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Le plan loup en Wallonie: le secteur ovin le plus impacté

Le Plan loup a été adopté en juin 2020. Depuis, le nombre de loups présents ou de passage a évolué. En décembre 2020, une première Zone de Présence Permanente (ZPP) a été définie dans les Hautes-Fagnes. Elle abrite actuellement une meute de cinq individus, qui devrait s’agrandir ce printemps avec une nouvelle portée de louveteaux. Une extension de cette ZPP a été créée en février 2022 suite à l’installation d’un nouvel individu. Le Réseau loup étudie la situation de près et des mesures d’accompagnement ont été mises en place.

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Entre le premier signalement officiel reçu en août 2016 et avril 2022, la présence d’au moins 25 loups différents a été confirmée en Wallonie, dont 22 étaient des individus en dispersion, de passage à travers notre territoire. Ceux-ci n’ont été détectés qu’une seule fois ou sur une période très courte avant de disparaître des radars, et ont probablement gagné une région voisine. Seuls 3 individus adultes sont considérés comme établis de manière permanente :

– le couple Akéla et Maxima (accompagné de 3 louvards nés en mai-juin 2021 et potentiellement cette année d’une seconde portée), dont la ZPP se situe dans les Hautes-Fagnes ;

– le loup de Bullange, dont la ZPP est contiguë, au sud, à celle définie pour la meute d’Akéla et Maxima. Le territoire de ce loup s’étend en grande partie sur le Land allemand voisin de Rhénanie du Nord – Westphalie.

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Des cas de prédation sur animaux domestiques sont régulièrement rapportés au Réseau loup qui détache des experts pour les diagnostiquer et objectiver la responsabilité du loup. Pour ce faire, l’outil génétique, auquel les experts ont fréquemment recours, s’avère très utile.

Les autres cas d’attaques qui ne peuvent confirmer avec certitude la responsabilité du loup ou du chien ne sont pas détaillés ici. Toutes les données sont disponibles sur www.biodiversite.wallonie.be.

Le tableau 1 montre que le secteur ovin-caprin est le plus impacté, parfois par les loups, mais aussi régulièrement par les chiens (qui peuvent causer autant de dégâts que des loups sur un troupeau). C’est pourquoi, à l’heure actuelle, les mesures préventives et de protection des troupeaux ciblent prioritairement ces types d’élevage. De très rares cas de prédation ont également été constatés en Flandre sur des poneys (3) et des alpagas (3).

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Le seul cas de prédation connu sur bovin a été perpétré par le loup dénommé « Billy », qui a attaqué deux veaux dans une étable à Nidrum (commune de Butgenbach) en 2020. Cet individu dispersant au comportement atypique s’est attaqué préférentiellement aux proies domestiques tout au long de son parcours et notamment plusieurs fois à des bovins. Il a finalement été abattu en France, la situation ayant été jugée problématique dans les régions et pays qu’il a traversés.

Quelles aides pour les éleveurs ?

Différentes dispositions sont prévues dans le cadre du Plan loup pour soutenir les éleveurs, tant professionnels que hobbyistes :

– des indemnisations en cas d’attaque de loup avérée ou hautement probable ;

– du conseil et des diagnostics de vulnérabilité (ou « analyses de risque ») sur le terrain ;

– la mise à disposition gratuite de kits de protection temporaire (clôtures mobiles ou semi-mobiles principalement), en cas d’attaque ou de manière anticipative ;

– des subsides à des protections permanentes selon les conditions d’éligibilité du Plan loup.

Des conseillers de l’asbl Natagriwal sont chargés de l’accompagnement et de l’aide aux éleveurs en matière de protection des troupeaux. C’est un service gratuit qui va du conseil à distance jusqu’à une analyse de terrain de chaque parcelle pour proposer des mesures de protection adaptées. Certaines dispositions du plan seront évaluées et si possible améliorées pour mieux répondre aux besoins identifiés. Jusqu’à présent, une trentaine d’analyses de risque ont été réalisées. Les premières demandes de subsides sont introduites. Du matériel a été prêté à 27 éleveurs, et l’asbl a répondu à une soixantaine de sollicitations et/ou demandes de conseil sur l’adresse prevention.loup@natagriwal.be, en complément de diverses actions de communication (articles dans la presse agricole, séances d’information, participation à des reportages TV ou radio, rédaction de fiches techniques sur les dispositifs de protection, etc.) menées en étroite collaboration avec le Département d’étude du milieu naturel et agricole (Demna).

La stratégie actuelle de protection durable repose essentiellement sur l’électrification des clôtures. Le secteur ovin wallon est en effet principalement composé de propriétaires hobbyistes qui possèdent un petit nombre d’animaux dans des parcelles de taille réduite qu’il est possible d’électrifier. Un dispositif de protection recommandé consiste à poser un fil électrique au niveau du sol et deux fils électriques au-dessus du treillis, tel qu’indiqué dans le schéma ci-après de façon à atteindre une hauteur de clôture d’1,2m. Un dispositif à cinq fils électriques peut également convenir.

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L’électrification est nécessaire pour son effet dissuasif : d’une part les loups « sentent » à distance le champ électrique, ce qui peut constituer un niveau de protection préventif lors d’une tentative de prédation ou d’approche ; d’autre part, en cas de contact, le choc électrique provoque un traumatisme dont ils gardent le souvenir. Le voltage recommandé est de 5.000 à 7.000 volts au moins, de sorte que la décharge soit suffisamment douloureuse pour dissuader l’animal de recommencer. La clôture électrique doit servir de signal et être associée par le loup à un danger, ce que n’induit pas une clôture non électrifiée.

Electrification d’une clôture existante, avec ajout d’un fil en bas et de deux fils en haut du treillis (essai réalisé au Centre de Recherche Ovine de l’Université de Namur).
Electrification d’une clôture existante, avec ajout d’un fil en bas et de deux fils en haut du treillis (essai réalisé au Centre de Recherche Ovine de l’Université de Namur).
Clôture à cinq fils électriques utilisée fréquemment dans le Land de Basse Saxe (Allemagne).
Clôture à cinq fils électriques utilisée fréquemment dans le Land de Basse Saxe (Allemagne).

Ces systèmes sont utilisés dans les pays voisins. L’électrification par le bas (avec le fil vers l’extérieur) est particulièrement importante, car un loup essaie généralement de passer en priorité sous la clôture (soit en creusant, soit en profitant d’une coulée de blaireau ou de renard, d’une dépression naturelle ou d’une faiblesse au niveau de la partie inférieure du treillis) avant de tenter de la grimper, voire très rarement de la franchir en sautant. Même si le loup en a la capacité physique, il n’applique quasi jamais ce type de stratégie. Ce sont manifestement les individus les plus « téméraires » qui se comportent de la sorte, de fortes différences comportementales s’observant d’un individu à un autre : la plupart ne sautent pas, mais certains peuvent le faire. C’est pourquoi ce risque doit être pris en compte dans la protection.

Rappelons l’importance, en premier lieu, de bien entretenir ses clôtures et de corriger les failles ou les autres points de vulnérabilité : vieilles clôtures, treillis distendu, troué ou affaissé, piquets usés ou instables, coulées de blaireau ou de renard… Un loup profitera de ces points de faiblesse pour pénétrer dans l’enclos avant toute autre tentative. Chaque propriétaire est responsable du maintien en bon état de ses clôtures, ce qui permet également de prévenir les attaques de chiens divagants pouvant eux aussi occasionner des dégâts importants sur un troupeau, comme indiqué précédemment. Il existe également d’autres moyens de protection tels que :

– le regroupement de nuit dans un parc sécurisé ;

– les haies défensives ;

– les dispositifs d’effarouchement (ex : foxlight, turbofladry).

– les chiens de protection qui sont certainement le moyen le plus efficace (sous condition d’utiliser des races adaptées et bien éduquées), mais il faut alors coupler leur utilisation à la pose de clôtures électriques destinées à contenir les chiens. Ce schéma ne peut convenir dans toutes les situations et est plutôt réservé à des troupeaux comptant au minimum une centaine de brebis. Une formation préalable des éleveurs à l’utilisation de ce type de chiens est plus que recommandée au risque de générer plus de problèmes que de solutions. C’est par ailleurs toute une filière à développer en Wallonie, avec un savoir-faire à réapprendre.

D’après Mathieu Halford

Natagriwal,

Violaine Fichefet

et Vinciane Schockert

Département d’Etude du Milieu Naturel et Agricole

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