécutif européen « à tenir compte de tous ces facteurs et à engager un dialogue approfondi avec les acteurs du monde agricole tout en restant ouvertes à la possibilité de reconsidérer l’accord avec le Mercosur ». Par ailleurs, elles réclament « une surveillance continue des échanges agricoles avec les pays du Mercosur, ainsi que des prix dans les secteurs sensibles, tout en demandant plus de clarté sur la clause de sauvegarde bilatérale ».

Respect des normes européennes

Les cinq délégations souhaitent également la mise en place de « contrôles vétérinaires, phytosanitaires et de sécurité alimentaire plus stricts afin d’assurer la conformité avec les normes élevées de l’UE » et qu’une plus grande attention soit portée sur « la déforestation et les changements illégaux d’utilisation des terres ». Sur ce point, la Commission européenne a précisé que l’UE « s’engage activement avec les autorités du Mercosur concernant la protection de la forêt amazonienne et la fin de la déforestation illégale », tout en indiquant que « les engagements des pays du Mercosur dans le cadre de l’accord de Paris ont été intégrés dans l’accord ».

Les délégations appellent aussi Bruxelles à plus de précision concernant le paquet de soutien à l’agriculture d’un milliard d’euros proposé pour faire face aux perturbations du marché, notamment sur « le financement, la répartition entre les États membres, les secteurs agricoles éligibles ou les mesures ». Enfin, elles insistent pour que le principe d’unanimité qui prévaut au Conseil ne soit pas remis en cause étant donné les implications potentielles de l’accord avec le Mercosur.

Face à ces craintes, le commissaire à l’Agriculture, Janusz Wojciechowski, a réitéré l’engagement de l’UE à soutenir tous les agriculteurs, « dans les limites des disponibilités budgétaires ». Avant de préciser que « l’accord avec le bloc des pays du Mercosur n’offre pas uniquement des contingents tarifaires pour les produits les plus sensibles mais aussi des opportunités intéressantes pour les produits agricoles de l’UE ». Il a également indiqué que la Commission publiera bientôt une étude révisée sur l’effet cumulé de tous les accords commerciaux. Cela permettra notamment d’évaluer au cas par cas ce qui constitue une perturbation grave du marché.

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