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Maraîchage: éviter toute surprise grâce à la bonne gestion de son temps de travail

La tenue d’une comptabilité rigoureuse est la base pour permettre une bonne gestion. Ces données doivent inclure le temps de travail. Disposer de la différence entre les recettes et les dépenses ne suffit pas, il faut connaître le temps qui fut investi pour obtenir ce résultat économique. Bien des surprises apparaissent, agréables ou au contraire décevantes.

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Ces constats sont vrais en ferme de polyculture et élevage. Ils sont très pertinents aussi en maraîchage, beaucoup de productions exigeant de forts apports de main-d’œuvre.

Lorsqu’un futur maraîcher réfléchit à son installation ou qu’un agriculteur envisage de se diversifier en production maraîchère, ils focalisent leur attention sur les aspects techniques, commerciaux et environnementaux. Pourtant, les aspects sociaux sont tout aussi importants, en l’occurrence le bon emploi de sa propre main-d’œuvre. Bien sûr, la position géographique du point de vente, la qualité des sols, la disponibilité en eau et en énergie sont importants. La main-d’œuvre est le premier facteur de production.

La performance de la main-d’œuvre

Si le maraîcher lui-même acquiert progressivement l’expertise et l’habilité rendant ses gestes performants, la question reste posée pour le personnel occupé. Les travailleurs permanents sont formés et rapides également. Par contre, trouver de la main-d’œuvre saisonnière efficace est à la fois compliqué et à renouveler chaque année.

La performance de la main-d’œuvre concerne aussi le maraîcher lui-même.

La gestion des équipes

Plusieurs étapes sont requises pour gérer au mieux les équipes. Il faut que le travail soit bien organisé, il faut qu’il soit bien expliqué. Enfin, il faut qu’il soit encadré. Ces étapes sont importantes aussi pour le maraîcher lui-même comme pour les employés.

L’organisation

Les méthodes de travail et les moyens techniques mis en œuvre sont essentiels dans la gestion de la main-d’œuvre. Il faut pouvoir dégager un chiffre d’affaires suffisant pour permettre la vie – la survie- de l’entreprise. Cela paraît évident, pourtant, nous constatons que des déceptions attendent les entreprises après 2 ou 3 années déjà. Entre le rêve de monter sa propre ferme maraîchère et la réalité d’en assurer la durabilité (et donc notamment un revenu économique suffisant) la réussite ne va pas de soi.

Les abris légers permettent de compléter  la période de production à un coût intéressant.
Les abris légers permettent de compléter la période de production à un coût intéressant.

Le choix des productions

Le choix des productions devrait partir des possibilités de valorisation des moyens de production que sont la main-d’œuvre et les surfaces et installations disponibles. Et non l’inverse. Une ferme installée sur une petite surface peut produire autant de revenu qu’une autre plus vaste, c’est le niveau d’intensification qui compte, c’est le choix de productions à haute valeur ajoutée qui compte. C’est une question de modèle économique.

Nous pouvons disposer de tableaux indicatifs de budget de cultures par unité de surface. Ces informations sont précieuses pour les coûts variables comme les semences, les emballages, les besoins théoriques en main-d’œuvre. Mais elles doivent être complétées pour les données fixes de la ferme incluant les coûts de location, d’amortissement, les frais généraux, etc.

La mise sur le marché

La production d’une ferme maraîchère diversifiée à petite échelle peut assez facilement être commercialisée en marchés publics et à la ferme. La vente par des groupements d’achats est une possibilité qui a été rendue plus aisée avec les technologies de communication actuelles. La vente en restaurants et magasins de détail ne permet le plus souvent d’écouler qu’une petite partie de la production. Les marchés de gros sont accessibles à des fermes de taille importante où ne sont produits que quelques légumes seulement.

Les marchés publics sont facilement accessibles, il ne faut pas nécessairement de grands volumes, l’assortiment ne doit pas nécessairement être large. Les clients achètent ce qu’ils voient et il y a donc peu de plaintes de leur part. L’inconvénient est le temps nécessaire pour la tenue des stands, la dépendance des conditions météo pour la venue des clients, le risque de ne pas tout vendre et donc d’avoir des pertes. En pratique, choisissons des marchés réservés aux producteurs, il est difficile d’être compétitifs face à des revendeurs qui ont acheté à bas prix. La fraîcheur, la propreté, la présentation des légumes sont des atouts de vente. Maintenons les prix à leur juste niveau.

La vente à la ferme est une belle solution, facile à organiser. Nous ne devons pas être ouverts tout le temps, mais il convient d’être régulier dans le respect des horaires et fréquences d’ouverture. Si l’échoppe est installée près une route fréquentée, c’est un avantage, mais il est important de s’organiser pour que la personne qui assure les permanences d’ouverture puisse être occupée aussi lors des temps morts.

Les ventes par paniers sont des formules intéressantes pour autant que nous soyons capables de bien les gérer et les organiser. Une grande variété de légumes doit être produite sur une très longue période. Les clients attendent des légumes classiques comme les pommes de terre, les carottes, les oignons. En saison, ils souhaitent des laitues, des frisées, des scaroles, des tomates, des concombres, des courgettes, des chicons. Les légumes un peu moins communs viennent ensuite, comme les navets, les bettes, les mâches. La livraison est un poste lourd économiquement et quant aux besoins en heures de travail.

La vente en gros est adaptée à la spécialisation des investissements en bâtiments et machines spécifiques et performants. La production d’un seul légume ou de peu de légumes différents amène un risque de production plus élevé car moins diversifié (ravageurs, maladies, météo, etc.) et un risque économique lié à la sectorisation du marché.

La vente à des restaurants et commerces spécialisés est valorisante quant à l’acquisition d’un savoir-faire dans l’élaboration et la présentation des produits. Il est difficile de n’avoir que ceux-ci comme débouchés.

L'organisation des parcelles permet de rationaliser les besoins en main-d'oeuvre.
L'organisation des parcelles permet de rationaliser les besoins en main-d'oeuvre.

Ne pas sous-estimer les besoins

Deux grandes charges de travail sont à distinguer d’emblée pour l’installation et pour la production proprement dite. Le travail d’installation ou d’aménagement est lourd mais ne se répète pas.

Le travail de production se répète au fil des semaines ; il comprend la production, la commercialisation, l’administration et la gestion. L’ensemble de ces tâches aura probablement des pointes hebdomadaires mais il doit être déterminé pour qu’il reste supportable par les forces vives de la ferme maraîchère. Une charge trop lourde peut entraîner un découragement et un épuisement après quelques années au point de mettre en péril la viabilité de l’entreprise maraîchère.

La surveillance quotidienne des cultures, les ouvertures et fermetures des aérations de serres sont des moments indispensables. Des manquements peuvent coûter cher : les exemples de cultures ratées à cause d’excès thermiques, des stades clés ratés par manque de temps pour observer, des serres abîmées par des vents forts suite à des omissions.

Nous avons tous besoin d’un temps de repos hebdomadaire, tenons-en compte dans notre planification des besoins horaires.

Répartir les pointes de travail

Le calendrier des cultures permet d’identifier les pointes de travail liées aux implantations et aux récoltes. N’oublions pas le point essentiel de la maîtrise de l’enherbement qui est très chronophage. Le projet Interreg Vetabio actif sur l’espace transfrontalier Hauts-de-France, Vlaanderen-Wallonie a pu déterminer que cette seule activité mangeait 70 % du temps de production chez les maraîchers Bio.

Il faut aussi prévoir de la réserve de temps pour s’adapter aux contraintes météo.

N’oublions pas non plus le temps de formation du maraîcher, un ou deux jours par mois ne sont pas du luxe.

L’administration est lourde aussi, n’oublions pas de prévoir du temps pour la gestion des commandes, les facturations, les comparaisons de prix.

La recherche de débouchés demande aussi du temps pour ne pas rater des opportunités, se tenir informé, garder des contacts avec les maillons de la filière. Avec celles consacrées à la gestion (gérer, c’est prévoir), ce sont les heures les plus rentables des activités du maraîcher.

Les paillages interviennent directement sur la rentabilité par les économies  de main-d'œuvre permises lors des opérations de maîtrise de l'enherbement.
Les paillages interviennent directement sur la rentabilité par les économies de main-d'œuvre permises lors des opérations de maîtrise de l'enherbement.

Être efficient

Être efficient, c’est la base de la réussite. Si sur un marché, j’arrive à vendre en moyenne pour 100€ de chiffre d’affaires à l’heure, ce n’est pas du tout la même chose qu’une situation où j’atteins 500€ sur le même temps. Récolter 20 ou 50 barquettes de fraises à l’heure, ce n’est pas du tout la même chose. Désherber une bande 10 ares en 2 semaines ou en 1 jour et demi, ce n’est pas du tout la même chose. C’est une question d’habilité à la fonction et surtout de moyens disponibles et d’organisation.

F.

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