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Sécurité alimentaire : l’UE entend débloquer les céréales ukrainiennes

Alors que 20 millions de tonnes de céréales ukrainiennes ne peuvent sortir des ports de la mer Noire en raison de la guerre, les chefs d’État et de gouvernement de l’UE réunis en sommet extraordinaire la semaine dernière ont appelé la Russie à lever le blocus.

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À cette fin, le président français a proposé une résolution des Nations unies. Une réunion entre la Turquie et la Russie est aussi prévue pour faciliter les exportations de céréales. Le Conseil européen a également invité les États membres à accélérer l’acheminement par des voies alternatives.

Alors que la guerre en Ukraine a un impact direct sur la sécurité alimentaire mondiale, les chefs d’État et de gouvernement de l’UE réunis (lors d’une réunion extraordinaire) à Bruxelles les 30 et 31 mai, appellent la Russie, dans les conclusions qu’ils ont adoptées à l’occasion, à lever le blocus des ports ukrainiens de la mer Noire, notamment celui d’Odessa.

Embargo sur le pétrole russe

Sur ce point, le président français Emmanuel Macron a indiqué avoir proposé à Vladimir Poutine le vote d’une résolution des Nations unies pour « donner un cadre très clair à cette opération ». Avant d’ajouter que « la décision dépend d’un accord de la Russie et des garanties qu’elle apporte face au déminage qui est indispensable pour que les vraquiers et bateaux puissent être acheminés et prendre ces céréales (20 Mt doivent quitter les silos avant la prochaine moisson de cet été) ».

« Il faut ainsi des garanties de sécurité apportées aux Ukrainiens pour éviter qu’ils ne soient attaqués, c’est le cadre des Nations unies qui nous permettra de le faire », a insisté Emmanuel Macron.

De son côté, Vladimir Poutine a expliqué qu’il serait ouvert à une solution négociée avec l’UE, à condition d’une levée des sanctions, afin d’augmenter les livraisons des engrais et des produits agricoles russes. Un chantage qui n’a pas fait plier l’UE puisque les Vingt-sept se sont mis d’accord le 30 mai pour la mise en place d’un embargo progressif sur le pétrole russe.

Réunion turco-russe

Le président français a confirmé à l’issue du Sommet européen, « le rôle très important de la Turquie, compte tenu de sa responsabilité dans la mer Noire » et de ses échanges récents avec Moscou. En effet, le président russe Vladimir Poutine avait expliqué lors d’un entretien téléphonique avec le président turc Recep Tayyip Erdogan, vouloir travailler avec Ankara à la libre circulation des marchandises en mer Noire, y compris des céréales provenant d’Ukraine.

Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov avait ainsi estimé que « si le problème du déminage était réglé, les forces navales russes pourraient assurer le passage sans entrave des navires vers la mer Méditerranée puis vers leurs destinations ». Une réunion bilatérale est prévue notamment le 8 juin afin de discuter de la mise en place de « corridors sécurisés ». Dans ce cadre, la Turquie souhaiterait créer « un centre d’observation des corridors à Istanbul », selon son ministre des Affaires étrangères, Mevlüt Cavusoglu.

En attendant, le Conseil européen invite les États membres à accélérer les travaux sur les « Voies de solidarité » proposées par Bruxelles afin de faciliter les exportations de denrées alimentaires en provenance d’Ukraine par des voies alternatives (rails, routes et voies fluviales). Dans ce cadre, l’Allemagne a déjà mis sur pied un « pont ferroviaire avec l’Ukraine pour aider Kiev à exporter ses céréales », a indiqué le prochain chef des forces américaines en Europe, le général Chris Cavoli (sa nomination doit encore être confirmée par le Congrès).

Avant de préciser que « la compagnie ferroviaire allemande Deutsche Bahn est en train d’extraire d’Ukraine des quantités massives de céréales, via la Pologne en direction des ports du nord de l’Allemagne pour leur exportation ».

Coopération multilatérale et PAC

Face à la pénurie d’engrais actuelle, le Conseil demande également que des efforts supplémentaires soient fournis afin de promouvoir une utilisation plus efficace des engrais et des solutions de remplacement. D’autre part, il se félicite du lancement par la présidence française de l’UE (le 24 mars) de la mission de résilience de l’alimentation et de l’agriculture (Farm) qui vise à atténuer les conséquences sur le niveau des prix, la production, l’accès aux céréales et leur approvisionnement. Tout en apportant son soutien à l’Alliance mondiale pour la sécurité alimentaire (Gafs), convoquée conjointement par le G7 et le Groupe de la Banque mondiale, lancée lors de la réunion des ministres du développement du G7 à Berlin.

Par ailleurs, il réitère son engagement à maintenir le commerce mondial des produits alimentaires ouvert, à augmenter la production alimentaire locale durable afin de réduire les dépendances structurelles ou encore à renforcer la solidarité envers les pays les plus vulnérables. Sur ce point, le Conseil européen invite la Commission à étudier la possibilité de mobiliser les réserves du Fonds européen de développement pour soutenir les pays partenaires les plus touchés.

Ukraine : l’Union africaine appelle à libérer urgemment les céréales

« Une solution pour exporter les stocks de céréales hors d’Ukraine doit être trouvée pour éviter le scénario catastrophique de pénuries et de nouvelles augmentations des prix des denrées alimentaires », a déclaré le 31 mai le président de l’Union africaine, Macky Sall qui est intervenu devant les dirigeants de l’UE lors du Sommet des 30 et 31 mai à Bruxelles. Avant d’ajouter que « tout doit être fait pour libérer les stocks disponibles et assurer le transport et l’accès au marché, la situation est particulièrement préoccupante » alors que le continent africain compte déjà 282 millions de personnes sous-alimentées. En outre, le président sénégalais a appelé à augmenter la production alimentaire et l’accès aux engrais en Afrique, avertissant que le rendement céréalier du continent pourrait chuter de 20 à 50 % cette année. Macky Sall estime qu’il y a un risque réel d’aggravation de la famine dans certains pays africains, mais aussi en Asie du Sud et au Moyen-Orient.

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