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Arnaque au glyphosate

Seriez-vous en train de me lire si je n’avais pas utilisé ce mot, cette matière active dans mon titre ? Le pouvoir accrocheur de cette molécule ou encore des mots tels qu’« alternative » ou « bio-pesticide » semble être bien connu d’une certaine start-up gembloutoise qui l’utilise à foison pour attirer l’œil et les budgets.

Temps de lecture : 3 min

« Découverte majeure pour l’environnement : trois solutions à base d’huiles essentielle viennent d’être développées par des chercheurs gembloutois pour remplacer le glyphosate ». Lobbies ou réalité de terrain ?

Quel soulagement pour le commun des mortels d’enfin entrevoir une solution sans risques majeurs pour remplacer la molécule tant décriée tout en gardant l’efficacité qu’on lui connaît ! La réalité est-elle aussi belle d’un point de vue agronomique voire sanitaire ?

L’effet systémique recherché par le secteur lors des utilisations limitées du glyphosate est-il réellement présent ? Malgré l’effet d’annonce, l’efficacité agronomique ne semble pas plus importante que celles d’autres solutions déjà disponibles. À l’image des acides gras organiques tels que l’acide pélargonique, l’effet observé serait celui d’un défanant de contact. L’intérêt pour les professionnels du secteur envers une solution systémique tombe alors à néant pour la gestion d’espèces particulières tels que le chiendent. Cette question de systémie semble sans réponse lors des communications des chercheurs. Cette particularité est peut-être le fruit d’une méconnaissance de nos pratiques et nos attentes par le monde scientifique. Ce dernier semblant souffrir d’une déconnexion avec le secteur qui, à l’image de l’évolution de la population agricole, est de moins en moins fourni en agronome de terrain ! Et cela n’est pas près de s’améliorer. Le secteur étant de moins en moins présent dans nos sociétés, les candidats issus du milieu se raréfient dans la course au titre d’ingénieur agronome. Titre qui a d’ailleurs évolué en bio-ingénieur, sans doute pour une fois de plus attirer plus efficacement les prétendants et se détacher de l’image rurale du premier.

D’un point de vue sanitaire, restons également prudents avec l’utilisation des huiles essentielles ayant le vent en poupe. Pour l’ensemble des emplois proposés à ce jour dans nos vies privées et professionnelles, une exposition inadaptée ou importante peut en effet être toxique en fonction de leur composition. Il suffit de consulter le site du Centre Antipoison pour se rendre compte des risques encourus. Toutefois, même si l’effet nocif des terpènes (constituant les huiles essentielles) est reconnu, aucune preuve d’effet cancérogène, mutagène ou reprotoxique n’a été rapportée. Cela nous rappelle une autre affaire…

Au vu de ces particularités, l’image révolutionnaire relayée pour cette découverte est-elle adaptée et se justifie-t-il de médiatiser cette « découverte » sans critique et cela jusque dans nos pays voisins ? Mais surtout, un financement de 6 millions d’euros pour homologuer un nouveau défanant ne serait-il pas plus utile à d’autres causes ?

Si par hasard, Messieurs les scientifiques, vous seriez amenés à consulter la presse agricole et intéressés à répondre à ces aspects, pourriez-vous développer dans vos réactions l’effet de vos solutions sur les adventices présentant des organes de réserves souterrains tel que des rhizomes ? En effet il s’agit d’une de nos préoccupations majeures face au retrait du glyphosate.

Un rustre hennuyer

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