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De nouvelles dispositions régissent le droit d’emphytéose

Comme annoncé dans notre édition du 19 août, la grande réforme du droit des biens est entrée en vigueur ce 1er septembre. Par cette réforme, les baux emphytéotiques et les superficies sont incorporés dans le nouveau Code civil. À travers cet article, nous vous expliquons les nouvelles règles concernant lesdits baux.

Temps de lecture : 4 min

Selon l’article 3.167 du nouveau Code civil, le droit d’emphytéose est un droit réel d’usage conférant un plein usage et une pleine jouissance d’un immeuble par nature ou par incorporation appartenant à autrui.

Cette définition nous montre une grande différence avec le bail à ferme. Si la convention de bail à ferme suppose toujours une relation entre deux parties concernant l’exploitation d’un bien immobilier, le droit d’emphytéose par contre reste toujours attaché à un bien immobilier. Le droit d’emphytéose suit toujours le bien immobilier, qu’importe qui en devient propriétaire, nu-propriétaire ou usufruitier.

Si, dans une relation de bail à ferme, un acquéreur d’un bien loué aura, dans certains cas, la possibilité de donner congé au preneur, l’acquéreur d’un bien sur lequel un bail emphytéotique est en cours n’a aucune possibilité de terminer le droit d’emphytéose.

Le droit d’emphytéose peut avoir pour objet un sol (bâti ou non), un sous-sol ou un ouvrage considéré isolément. Il peut être constitué par le propriétaire de l’immeuble visé ou par le titulaire d’un droit réel d’usage sur celui-ci dans les limites de ce droit. Un usufruitier peut donc donner un droit d’emphytéose sur le bien immobilier qu’il a en usufruit.

La durée ? De 15 à 99 ans

Nonobstant toute clause contraire, la durée du droit d’emphytéose ne peut être inférieure à 15 ans ni supérieure à 99 ans. Le droit d’emphytéose peut être prorogé sans que sa durée totale puisse excéder 99 ans. Il peut être renouvelé sur l’accord exprès des parties.

Dans cette durée minimale du droit d’emphytéose se trouve une des modifications les plus importantes de la réforme. Avant celle-ci, un droit d’emphytéose devait durer au moins 27 ans. Il est clair qu’une durée de 15 ans est, pour un propriétaire, beaucoup plus attractive qu’une durée de 27 ans. Si, dans le passé, le droit d’emphytéose n’était pour la plupart des propriétaires pas intéressant comme alternative au bail à ferme, cela peut désormais changer. Remarquons, pour être complet, que le droit d’emphytéose peut être perpétuel lorsque et tant qu’il est constitué, par le propriétaire de l’immeuble, à des fins de domanialité publique.

Droits et obligations de l’emphytéote

L’emphytéote ne peut rien faire qui diminue la valeur de l’immeuble sous réserve de l’usure normale, de la vétusté ou d’un cas de force majeure ; il peut, sauf clause contraire, modifier la destination de l’immeuble.

L’emphytéote est tenu de toutes les charges et impositions relatives à l’immeuble grevé et aux ouvrages et plantations qu’il a réalisés.

Contrairement au passé, l’emphytéote ne doit plus payer une redevance annuelle. Le législateur a laissé une liberté totale aux parties. Cela veut dire que les propriétaires ont aussi la possibilité de demander un paiement plus élevé que le fermage maximal dû en cas de bail à ferme. C’est cette combinaison de fixation libre du montant de la redevance annuelle avec la durée minimale de 15 ans, qui résulte en une possibilité légale d’éviter le bail à ferme.

L’emphytéote a, pendant la durée du bail emphytéotique, toute la liberté de jouir du bien immobilier. S’il s’agit de terrains agricoles, il a donc une liberté de cultures. Le constituant du droit d’emphytéose ne peut donc pas intervenir dans la manière dont l’emphytéote exploite sa parcelle.

Terminer un bail emphytéotique

Si les parties ne conviennent pas explicitement d’une prolongation d’emphytéose, le bail emphytéotique se termine de plein droit à la fin de la période prévue.

Remarquons que le droit d’emphytéose s’éteint par l’expropriation judiciaire du bien, même si elle se produit avant le délai minimal de 15 ans.

Si le droit d’emphytéose est accordé par un usufruitier, le bail emphytéotique se termine de plein droit à la fin de l’usufruit.

À l’extinction du droit d’emphytéose, la propriété des ouvrages et plantations réalisés en application de la loi passe au constituant du droit d’emphytéose ou à son ayant droit.

Le constituant du droit d’emphytéose doit indemniser, sur la base de l’enrichissement injustifié, l’emphytéote pour les ouvrages et plantations réalisés dans les limites de son droit. Jusqu’à indemnisation, l’emphytéote a un droit de rétention sur les ouvrages et plantations.

Jan Opsommer

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