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Gestation gémellaire chez la jument: un rêve ou un cauchemar?

Si la gestation gémellaire, ou gestation double, reste un événement rare, elle n’est pas évidente pour la jument. Les interventions vétérinaires sont nécessaires puisque la future mère n’est généralement pas en état de mener sa gestation à bien.

Temps de lecture : 5 min

La gestation double est une cause importante non-infectieuse d’avortement chez la jument et provoque souvent des problèmes lors de la naissance tels que : poulains faibles et sous-développés, rétention du placenta, fertilité diminuée… Pour résumer, une gestation gémellaire est souvent synonyme de pertes économiques et de bousculades émotionnelles.

Comment se produit une gestation double ?

Chez l’équidé, il s’agit dans la majorité des cas de jumeaux non-identiques, issus de la croissance de deux follicules dominants qui provoquent deux ovulations, ce qui peut résulter en deux embryons.

Les jumeaux identiques, issus d’une seule ovulation ou d’un embryon qui se transforme en deux embryons, sont très rares chez le cheval. Bien que l’on remarque ces dernières années une augmentation desdits jumeaux suite au recours aux techniques de reproduction assistées, comme le transfert d’embryons, l’injection intracytoplasmique de sperme… Le vétérinaire et le propriétaire de la jument doivent être conscients que des jumeaux identiques, et donc issus d’une seule ovulation, peuvent parfois se déclarer après le transfert d’un seul embryon.

Difficultés dans l’utérus

Vu que le placenta du cheval est composé de plusieurs couches afin de protéger le poulain – ce qui n’est pas le cas chez l’être humain – l’échange des nutriments et de l’oxygène se déroule plus difficilement. La superficie totale de l’utérus sera donc nécessaire pour nourrir le poulain de façon adéquate. En fait, l’utérus de la jument ne prévoit pas la gestation de jumeaux, vu le manque de place pour la croissance et le développement de deux placentas fonctionnels.

Si la jument est gestante de jumeaux, il y aura toujours une zone du placenta de chaque poulain qui manquera de contact avec l’utérus, entraînant de facto un sous-développement de l’embryon. Cette zone se situe à l’endroit où les deux poulains sont en contact. Par conséquent, la jument ne pourra pas transmettre aux deux poulains les nutriments dont ils ont besoin pour leur développement.

La fixation et la localisation des poulains jouent donc un rôle primordial dans la capacité d’établir ou non un contact avec la paroi utérine. Cette capacité de contact influencera le déroulement de la gestation. Il se peut donc que, par exemple, le « plus petit » des embryons se résorbe spontanément. Lorsque ceci se produit tout au début de la gestation, la possibilité existe que le deuxième poulain n’en subisse aucune conséquence. Si les deux poulains disposent chacun d’environ la même superficie de contact avec l’utérus, ils resteront en vie plus longtemps, jusqu’à ce que les déficits accumulés conduisent à un avortement.

Avec quelles conséquences ?

De cette façon et sans intervention vétérinaire, une gestation de jumeaux conduit le plus souvent à l’avortement des deux poulains, généralement entre le 5e et le 9e mois de la gestation. Si la jument mène sa gestation à terme, celle-ci donnera lieu à la naissance de deux poulains très affaiblis ou d’un petit solide et l’autre très faible. Ces jeunes sont très souvent plus sensibles aux infections et se développent plus lentement après leur naissance.

Si un ou les deux poulains survivent après la naissance, des soins intensifs coûteux s’imposeront. Le tout implique également des conséquences négatives pour la jument, tels que des blessures au vagin et à l’utérus et une rétention du placenta probable. La disjonction de la fertilité reste donc également à considérer.

Prévention et traitement de la gestation double

Afin d’éviter une gestation double et les risques qu’encourt la jument, un suivi vétérinaire strict est essentiel. Comme mentionné précédemment, la présence de deux follicules dominants sur les ovaires peut provoquer deux ovulations et le développement de jumeaux. Si on remarque ceci autour de l’insémination, un contrôle de gestation s’impose entre le 13e et le 15e jour (jour 0 = ovulation), afin de procéder à l’écrasement (squeezing) de la plus petite vésicule par voie rectale sous contrôle échographique. Le but de cette réduction est toujours de viser la gestation et la naissance d’un seul poulain en bonne santé.

Cette technique de réduction précoce constitue le traitement optimal. Il se peut néanmoins qu’une gestation double se déclare ou soit constatée à un stade plus avancé. Par exemple, par la présence de kystes dans l’utérus ou de conditions défavorables lors de l’examen rectal, comme le comportement néfaste de la jument ou une mauvaise image sur l’échographe. Dans ce cas, c’est avec le vétérinaire qu’il faudra définir un autre traitement afin d’éliminer une vésicule. D’autres techniques existent, mais leur taux de réussite est inférieur à celui de l’intervention précoce. Inutile d’ajouter que des contrôles de gestation réguliers sont également très importants après un transfert d’embryons.

Symptômes cliniques d’un avortement

S’il n’y a pas de diagnostic d’une gestation gémellaire, la jument donnera des signaux de naissance précoces et d’un avortement possible entre le 5e et le 9e  mois de la gestation. Une forte augmentation du volume abdominal de la jument fera aussi penser à des jumeaux. Un contrôle échographique s’impose d’urgence, afin de s’assurer de la gestation double et d’exclure d’autres problèmes éventuels. Le vétérinaire établira un traitement préliminaire pour la jument.

Des contrôles réguliers

« Mieux vaut prévenir que guérir ! », dit l’adage. Un suivi très strict du cycle de la jument, avec une attention particulière pour la présence éventuelle d’ovulations multiples, peut être réalisé pour éviter une gestation de jumeaux. Un diagnostic de gestation avant le jour 16 offre les meilleures chances pour la réussite d’une réduction précoce. Des contrôles réguliers dans un stade ultérieur éviteront également une gestation double non-détectée au stade précoce.

P. Borgenon

D’après Sofie Peere, UGent

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