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Avec le miscanthus, Cédric de Bergeyck se rapproche de l’autonomie énergétique

Agriculteur à Burdinne, Cédric de Bergeyck a repris le château familial en 2014. Un réel défi car la demeure nécessitait d’importants travaux de modernisation de plomberie, d’électricité et de chauffage. Mais également une opportunité pour l’agriculteur de valoriser sa propre production de miscanthus grâce à l’installation d’une chaudière biomasse, en remplacement des trois anciennes chaudières consommant annuellement 20 à 25.000 l de mazout.

Temps de lecture : 6 min

Lorsqu’il reprit le château acquis par sa famille en 1914, Cédric de Bergeyck était parfaitement conscient qu’il devrait réaliser de gros travaux d’économie d’énergie, notamment en matière de chauffage et de production d’eau chaude sanitaire. En effet, les trois chaudières du château étaient assez anciennes : la première, assurant la production d’eau chaude, avait été installée en 1973, les deux autres, dédiées au chauffage, en 1986.

« Une telle installation consomme annuellement 20 à 25.000 l de mazout, ce qui représente un coût loin d’être négligeable, surtout quand le mazout se négocie aux alentours de 0,90 €/l comme nous avons connu il y a quelques années », explique Cédric de Bergeyck. Depuis, le Burdinnois a investi dans l’installation d’une chaudière polycombustibles (miscanthus/plaquettes forestières) lui permettant de réaliser jusqu’à 15.000 € d’économie par an.

Produire et stocker l’énergie

La chaudière ainsi que deux ballons tampons de 2.200 l chacun, sont installés depuis juillet 2015 dans un bâtiment situé à environ 80 m du château. Un silo de stockage du combustible est lui-même accolé à la chaufferie. Cédric de Bergeyck : « Le combustible est amené du silo vers la chaudière de 130 kW par l’intermédiaire d’une hélice à palettes et d’une vis sans fin. La chaudière est ainsi continuellement alimentée, soit en miscanthus, soit en plaquettes ».

La matière est brûlée dans la chaudière et la chaleur produite est stockée dans les ballons tampons. Au rythme de la demande, elle est ensuite renvoyée vers un troisième ballon tampon de 1.000 l, placé dans le château, et vers l’ancienne installation et ses 72 radiateurs.

« Les pertes de chaleur sont estimées à 1 ºC par 100 m. Ici, on peut donc les considérer comme étant nulles malgré les 80 m séparant la chaufferie du corps de logis. » Un résultat que le propriétaire a pu obtenir grâce à l’utilisation d’un tuyau parfaitement isolé.

Les cendres sont quant à elles évacuées par l’intermédiaire d’un décendreur automatique et éliminées tous les 15 jours. « Avant, nous disposions d’une poubelle à cendres pouvant contenir l’équivalent de 3 jours de combustion, ce qui était trop peu car la chaudière s’arrêtait en plein hiver une fois la poubelle pleine. Avec le décendreur, nous avons un confort équivalent à ce que nous connaissions avec le mazout. »

Choisir sa chaudière…

Cédric de Bergeyck a opté pour une chaudière de la marque autrichienne Eta de 130 kW alors qu’il disposait précédemment d’une puissance de 120 kW pour le chauffage et 40 kW pour la production d’eau chaude. Laurent Sommer, chef de projet cultures dédiées chez Valbiom, justifie ce choix : « Nous conseillons toujours de légèrement sous-dimensionner la chaudière, afin qu’elle tourne à plein régime et n’alterne pas marche et arrêt à longueur de journée ».

En outre, la nouvelle installation a été greffée sur l’ancienne et deux chaudières au mazout ont été conservées. Ainsi, le système peut fonctionner soit au mazout, soit au biocombustible, soit en combinant les deux. « Ce qui se révèle être très pratique en cas d’hiver rigoureux, d’éventuelle panne de la chaudière Eta ou de décendrage de celle-ci », complète M de Bergeyck. Bien que dans ce dernier cas, les ballons tampons jouent parfaitement leur rôle en délivrant la chaleur accumulée.

… Et l’alimenter en combustible

Le silo de stockage accolé à la chaufferie est rempli chaque semaine. « À l’aide du télescopique, nous amenons 4 à 5 bacs de combustible depuis la ferme située à environ 300 m », précise-t-il. Avant d’ajouter : « Je réfléchis néanmoins à une technique permettant de réaliser cette opération plus facilement et moins fréquemment. Peut-être que modifier un ancien épandeur de fumier serait une solution… ».

Le remplissage de ce silo d’une cinquantaine de m³ est cependant moins fréquent en été, la production d’eau chaude sanitaire requérant une très faible consommation de combustible.

Tant le miscanthus (2/3 du combustible) que le bois (1/3) utilisés sont entièrement autoproduits, ce qui réduit les coûts et facilite le transport et le stockage.

Des bandes multifonctionnelles

Plantées en 2008 à une densité de 20.000 plants/ha, les deux bandes de miscanthus (2 ha) n’étaient initialement pas destinées à la production de combustible mais avaient déjà une triple fonction.

« La première a été implantée le long d’un cours d’eau et joue un rôle tampon en le protégeant des fertilisants et autres produits phytopharmaceutiques », explique M de Bergeyck. Les deux bandes, large de 15 m, ont également un rôle anti-érosif en retenant les boues lors d’importants épisodes orageux. Enfin, elles servent de refuges pour le gibier (lièvres, faisans, perdrix.).

Récolté en avril à un taux d’humidité inférieur à 20 %, le miscanthus était précédemment vendu comme paillage ou litière animale. L’installation de la chaudière Eta a changé la donne et le miscanthus est maintenant utilisé comme combustible. « La récolte est facile et l’utilisation l’est également car les plants sont broyés directement à la bonne dimension dans l’ensileuse », complète-t-il.

Seule contrainte, la matière récoltée est volumineuse et la stocker requiert une certaine place. « Pour la même raison, un tel projet ne peut être concrétisé que très localement. Il n’est pas envisageable de transporter le miscanthus sur des dizaines de kilomètres tant il prend de la place dans les bennes. »

Compléter avec des plaquettes forestières

L’utilisation de plaquettes forestières vient compenser le manque de miscanthus. En effet, remplacer 20 à 25.000 l de mazout requiert 3 ha de cette culture. Or, l’agriculteur n’en cultive que sur 2 ha.

Les plaquettes sont produites à partir de branches et d’arbres coupés ou morts de la propriété. Cédric de Bergeyck : « Après broyage, nous avons fait sécher les plaquettes dans un hangar en retournant le tas plusieurs fois afin que le séchage soit optimal. Mais choisir du bois préalablement séché à l’air libre est plus facile ».

Outre un certain gain de place, les plaquettes forestières présentent l’avantage d’être plus énergétiques. « De 1,5 à 2 fois plus que le miscanthus », précise Laurent Sommer.

Quel bilan après un hiver ?

Durant les deux premiers mois suivant l’installation de la chaudière polycombustibles, Cédric de Bergeyck a dû trouver quels étaient les réglages idéaux pour que le système soit le plus performant possible. Ce qui a parfois impliqué de rallumer les chaudières au mazout. Depuis, un hiver est passé et l’agriculteur est satisfait de son investissement.

« En outre, comme nous produisons nous-même la biomasse, nous n’hésitons plus à chauffer tout le château. Encore une fois, cela représente un gain de confort mais n’est possible que parce que je suis agriculteur », conclut-il.

J.V.

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