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Pac: la présidence portugaise vise un accord pour fin juin

Malgré l’échec des négociations fin mai, la présidence portugaise a repris son travail en vue de finaliser un accord politique sur la future pac fin juin. Les points de divergence sont connus (verdissement, redistribution…). Un calendrier a déjà été plus ou moins fixé : des discussions avec les experts des États membres dans un premier temps puis un trilogue sur les plans stratégiques le 16 juin, un dernier super trilogue autour du 24 juin et une validation définitive par les ministres de l’Agriculture des Vingt-sept le 28 juin.

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Les experts agricoles des États membres ont repris dès le 31 mai leurs travaux sur les plans stratégiques de la future politique agricole commune (pac) après l’échec des discussions menées la semaine précédente.

La présidence portugaise du Conseil, qui doit encore préciser son calendrier de travail pour le mois de juin, a présenté un document résumant les positions du Conseil et du Parlement européen sur les points en suspens dans le règlement sur les plans stratégiques. Et ceux-ci sont nombreux : la conditionnalité environnementale, la conditionnalité sociale (quelle date d’entrée en application), la redistribution des soutiens, l’alignement de la future législation avec les objectifs du Green deal, les soutiens couplés et – la question la plus centrale – la part des fonds du premier pilier à consacrer aux éco-régimes en particulier durant les deux premières années de mise en œuvre.

Malgré ces interrogations, la présidence souhaite toujours finaliser définitivement un accord politique lors du conseil Agriculture des 28 et 29 juin prochain.

Un compromis sur les éco-régimes

Le document présenté confirme que sur la question des éco-régimes, les négociateurs semblent pourtant proches d’un compromis. Ils pourraient tomber d’accord sur une enveloppe de 25 % des fonds du premier pilier à leur réserver dès 2023. Mais un terrain d’entente doit encore être trouvé sur les flexibilités qui pourraient être accordées durant les deux premières années de mise en œuvre.

Le Conseil a prévu, pour cette période, un niveau plancher de 18 % (le reste pouvant être redistribué dans d’autres paiements directs) tandis que le Parlement demande au minimum un niveau plancher de 22 % en 2023 et de 23 % en 2024 et que les fonds non dépensés soient compensés les années suivantes.

Concernant l’enveloppe du deuxième pilier à réserver à des mesures environnementales, un compromis est, là encore, à portée de main autour d’un chiffre de 35 (pour le Conseil) à 37 % (pour le Parlement).

Rotation des cultures et surfaces non productives

Un accord doit aussi être trouvé sur la conditionnalité, en particulier sur la question des bonnes pratiques agricoles et environnementales 7 (couverture des sols), 8 (rotation des cultures) et 9 (surfaces non productives). Sur cette dernière, la présidence portugaise voudrait prévoir deux chiffres : 4 % de surfaces non productives, ou 3 %, si l’agriculteur s’engage pour une part plus importante dans le cadre des éco-régimes. Le Parlement plaide pour 5 et 6 % et refuse que les cultures intermédiaires soient prises en compte.

Autres dossiers en souffrance : les produits éligibles à l’intervention (le Parlement voudrait que le sucre soit ajouté à la liste alors qu’une majorité qualifiée au Conseil est fermement contre), la réserve de crise agricole (notamment son mode de financement durant la première année d’application), la conditionnalité sociale, la question des clauses miroir pour les limites maximales de résidus, les paiements aux jeunes agriculteurs, la convergence des aides (85 % pour le Conseil, 100 % pour le Parlement) et le dispositif de redistribution des paiements vers les plus petites exploitations.

Sur ces deux derniers points, le commissaire européen à l’Agriculture, Janusz Wojciechowski, a évoqué « de la résistance » au Conseil. Selon lui le dispositif sur la table permettra aux petites exploitations, jusqu’à 10 ha, de gagner 7 % de paiements directs, quand les grandes exploitations, plus de 1.000 ha, devraient perdre 5 %.

Résidus de pesticides et importation : vers des interdictions ?

Dans le cadre du règlement OCM unique, une des priorités du négociateur en chef du Parlement européen, Éric Andrieu, serait d’interdire, au plus tard en 2025, les importations de produits d’origine végétale et animale, si elles ne respectent pas les obligations liées aux limites maximales de résidus de pesticides en vigueur dans l’Union. « Nous sommes sur un point de blocage (avec le Conseil et la Commission) et je ne comprends pas pourquoi », a-t-il souligné lors d’une conférence de presse le 1er  juin.

Selon lui l’article 188 bis qu’il propose est « compatible » avec les règles de l’Organisation mondiale du commerce, car « on traite là de la valeur intrinsèque des produits ». Il espère également convaincre le Conseil de permettre aux interprofessions de donner des indications sur la valeur ajoutée entre les producteurs, les transformateurs et le commerce. « Il semblerait que le Conseil soit prêt à lâcher sur ce point », indique-t-il.

Des critiques sur la méthode

Sur base de ce constat, la présidence portugaise va continuer à travailler avec les États membres dans le cadre du comité spécial agriculture (les 7 et 14 juin). Une discussion entre ministres pourra aussi se tenir lors de leur réunion informelle prévue le 15 juin à Lisbonne. Un dernier trilogue sur les plans stratégiques est envisagé le 16 juin en vue d’un nouveau « super trilogue » de deux jours autour du 24 juin. Des contacts vont donc être repris avec les négociateurs parlementaires.

Le ministre grec de l’Agriculture, notamment, a dénoncé à l’issue du dernier Conseil « la façon inacceptable dont le Parlement européen a mené cette négociation » la qualifiant de « chantage ». Mais le commissaire européen, Janusz Wojciechowski, aussi a été ciblé par les États membres – ainsi que par le Copa-Cogeca – pour avoir pris le parti du Parlement au lieu de faciliter les débats.

Pour le think tank Farm Europe, la Commission n’a pas joué son rôle de facilitateur en s’engageant de façon partisane et déséquilibrée dans le débat, cassant la confiance nécessaire pour remplir pleinement sa mission. Résultat : le Parlement et le Conseil ont dû se doter d’une capacité propre à rédiger des compromis dans leurs aspects juridiques les plus complexes pour avancer. L’absence d’accord tient aussi au fait, toujours selon Farm Europe qu’une « bonne partie des paramètres clés de l’architecture verte était tout simplement une page blanche dans la proposition ». Les co-législateurs ont donc dû définir eux-mêmes des orientations et donner de la consistance aux éco-régimes qui étaient au départ une coquille vide.

Ce problème devrait être réglé durant le mois de juin pour conclure un accord politique qui devra ensuite faire l’objet d’un travail technique lors de la présidence slovène au second semestre de l’année.

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