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Frais et honoraires d’avocat: quel montant et quel délai?

Je reçois la facture de mon avocat plusieurs années après la fin d’une procédure judiciaire. Est-ce permis d’attendre si longtemps ? De plus, je la trouve fort élevée ! Que puis-je faire ?

Temps de lecture : 5 min

La facture d’un avocat s’appelle aussi l’état de frais et honoraires. Ce dernier terme est plus précis, car le montant facturé par l’avocat est effectivement constitué de deux parties. Les honoraires doivent être distingués des frais qui sont imputés séparément au client. Les honoraires des avocats ne portent pas sur des actes matériels, qui prennent souvent du temps, mais bien sûr la plus-value au niveau intellectuel et en termes de spécialisation que le client acquiert grâce à l’intervention de son conseil. Les honoraires constituent donc la contrepartie du travail que l’avocat accomplit. Ce travail porte, entre autres, sur la consultation juridique, la négociation, le travail intellectuel, l’assistance et la représentation du justiciable devant diverses instances dont les cours et tribunaux. Les frais sont les dépenses consenties par l’avocat pour le compte du client en ce qui concerne une affaire qui lui a été confiée.

Dans le Code judiciaire

Les prérogatives et devoirs des avocats sont réglés dans le Code judiciaire, ainsi que le droit de réclamer un paiement au client.

En Belgique, il n’existe pas de barème légal ou réglementaire des honoraires, la seule disposition applicable en la matière est l’article 446 ter du code judiciaire qui prévoit que les avocats taxent leurs honoraires avec la discrétion qu’on doit attendre d’eux dans l’exercice de leur fonction. Tout pacte sur honoraires exclusivement lié au résultat de la contestation leur est interdit. En Belgique il est donc défendu de convenir que le client ne devra pas payer d’honoraires si l’affaire n’est pas gagnée.

Le Conseil de l’Ordre

En vertu de cet article 446 ter du Code judiciaire, les honoraires d’un avocat sont réduits par le Conseil de l’Ordre d’Avocats si leur fixation excède les bornes d’une juste modération. Cette compétence du Conseil de l’Ordre n’est pas limitée au cas où les honoraires ont été établis par décision unilatérale, elle est également d’application si l’avocat et le client ont conclu un accord.

Le conseil de l’Ordre remplit une fonction d’intérêt général et apprécie si les honoraires ont été fixés avec une juste modération, de sorte qu’il ne doit tenir compte ni de la décision unilatérale de l’avocat ni d’accords ou de conventions éventuels entre l’avocat et son client, quel que soit le moment où cette décision unilatérale a été prise, où ces accords ou conventions ont été conclus et exécutés, sans préjudice du droit de la partie de s’adresser à la justice ou à un arbitre.

Un client qui n’est pas d’accord avec l’état de frais et honoraires de son avocat peut en tout cas demander une explication à son avocat. Si la discussion n’est pas résolu sur base d’une explication, l’avocat et le client peuvent s’adresser par écrit au Bâtonnier et demandé qu’un membre du Conseil de l’Ordre remette un avis sur un état de frais et honoraires.

Citer devant le Tribunal

Si l’avocat et le client n’arrivent pas à un accord à l’amiable et si l’état de frais et d’honoraires reste impayé, l’avocat peut citer son client devant le tribunal.

Lorsqu’un litige relatif à l’estimation des honoraires est soumis au juge, il appartient au juge d’apprécier l’opportunité de demander un avis préalable par la commission de taxation du Conseil de l’Ordre des avocats. Cela reste toutefois un avis qui n’est contraignant ni pour les parties ni pour le tribunal.

Réduction possible ?

Afin d’apprécier la juste modération des honoraires de l’avocat, le juge prend en considération l’importance de l’affaire et la nature du travail de l’avocat, mais aussi son autorité personnelle, la capacité financière du client et le résultat. L’avocat doit faire preuve de justesse et d’équité, compte tenu notamment de sa spécialisation et des tarifs usuels pour les prestations visées. Dans le cadre d’une juste évaluation des honoraires, il peut être tenu compte de la nature de l’affaire, des prestations effectivement fournies et du temps consacré à ces prestations. Le chiffrage des honoraires et des frais par l’avocat doit permettre au client d’exercer son droit de contrôle d’une manière raisonnable.

Le tribunal dispose d’une compétence de contrôle marginale concernant l’évaluation des honoraires des avocats. Les honoraires réclamés ne peuvent être réduits que s’ils sont clairement ou manifestement exagérés. Seuls les décomptes disproportionnés sont sujets à adaptation et les factures anormalement élevées doivent être réduites.

Prescription dans un délai de 5 ans

Vous précisez que la procédure dans laquelle l’avocat est intervenu est terminée depuis plusieurs années et vous interroger sur le délai de demande de paiement. Conformément à l’article 2276bis, § 2, du Code civil, l’action des avocats en paiement de leurs frais et honoraires se prescrit dans un délai de cinq ans après l’achèvement de leur mission. La mission de l’avocat s’achève au moment où son client met un terme à son mandat de façon non équivoque, même si par la suite, l’avocat accomplit des actes résultant de l’achèvement de sa mission. L’arrêt de l’intervention de l’avocat est une question de fait qui peut être prouvée par toutes voies de droit.

Jan Opsommer

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