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Déforestation importée : accord des Vingt-Sept sur une position commune

Les États membres ont finalisé leur position sur la proposition de règlement visant à lutter contre la déforestation importée. Un texte qui cible des produits comme le soja ou la viande bovine.

Temps de lecture : 4 min

Les ministres de l’Environnement de l’UE se sont mis d’accord sur une position commune concernant la lutte contre la déforestation importée.

Les Vingt-sept ont repris les grandes lignes du dispositif proposé par la commission européenne au mois de novembre 2021 qui vise à garantir que les importations européennes de viande bovine, bois, huile de palme, soja, café et cacao soient exemptes de déforestation.

Systèmes

de diligence raisonnée

Plusieurs délégations qui ont soutenu le compromis ont toutefois souligné qu’elles auraient aimé un champ d’application plus étendu pour couvrir d’autres écosystèmes (savanes, tourbières…), comme le demande le parlement européen.

Les entreprises qui mettent sur le marché ces produits de base (et certains de leurs dérivés comme le cuir ou le chocolat) seront tenues de mettre en œuvre des systèmes de diligence raisonnée prouvant qu’ils ne sont pas issus de terres déboisées ou dégradées. En pratique, les entreprises importatrices seront responsables de leur chaîne d’approvisionnement, la traçabilité pouvant s’exercer via des données de géolocalisation des cultures et photos satellitaires, qui intégreraient une base de données accessible aux autorités.

Réduction

de la charge administrative

Les États membres ont simplifié ce système pour éviter que les obligations ne soient redondantes, et réduit la charge administrative pour les opérateurs et les autorités des États membres. La position du conseil introduit aussi la possibilité, pour les petits opérateurs, de faire appel à des opérateurs de plus grande taille pour préparer les déclarations de diligence raisonnable. Les pays tiers seront classés selon un niveau de risque associé à la déforestation (faible, standard ou élevé) qui déterminera l’étendue des obligations spécifiques des opérateurs.

Dilution

Les Vingt-sept ont toutefois introduit, à la demande des grands pays forestiers du nord de l’Europe, des modifications de la définition de la dégradation des forêts. En l’absence de définition internationale de la Fao, ce concept devra s’entendre comme « les changements structurels du couvert forestier prenant la forme d’une conversion de forêts primaires en forêts de plantation ou en d’autres terres boisées ». Pour WWF il s’agit d’une dilution qui affaiblit fortement la portée du texte.

L’ONG dénonce également la suppression des contrôles obligatoires dans les pays jugés à faible risque de déforestation. « La position de négociation du Conseil a autant de trous qu’un fromage suisse, mais elle n’a malheureusement pas le même goût », résume WWF.

Au tour

du parlement européen

Des négociations avec le parlement européen pour trouver un compromis final sur ce dossier pourront s’engager dès que les eurodéputés auront, de leur côté, finalisé leur position sur ce texte. Ce devrait être le cas à l’automne, possiblement en septembre, sur la base du rapport préparé par le Luxembourgeois Christophe Hansen (Démocrate-chrétien). La République tchèque qui a repris prend la présidence tournante du Conseil de l’UE le 1er juillet dernier, a fait de cette question l’une de ses priorités.

Les organisations professionnelles du commerce de céréales (Coceral), des huiles végétales (Fediol) et de l’alimentation animale (Fefac) se sont inquiétées qu’aucun changement significatif n’a été proposé par les États membres dans leur position sur la déforestation importée pour simplifier les règles en matière de traçabilité, de coopération avec les pays tiers et de chaîne d’approvisionnement.

Ils déplorent en particulier que le conseil ait maintenu la proposition de la commission européenne d’exiger la traçabilité des informations sur les parcelles pour tous les volumes fournis précisant que « même si certains agriculteurs des pays producteurs peuvent se conformer à cette exigence, la collecte des données de géolocalisation des petits exploitants et des coopératives se heurte à d’importants défis techniques, logistiques, juridiques et de gouvernance ».

Inquiétudes

des importateurs

et des transformateurs

Les transformateurs et importateurs de l’UE préviennent aussi que « demander une séparation des flux de produits vérifiés et non vérifiés à tous les stades de la chaîne d’approvisionnement aura un effet de perturbation et de distorsion des échanges sur les chaînes d’approvisionnement mondiales de soja vers l’UE, tout en sapant les engagements et les efforts en matière de déforestation déjà entrepris dans les zones à haut risque ».

Cette exigence ajoutent-ils, « nécessiterait la construction de nouvelles infrastructures (silos de collecte, chaînes ou usines de trituration, chargement portuaire) à des coûts si prohibitifs que les opérateurs de la plupart des grands ports sont susceptibles de s’abstenir d’investir ».

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