Les ventes de tracteurs sont reparties à la hausse

Des délais de livraison de 8 à 12 mois deviennent la norme pour certaines marques. Imaginez que vous devriez configurer et commander  le tracteur de vos rêves un an à l'avance, uniquement pour être sûr qu'il soit conçu à la carte pour vous, départ usine.  A moins de se tourner vers un modèle de stock...
Des délais de livraison de 8 à 12 mois deviennent la norme pour certaines marques. Imaginez que vous devriez configurer et commander le tracteur de vos rêves un an à l'avance, uniquement pour être sûr qu'il soit conçu à la carte pour vous, départ usine. A moins de se tourner vers un modèle de stock... - J.V.

Pour avoir un aperçu des ventes de tracteurs en Belgique, intéressons-nous d’abord aux chiffres fournis par le Service d’immatriculation des véhicules (DIV). Ceux-ci nécessitent un certain traitement pour obtenir une bonne vue du marché. En effet, ils ne se réfèrent pas qu’aux engins neufs et, dans certains cas, un tri s’impose.

En outre, un chargeur télescopique peut être enregistré de diverses manières : comme un automoteur agricole, un véhicule utilitaire ou encore comme un tracteur. Les quads et autres véhicules de service ou de loisirs peuvent également être immatriculés en tant que tracteurs, ce qui complique encore l’analyse des données…

Cohérence… et enregistrement

Par ailleurs, même les tracteurs ne sont pas encodés de la même manière… Certains le sont sur base de leur puissance nominale, d’autres sur base de leur puissance maximale ; certains avec boost, d’autres non. Tout dépend de l’employé qui réalise l’encodage. Ainsi, pour un même tracteur, il existe plusieurs encodages différents…

Précisons encore que seuls les tracteurs immatriculés figurent dans les registres de la DIV. Les engins qui n’empruntent pas la voie publique (utilisés exclusivement sur des propriétés privées, par exemple) ne sont pas enregistrés auprès de l’administration et n’apparaissent pas dans les ventes 2021. Néanmoins, nous pouvons assez logiquement estimer que l’ensemble des tracteurs de plus de 50 ch sont immatriculés, ce qui n’est probablement pas le cas des « petits » tracteurs utilisés pour l’entretien des terrains de sport ou de golf, des parcs, des grandes propriétés…

Les tracteurs neufs stockés sur le parking des concessionnaires ne sont pas non plus repris dans les chiffres de la DIV.

+9 % par rapport à 2020

Les chiffres relatifs aux ventes de tracteurs suscitent parfois des remous dans le milieu agricole. C’est pourquoi ceux-ci ont été traités en collaboration avec Fedagrim, la Fédération belge des fournisseurs de machines, bâtiments et équipements pour l’agriculture et les espaces verts, et plus particulièrement avec Hans Verstreken, le nouveau coordinateur de la fédération. Plusieurs appels téléphoniques ont également été passés auprès d’importateurs et concessionnaires en vue de recouper les informations. Les chiffres publiés dans le présent article sont donc cohérents par rapport aux observations faites sur le terrain.

Si l’on considère le nombre absolu de tracteurs écoulés, les ventes enregistrées en 2021 sont conformes à celles des autres années. En général, environ 2.000 unités sont vendues chaque année et 2021 ne déroge pas à la règle. En effet, 2.187 nouveaux tracteurs ont été enregistrés, soit une augmentation de 8,9 % par rapport à 2020 (2.007 unités) (voir tableau 1).

Des tracteurs moins puissants

Les ventes de tracteurs de plus de 250 ch n’augmentent pas. Au contraire… (voir tableau 2). Une nette croissance des ventes est, par contre, observée du côté des tracteurs de moins de 250 ch. La catégorie 50-100 ch affiche d’ailleurs la plus forte hausse (+ 116 unités). Cela peut s’expliquer par l’application de normes environnementales plus strictes sur notre territoire. Certains modèles ont dû être immatriculés, au risque de devenir invendables.

La catégorie 100-140 ch enregistre une augmentation de ses ventes de 62 unités. Du côté des 180-250 ch, 49 tracteurs supplémentaires ont été vendus, tandis que le groupe 200-250 ch voit ses ventes reculer de 37 unités. Dans cette dernière catégorie, Fendt est leader du marché. Le constructeur allemand devance New Holland et John Deere.

Les principaux acheteurs de tracteurs de plus de 250 ch (à savoir : les entrepreneurs et agriculteurs à la tête de grandes exploitations) ont limité leurs achats en 2021. Ont-ils subi de plein fouet les effets des dernières années de sécheresse ou cela s’explique-t-il d’une autre manière ? Notre enquête téléphonique n’a pas permis d’obtenir une réponse claire. Il est néanmoins question d’une stabilisation des exigences en matière de puissance et d’une meilleure connaissance de l’impact du poids des engins sur les sols agricoles.

Aucun « perdant » ?

Au niveau des marques, on voit que John Deere, Deutz-Fahr, Steyr, Massey Ferguson, Valtra et Kubota ont vendu davantage de tracteurs en 2021 qu’en 2020 (tableau 1). Les résultats de Kubota et Steyr sont à épingler. Le premier progresse d’année en année tandis que le second vend des modèles de plus en plus puissants. En pourcentage, ce sont ces deux constructeurs qui ont le plus progressé sur le marché belge l’année dernière. En chiffres absolus, la plus grande progression est enregistrée par John Deere.

New Holland, Case IH, Claas et, dans une moindre mesure, JCB voient leurs ventes se maintenir. On ne peut pas vraiment parler de « perdants » en 2021.

On notera toutefois que de nombreuses marques sont présentes sur le marché belge et n’écoulent que quelques unités annuellement. Parfois, seulement une… On peut légitiment se demander comment certaines structures se maintiennent au vu de leurs faibles ventes.

Des craintes pour 2022

Malgré une tendance positive, la joie est contenue lorsque l’on évoque les chiffres 2021. Il est vrai qu’un plus grand nombre de tracteurs a été livré, mais presque tous nos interlocuteurs ont fait référence à 2020, année marquée par l’épidémie de coronavirus. Plusieurs lockdowns se sont succédé et quelques usines ont été paralysées. Du retard a été pris… et a été résorbé en 2021. Ce qui se traduit dans les chiffres…

Les importateurs et concessionnaires sont également inquiets pour l’année en cours. Ceux qui le peuvent poursuivent leurs livraisons, mais cela devient difficile. Ce n’est pas tant le prix de l’acier ou l’impact des mesures sanitaires sur l’organisation des usines qui perturbent le marché, mais bien la disponibilité des composants électroniques. Le producteur américain de puces électroniques Intel a bien investi 17,6 milliards d’euros dans la construction de deux nouveaux sites de production, mais les premières puces ne devraient pas en sortir avant… 2025.

Des problèmes de disponibilité de pneus (dimension et marque) sont ponctuellement évoqués. Cela peut également avoir un impact sur les ventes.

Des délais de livraison de 8 à 12 mois deviennent la norme pour certaines marques. Imaginez que vous devriez configurer et commander le tracteur de vos rêves un an à l’avance, uniquement pour être sûr qu’il soit conçu à la carte pour vous, départ usine.

Se tourner vers les stocks ?

Les stocks sont importants, bien qu’ils se soient réduits ces dernières années. Pour les concessionnaires, la situation actuelle pourrait être une chance de « nettoyer » la boutique. Mais cela semble également être une opportunité pour les acheteurs. Nous entendons que les concessionnaires n’ont jamais pris autant de stock que maintenant. Toute annonce d’augmentation des prix incite aussi à l’achat. Les agriculteurs et entrepreneurs pourraient profiter de ces stocks.

Les importateurs et concessionnaires craignent que l’annulation d’Agribex  ait un impact sur les ventes réalisées en 2022.
Les importateurs et concessionnaires craignent que l’annulation d’Agribex ait un impact sur les ventes réalisées en 2022. - J.V.

Le secteur considère l’annulation d’Agribex comme une perte, car l’année qui suit le salon, l’effet Agribex se fait clairement sentir au niveau des ventes. Cependant, cette décision difficile a suscité beaucoup de compréhension. La vente de matériel de stock pourrait, peut-être, contrebalancer quelque peu cette annulation.

D’après Tim Decoster

Une reprise confirmée par la Cema

La Cema, la Fédération des constructeurs européens de machines agricoles, confirme la reprise des ventes de tracteurs sur le continent européen.

Selon les chiffres recueillis par ladite fédération auprès des différentes autorités nationales, quelque 115.146 tracteurs ont été immatriculés en Europe au cours des six premiers mois de 2021. Parmi ces immatriculations, 32.353 engins avaient une puissance inférieure ou égale à 50 ch (37 kW). Au-delà de cette limite de puissance, 82.793 tracteurs ont été enregistrés. La Cema estime que 89.060 de ces véhicules sont des tracteurs agricoles, le reste étant des quads, des télescopiques ou d’autres équipements.

Ces chiffres confirment la forte demande et sont liés au fait que la chaîne agroalimentaire européenne a continué à fonctionner malgré la crise sanitaire mondiale. Globalement, 25 % de tracteurs agricoles supplémentaires ont été immatriculés en Europe au cours du premier semestre 2021 par rapport à la même période, en 2020. Ensuite, les impacts de la pandémie se sont fait ressentir sur les ventes.

Les chiffres européens pour le second semestre 2021 n’étaient pas encore disponibles au moment de la mise sous presse de la présente édition.

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