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«L’important? Viser la haute production en sélectionnant les bons pedigrees»

Fils d’éleveurs bovins, Jonas Van Zele, d’Assenede, s’est toujours intéressé aux chèvres. Ce qui a commencé aux temps de l’enfance par un élevage de quelques caprins de race naine, s’est transformé en une exploitation de laitières. « J’aime ces animaux, d’autant que leur rendement au litre de lait est bien supérieur à celui des vaches. Je tenais à en profiter ».

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La future chèvrerie est aujourd’hui en construction. En plus de son travail à plein-temps comme professeur dans un institut agronomique, Jonas est occupé à rénover une vieille étable dans la ferme parentale. « Cette stabulation était vide depuis plusieurs années. Afin de pouvoir me lancer, je la loue désormais. De cette façon, je vais progressivement rembourser mes parents. »

Mais cet amour des chèvres n’est pas né d’hier. Quand Jonas avait 8 ans, il voulait une chèvre naine. Il ne fallut pas longtemps avant qu’il ne dispose d’une dizaine d’individus. Il s’est ensuite intéressé à la chèvre laitière. « C’est un secteur encore assez méconnu en Flandre, et cela me plaît. Pendant mes études, j’ai également fait une thèse sur leur bien-être. Cela m’a beaucoup appris ! Le fait que le litre de lait de chèvre est payé aujourd’hui près du double du lait de vache, a été le facteur décisif. Je reçois 0,69 €/l. Le lait de vache, tourne davantage entre 0,30 et 0,32 €/l. »

Jonas fait la plupart des rénovations de la chèvrerie lui-même, avec l’aide de ses parents et de ses amis. « En janvier, elle doit être prête pour accueillir les 300 premières chevrettes. Elles ne commenceront à produire qu’au bout d’un an. C’est donc une bonne chose d’avoir gardé mon travail d’enseignant ! Je vais profiter de cette première année pour apprendre à élever les jeunes, et pouvoir être prêt l’an prochain à le combiner avec la traite. »

Le bien-être au centre

Au cours de sa thèse, Jonas a beaucoup appris sur la conception et l’entretien des bâtiments. « Les chèvres adultes ont besoin d’au moins 1,5 m² de surface/individu. Si l’espace est insuffisant, cela peut induire des comportements plus agressifs. Si vous accordez une attention particulière au bien-être, vous pourrez peut-être les prévenir. »

Il y a de petites choses auxquelles penser pour rendre la stabulation plus agréable. L’installation de brosses leur permet de soulager d’éventuelles démangeaisons, ce qui les calme. le paillage quotidien permet également de les garder propres et d’éviter des infections.

Jonas attend ses premières chevrettes au cours de ce mois de janvier. L’occasion pour lui  de se familiariser avec la race avant de se lancer dans la traite l’année prochaine.
Jonas attend ses premières chevrettes au cours de ce mois de janvier. L’occasion pour lui de se familiariser avec la race avant de se lancer dans la traite l’année prochaine. - SN

Il faut également veiller à ne jamais manquer de nourriture. « Je compte diviser mes chèvres en lot, selon leur niveau de production. Ainsi, elles reçoivent la bonne quantité de concentrés en plus de l’ensilage à volonté. Pour s’assurer que les animaux reçoivent une alimentation équilibrée et plus difficile à trier, Jonas compte presser l’aliment.

Ensuite, il est important tailler les onglons à temps, ou de trouver des moyens de les user naturellement. Il est également préférable d’enlever les cornes. De cette façon, elles ne peuvent pas se blesser mutuellement dans les combats de rang. « Heureusement, la chèvre Saanen ou blanche de Gessenay, la race que j’ai choisie, est très pacifique. »

« À mon avis, l’économie et le bien-être des animaux vont de pair. Si l’éleveur émet une énergie positive, cela a un effet sur les chèvres et sur leur productivité. »

À la recherche de soutiens et de génétique

Ce n’est qu’il y a trois ans que Jonas a commencé à établir un plan financier avec l’aide de la DLV, un bureau de conseil en Flandre. Un an plus tard, il commence à chercher une banque.

« Pour obtenir leur feu vert, j’ai d’abord dû trouver un client. En Belgique, cela n’a pas été facile. C’est des Pays-Bas qu’est venue la solution. Des acheteurs néerlandais se sont rendus en Belgique pour établir un contrat. C’était ma chance et mon soutien à la banque. »

Autre difficulté : « Il m’a été très difficile de trouver un grand nombre d’agneaux qui répondent à mes exigences sanitaires. Il n’y a que quelques élevages de chèvres laitières en Belgique qui le permettent ». C’est vers l’une d’elles qu’il s’est tournée pour les avoir rapidement.

« Ensuite, j’ai également dû chercher des terres. Peu de gens vendent encore leurs terres agricoles, de sorte qu’ils peuvent continuer à recevoir les primes. J’ai toutefois trouvé quelqu’un qui acceptait de me les louer pour autant qu’il garde les primes. »

Une approche différente de celle de ses parents

Jonas et ses parents ont décidé d’installer leurs bâtiments d’élevage à deux adresses. Ainsi, chacun a sa propre comptabilité et cela évite les conflits d’argent. « Mon père et moi avons des manières très différentes de travailler. Nous pouvons chacun mener notre propre entreprise. Mais nous nous aidons en cas de besoin. Si le prix du lait de vaches reste aussi bas, il y a une chance de voir les bovins quitté l’exploitation parentale au profit d’un grand élevage de chèvres.

De chèvres doublement exemptes de maladies

Jonas veut se concentrer sur le pedigree et la haute production dans sa chèvrerie. En outre, il veut également appliquer les normes les plus élevées en matière de maladies. Par exemple, il travaillera avec un sas d’hygiène, des vêtements propres à l’exploitation et des chèvres ayant un pédigree doublement indemne de maladie.

« Les chèvres proviennent toutes de la même ferme, ce qui me permet de retracer parfaitement leur ascendance. Je préfère garder ma ferme fermée afin de minimiser le risque de maladie. La double absence de maladie signifie que les animaux ne sont pas atteints des maladies caprines que sont l’arthrite encéphalite caprine (CAE) et la lymphadénite caséeuse (CL). Ils sont contrôlés tous les deux ans.

La blanche de gessenay comme premier choix

« J’ai choisi des blanches de gessenay, car ce sont d’excellentes laitières. Elles produisent en moyenne 900 litres de lait par lactation, mais les plus productives dépassent 1.000 litres. C’est la race laitière la plus répandue au monde. Le berceau de la race : Gessenay une commune du canton de Berne, en Suisse. Ces grandes blanches sont généralement dépourvues de cornes.

Elles sont en outre peu agressives, que ce soit avec l’humain ou entre elles. Elles n’ont pas l’instinct de troupeau. Cela apporte un certain calme dans la chèvrerie. »

Pour la traite, Jonas a opté pour une swing over 2x20 avec une mesure de la quantité du lait. Celui-ci sera installé en août 2021. Avec ce système, chaque unité de traite est utilisée pour deux côtés de salle de traite, et ce par le biais d’un bras rotatif.

« Les avantages d’un tel système ? Son prix et le gain de temps qu’il procure. Il suffit d’une unité de traite pour deux chèvres. On peut donc en traire davantage en moins de temps. De cette façon, je rentabilise l’installation plus rapidement et, dans quelques années, je pourrai peut-être passer à un carrousel »

Un soutien indéfectible

Si toute sa famille le soutient dans sa reprise de l’exploitation, ses parents ont d’abord voulu qu’il continue à enseigner. « Mais je n’arrivais pas à m’ôter l’idée de devenir éleveur. Lorsque j’ai pu leur présenter un plan financier clair et ma vision de l’avenir, ils ont changé d’avis. Ils appréhendent d’ailleurs désormais mieux l’avenir avec des chèvres qu’avec des bovins.

« Je vis toujours chez mes parents, et l’environnement y est idéal. Il y a de fortes chances que je vive dans la maison de mes grands-parents à côté. »

Les défis à venir

Maintenant que Jonas est prêt à faire le grand saut, il aime donner quelques conseils aux jeunes débutants : « C’est en visitant d’autres exploitations que j’ai le plus appris, par le partage d’expériences… J’ai également passé beaucoup de temps à comparer ce que proposent les banques, les fournisseurs et les clients. C’est important, car les prix et les conditions sont différents partout ! Un jeune qui veut se lancer doit s’assurer que sa motivation et sa passion soient boostées à bloc. On ne s’en sort pas si on ne fait les choses qu’à moitié. »

Avec le temps, Jonas veut arrêter d’enseigner et se concentrer entièrement sur l’élevage. Lorsque son père prendra sa retraite, toutes les vaches laitières partiront et Jonas reprendra les bâtiments agricoles. Il préfère élever 1.000 à 1.500 chèvres.

« J’ai choisi de rénover ma première chèvrerie uniquement de l’intérieur, mais je pense à transformer l’extérieur en serre. Il ne reste plus qu’à remplacer le toit et les murs extérieurs. Ce serait beaucoup mieux pour les chèvres. De cette façon, les gains de ventilation et de luminosité permettront une meilleure atmosphère au sein du bâtiment. En outre, cela me laisse la possibilité de passer en élevage biologique si nécessaire. »

« D’ici quelques années, je voudrais également initier les enfants et les jeunes au secteur caprin. C’est pourquoi il est prévu d’organiser des camps à la ferme et d’accueillir des jeunes stagiaires ayant choisi une orientation agricole. »

Il va sans dire qu’avec l’expansion qu’il prévoit, sa production va augmenter et ses ventes aussi. « À partir de là, je peux me concentrer sur le circuit court. Si je trais moins de 500 chèvres, je peux difficilement répartir la production entre mon client et ce que je destine à la transformation. À partir de 900 chèvres, mon rêve est de pouvoir proposer du fromage et de la glace. Ensuite, je voudrais un distributeur automatique avec différents produits caprins. La cerise sur le gâteau serait d’avoir mon propre camion à glace. »

D’après Sanne Nuyts

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