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Relations commerciales avec le continent africain : «repartir sur de nouvelles bases»

Ça bouge entre les deux continents en cet été. C’est dans un contexte particulièrement symbolique au niveau belge que le parlement européen a adopté un rapport sur les relations commerciales entre l’UE et l’Afrique. Rapportrice du document, Saskia Bricmont en a dévoilé quelques éléments clefs.

Temps de lecture : 4 min

Rappelez-vous, le 22 juin dernier, plus de 61 ans après sa mort, la dépouille de Patrice Lumumba, père de l’indépendance congolaise, était restituée à sa famille et à son pays par la Belgique.

Un événement symbolique qui s’inscrit dans un autre momentum fort avec la première visite officielle en République démocratique du Congo du Roi Philippe.

Un partenariat souvent asymétrique

Presque concomitamment, le parlement européen a donné son feu vert à la nouvelle stratégie commerciale entre l’UE et l’Afrique. Une relation souvent asymétrique qu’il convenait de rebâtir sur un pied d’égalité au niveau des relations agroalimentaires.

Développer un partenariat sur l’agriculture durable qui soit au centre des relations UE-Afrique afin de développer des pratiques agricoles respectueuses de l’environnement, de renforcer la résilience des agriculteurs et de remédier aux défaillances du système alimentaire, aggravées par la fermeture des frontières due à la crise du Covid. C’est ce que souhaitent les députés.

En février dernier, les écologistes européens s’étaient déjà penchés sur le problème majeur de l’accaparement des terres et appelé la commission à réfléchir aux conséquences négatives de la libéralisation des échanges en Afrique.

Ils avaient par exemple pointé les exportations européennes de lait en poudre sur le sol africain qui avaient détruit de nombreuses exploitations laitières.

Il faut savoir que l’Afrique dispose de la plus grande surface de terres arables au monde et que les pays de l’Union africaine sont importateurs nets de produits alimentaires.

Leurs agriculteurs produisent en deçà de leur potentiel, en partie du fait des effets négatifs de certaines subventions et classifications intérieures européennes sur les prix que les agriculteurs africains peuvent exiger pour leurs produits sur les marchés locaux, auxquels s’ajoutent les tarifs douaniers qui rendent non compétitives les exportations africaines de denrées alimentaires transformées.

Prioriser la sécurité alimentaire

Pour Saskia Bricmont, l’essentiel est de pouvoir « repartir sur de nouvelles bases et sur un même pied d’égalité » ajoutant, en paraphrasant le président de Zambie, que ce n’était « pas encore le cas aujourd’hui ».

Le rapport couvre plusieurs sujets dont l’importance d’avoir un soutien pour le déploiement d’infrastructures énergétiques performantes, point faible au développement régional de l’économie africaine. Sans oublier le volet numérique pour lequel le parlement pousse à une collaboration accrue avec l’Afrique « afin de résister à la forte pression américaine et chinoise » dans ce domaine.

« Assurer la sécurité alimentaire reste un enjeu majeur, sachant que l’Afrique a fait de 2022 l’année de la nutrition » a développé la députée écologiste, ajoutant la nécessité de « soutenir le déploiement de l’agriculture, de l’agroécologie et la diversification au sein des pays africains qui a tout pour produire de la nourriture en suffisance pour sa population ».

L’Europe peut agir en soutenant les agriculteurs, les petites exploitations « en luttant contre l’accaparement des terres et en travaillant à la reconnaissance des droits de la population autochtone » a souligné M. Bricmont qui a également évoqué une aide pour « relever les normes de production locales afin de satisfaire les exigences élevées du marché européen ».

« Des accords commerciaux justes »

Le parlement s’est par ailleurs prononcé en faveur de la reconnaissance de l’importance de la société civile dans sa participation à la réalisation des objectifs de développement durables (priorités en matière d’infrastructure, protection et restauration de l’environnement…).

Au cœur du document figure la nature des accords commerciaux qui « ne contribuent pas toujours au bien-être des populations locales, ni à l’intégration régionale et locale sur le plan économique » a souligné l’écologiste wallonne qui a demandé, de concert avec sa collègue socialiste Kathleen Van Brempt, une analyse « systématique » des répercussions des accords sur l’économie locale, la diversification économique et la réalisation des objectifs de développement durable.

Marie-France Vienne

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