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Maîtriser un ravageur des cultures maraîchères: le renforcement de la régulation biologique, un atout indéniable!

Nous avons souvent l’occasion de mettre en évidence les gestes et actions permettant de maîtriser un ravageur des cultures maraîchères sans recourir nécessairement à des produits phytosanitaires.

Temps de lecture : 6 min

Ces mesures sont de plusieurs natures, elles agissent sur l’environnement de la parcelle, la tentative d’introduction d’un auxiliaire issu d’une autre région que la nôtre ou encore à des lâchers massifs, en serre maraîchère notamment.

Protéger les espèces d’auxiliaires présentes

Durant la période d’activité intense des auxiliaires, leur habitat et leur alimentation sont pourvus par la culture et ses hôtes. Le maraîcher agit pour ne pas perturber l’équilibre qui s’installe entre les populations de ravageurs de cultures et les populations d’auxiliaires. Quand la population de ravageurs s’accroît, celle d’auxiliaires peut avoir la possibilité de s’accroître aussi. À la fin de la saison de culture, la, population d‘auxiliaires doit avoir la possibilité de trouver des refuges pour s’y installer jusqu’à la prochaine saison culturale.

Ces refuges peuvent être des habitats à la fois pour les auxiliaires et pour les ravageurs. Lorsque la nouvelle culture sera installée, l’année suivante, les ravageurs et les auxiliaires pourront s’y installer en équilibre relatif les uns avec les autres.

Idéalement, le refuge hivernal sera donc en connexion en un maillage écologique avec les différentes parcelles de la ferme.

Les espèces d’auxiliaires s’adaptent aux situations.

Par exemple, les coccinelles s’installent dans les haies, les bosquets, les arbustes. Nombreuses sont celles qui seront abritées des oiseaux et de leurs propres prédateurs. Elles peuvent se blottir dans les interstices des écorces d’arbres, par exemple. Les larves et les adultes de coccinelles sont généralement carnivores.

Un autre exemple : les syrphes. Celles qui sont prédatrices chez nous ont des régimes alimentaires différents selon leur stade. Les adultes se nourrissent de nectar et de pollen. Les larves sont carnivores.

Les refuges

Les haies et les bosquets comprenant des espèces végétales variées sont des refuges importants. La présence de fleurs apporte du pollen (protéines) et du nectar (sucres) durant de nombreux mois grâce à la diversité végétale d’espèces adaptées à notre climat et notre faune. Plusieurs étages de végétation sont visités, de la strate herbacée aux arbres plus élevés.

Les bandes fleuries sont surtout utiles pour la faune des auxiliaires si elles sont raccordées à la fois aux haies diversifiées et aux parcelles maraîchères à protéger. Elles apportent aussi des fleurs et donc du nourrissement pour plusieurs espèces dont des syrphes et ce durant plusieurs mois de l’année.

Les bandes enherbées permettent aussi des connexions et sont d’autant plus importantes qu’elles comprennent des, espèces végétales différentes comme par exemple des graminées et des légumineuses.

Les prairies permanentes jouent un rôle également d’autant plus appréciable pour les cultures maraîchères voisines que leur flore est diversifiée et qu’elles sont parcellées (pour ne pas être récoltées sur toute la surface au même moment).

Des oiseaux, des mammifères, des batraciens ont des actions très importantes bien connues de tous. La présence d'une mare dans la parcelle maraîchère a tout son sens.
Des oiseaux, des mammifères, des batraciens ont des actions très importantes bien connues de tous. La présence d'une mare dans la parcelle maraîchère a tout son sens.

Pour limiter les problèmes dus aux taupins, aux hannetons et aux limaces, les carabes et les staphylins sont très performants. Un très grand nombre d’espèces de carabes de chez nous a des larves qui sont prédatrices. Les adultes ont des régimes alimentaires plus variés, selon les espèces. Les larves de carabidés sont bien plus nombreuses dans les parcelles qui ne sont pas labourées profondément et avec un couvert végétal permanent, comme les prairies, les bandes herbées, les bordures de parcelles, les haies et la végétation herbacée à leur pied.

Les staphylins sont souvent cités aussi pour leurs performances et leur efficacité sur les insectes du sol dont les pupes de mouches. Ils sont surtout présents sous les paillis, près des lisières de bois ou de haies, des vieilles réserves de bois.

Des oiseaux, des mammifères, des batraciens ont des actions très importantes bien connues de tous.

Les acariens phytoséiides sont très efficaces contre les populations d’acariens phytophages en serres maraîchères, et aussi sur les thrips et les pucerons. Ils se multiplient rapidement avec plusieurs générations par an généralement bien coordonnées avec la présence de leurs proies sur les cultures estivales. D’autres genres d’acariens prédateurs sont également très importants, surtout lorsque la serre abrite des cultures pérennes comme des framboisiers ou d’autres cultures qui permettent d’hivernage sur place.

Les lâchers d’auxiliaires

Par les lâchers massifs d’auxiliaires dans une culture maraîchère nous souhaitons maîtriser rapidement une population de ravageurs. La vision dépend des circonstances entre un effet à court terme et un redémarrage à plus long terme d’une présence durable d’un auxiliaire. Les lâchers sont fréquents dans les serres maraîchères. Les espèces choisies sont issues de milieux naturels adaptés aux ravageurs.

Les auxiliaires sont très efficaces, ils peuvent se faufiler jusqu’au plus profond de la masse végétale à la recherche de leurs hôtes ou de leur nourriture.

Dans les serres, plusieurs espèces peuvent être conseillées par les spécialistes de la lutte biologique.

Quelques exemples : le micro-hyménoptère Encarsia formosa est une espèce « classique » pour maîtriser les populations d’aleurodes. La punaise miride Macrolopus pigmaeus est active contre les aleurodes et Tuta absoluta en tomates. L’acarien prédateur Amblyseius swirskii est choisi contre les thrips et les aleurodes en concombre.

Les haies et les bosquets comprenant des espèces végétales variées sont des refuges importants.
Les haies et les bosquets comprenant des espèces végétales variées sont des refuges importants.

Des équilibres

En pratique, nous comprenons bien l’importance des équilibres entre les populations de ravageurs et celle des auxiliaires. Encore faut-il pouvoir les favoriser ou du moins ne pas les anéantir.

Le lâcher d’auxiliaires bien choisis est efficace mais est plus facile à gérer en milieu confiné comme dans une serre qu’en plein air. Cette technique a aussi un coût.

Favoriser la présence d’auxiliaires initialement présents naturellement est un objectif général et s’envisage non sur une parcelle mais sur la parcelle et son environnement proche. La vision sur le moyen terme amène à prévoir déjà les migrations des auxiliaires vers les parcelles voisines qui seront occupées par les cultures à protéger les années suivantes. La notion de couloir biologique ou de réseau riche en biodiversité est une évidence. C’est au départ de ces refuges privilégiés que les auxiliaires partiront à la conquête des ravageurs des cultures voisines au début de la saison suivante. C’est du même endroit qu’ils pourront aussi corriger les effectifs soumis à un accident comme par exemple un traitement inapproprié ou une fauche au mauvais moment.

Les zones refuges aux espèces diversifiées abritent une large gamme de bestioles apportant de la nourriture de substitution pendant la période sans culture en place et donc sans ravageur ciblé. Les haies sont pérennes et jouent donc un rôle particulièrement intéressant. Leur valeur de refuge est d’autant plus grande qu’elles sont larges d’au moins 5 mètres, selon les spécialistes de la lutte raisonnée.

Dans les serres, plusieurs espèces peuvent être conseillées par les spécialistes  de la lutte biologique.
Dans les serres, plusieurs espèces peuvent être conseillées par les spécialistes de la lutte biologique.

Les oiseaux passereaux sont favorisés par la présence de nichoirs répartis pour respecter les aires d’installation et de nidification.

Les haies, bandes fleuries et bandes enherbées ont aussi des inconvénients. Il y a un coût pour la plantation et l’entretien. Il se peut que des limaces ou des campagnols s’y installent de manière privilégiée, bien que dans la pratique ce ne soit pas un grand problème chez les maraîchers de chez nous. Ces zones sont installées sur des terrains qui ont été débarrassés des adventices vivaces gênantes comme les chardons, les chiendents et les liserons par des façons culturales préalables

Restons attentifs aux éventuelles possibilités d’aides européennes ou régionales pour l’installation et l’entretien de ces espaces.

F.

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