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Passe d’armes autour du Nutri-score

A, B, C, D, E. Vert, jaune, orange, rouge… Vous êtes désormais toutes et tous habitués à voir ce pictogramme de cinq lettres et cinq couleurs sur les produits alimentaires vendus en grandes surfaces.

Temps de lecture : 3 min

Mis au point sous la houlette du professeur français Serge Hercberg, qui le définit comme « un outil de santé publique », le Nutri-score vient de faire l’objet d’échanges assez vifs dans le cadre d’un débat tout récemment organisé au parlement européen par les sociaux-démocrates.

Pour mémoire, ce dispositif existe de manière facultative depuis l’automne 2007 chez nos voisins français avant de s’étendre à ses six États riverains, dont la Belgique, donc.

Dans le cadre de la stratégie « De la fourche à la fourchette », la commission ambitionne de le généraliser à l’ensemble de l’UE. Une volonté qui fait souffler un nouveau vent de révolte et donne lieu à une véritable guerre de tranchées entre les représentants de producteurs et d’artisans et l’Exécutif européen.

Interrogé à l’occasion de ce débat, M. Hercberg a rappelé que le Nutri-score était « basé sur une cinquantaine de travaux scientifiques qui ont validé la méthode de calcul et son format pour démontrer son efficacité, son intérêt et sa supériorité par rapport à d’autres logos nutritionnels ».

En quelques mots, son principe consiste à noter un produit sur 100 grammes selon sa teneur en nutriments à favoriser (fibres, protéines, fruits…) ou à limiter (acides gras saturés, sucres, sel).

Si elle est plébiscitée par les consommateurs, cette approche n’est pas exempte de critiques, la principale étant qu’il est illogique de comparer des produits difficilement comparables comme un soda avec de l’huile d’olive ou des frites avec du fromage.

Des producteurs sont dès lors montés au créneau pour dénoncer un classement défavorisant certaines AOP/AOC (Appellation d’origine protégée/contrôlée) et IGP (Indications géographiques protégées) face à des produits industriels transformés qui ont recours à des additifs n’entrant, quant à eux, pas en compte dans le calcul du Nutri-score.

« C’est paradoxal. Des produits industriels ultra-transformés avec des conservateurs peuvent avoir A ou B, alors que nos produits de terroir très naturels sont stigmatisés », a déploré Sébastien Vignette, secrétaire général de la Confédération générale de Roquefort, soutenu par nombre d’élus des régions françaises d’Aveyron et d’Occitanie.

Affubler le Roquefort d’un E est « profondément injuste » a encore fulminé M. Vignette qui a lancé une véritable croisade contre le Nutri-Score qu’il juge « simpliste, inadapté et réducteur ».

Au-delà de sa Confédération, il souhaite non seulement s’inscrire comme le défenseur de l’ensemble des AOP fromagères françaises et européennes, mais aussi comme celui des valeurs, celles des terroirs et des produits.

Pour sortir par le haut de cette polémique, d’aucuns suggèrent de réserver le Nutri-score aux produits ultra transformés.

Et donc de laisser les productions AOP, AOC et IGP structurer leur territoire, l’économie et protéger les femmes et les hommes qui le font vivre…

Marie-France Vienne

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