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Visite du Cra-W à Libramont : entre pommes de terre et Blanc Bleu mixte, les recherches sont nombreuses!

Quand on parle du Centre wallon de recherches agronomiques (Cra-w), on l’associe directement à la ville de Gembloux. Si les chercheurs sont effectivement en majorité établis à Gembloux, le centre est également implanté à Libramont, et dans une moindre mesure à Mussy-la-Ville. Une récente visite du ministre wallon de l’Agriculture, René Collin, sur le site de Libramont a permis de mettre en exergue les recherches effectuées là-bas.

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Le ministre a donc eu la chance de visiter les laboratoires, les serres et les étables du Cra-w à Libramont, tandis que les différents chercheurs lui présentaient leurs projets en cours.

Au niveau des pommes de terre, les recherches portent principalement sur la lutte contre le mildiou. Que ce soit via des approches innovantes au sein des laboratoires ou bien grâce à la génétique et la création de variétés plus résistantes dans les serres, l’objectif est de réduire l’utilisation de fongicides. Notre dossier « pommes de terre » ayant déjà largement abordé le sujet il y a quelques semaines (voir Le Sillon Belge nº3804 du 16 février), cet article ne s’attarde pas là-dessus.

Station météo et avertissement agricole

Plusieurs stations météorologiques sont également utilisées dans le but d’améliorer les avertissements agricoles. En effet, en fonction des régions, voire des intempéries très locales, les actions à réaliser aux champs seront différentes ou différées dans le temps. Les avertissements actuellement proposés sont donc optimaux pour les agriculteurs qui ont la chance d’avoir leurs parcelles près d’une station, mais pas nécessairement pour les autres. L’amélioration et l’augmentation du nombre de ces stations météorologiques sont donc une priorité pour fournir des avertissements agricoles plus précis et adaptés au plus grand nombre.

Le futur de l’élevage bovin dépend de la capacité du secteur à conduire des systèmes de production adaptés aux conditions locales, rentables et en phase avec les attentes sociétales. C’est dans cette optique qu’un projet étudiant la possibilité de conduire un troupeau allaitant de race Blanc Bleu mixte avec engraissement des mâles en agriculture biologique s’est lancé à Libramont.

En effet, les systèmes en reconversion ne peuvent mobiliser la race Blanc Bleu Belge vu le seuil maximal de 20 % de césarienne imposé par le cahier des charges. En plus de cette problématique, le projet étudie le choix du type de produit viandeux à mettre sur le marché en veillant à valoriser les ressources produites sur l’exploitation et à proposer un produit différencié. Les aspects environnementaux font également l’objet d’une étude particulière.

Du BB mixte en agriculture biologique

Le pourcentage moyen de césarienne entre 2011 et 2017 ayant été de 21 %, la Blanc Bleu mixte semble bel et bien compatible avec une conduite en troupeau allaitant en agriculture biologique. L’autonomie alimentaire était de plus totale pour les vaches qui recevaient des ensilages d’herbe en période hivernale et de l’herbe au pâturage en période estivale. Ces résultats confirment donc que cette race atteint de bonnes performances en ne consommant que des ressources non valorisables par l’homme, à l’opposé du porc ou du poulet.

La valorisation du pâturage par les taurillons et l’utilisation des céréales produites sur l’exploitation dans les rations de finition, à raison de 65 %, ont permis d’atteindre des performances de croissance jusqu’à plus d’un kilo par jour avec des rendements à l’abattage de l’ordre de 65 %. La viande de ces taurillons est assez maigre et présente une qualité comparable à celle des taurillons Limousins.

René Collin s’est d’ailleurs prêté en fin de visite au jeu de la dégustation à l’aveugle. Des trois morceaux de viande qui lui étaient présentés, il a dû déterminer lequel lui semblait différent des deux autres, avant de le caractériser. Après avoir réussi à isoler le morceau unique et l’avoir qualifié de « plus tendre et plus juteux », le ministre a appris qu’il s’agissait de taurillon BB mixte élevé au Cra-w contre deux morceaux de taurillon Limousin bio provenant du commerce.

Experts en analyse spectroscopique

Les chercheurs ont également mis en évidence leur expertise en analyse spectroscopique des fourrages et des aliments du bétail, particulièrement grâce à la spectrométrie dans le proche infrarouge. Le principe de la méthode repose sur l’absorption, par les différents constituants de la matière organique, d’énergie transmise par un faisceau lumineux infrarouge. L’analyse ainsi réalisée constitue un outil essentiel d’aide au rationnement, en permettant de définir la valeur nutritive des aliments. Les recherches actuelles s’orientent vers l’emploi d’appareils de mesure portables, directement utilisables à la ferme.

Les éleveurs manquant de référence pour l’élevage bovin en agriculture biologique, des inquiétudes apparaissent concernant les performances animales et celles des différents mélanges prairiaux, en relation avec la qualité des prairies et les pratiques des éleveurs.

Une étude portant sur les relations entre croissance des génisses au pâturage, pression parasitaire et pratique des éleveurs a cependant mis en évidence qu’il est possible de concilier performances animales et réduction de l’utilisation de vermifuge en adaptant la densité animale et en adoptant la conduite d’un pâturage tournant. Par ailleurs, les fermes du réseau d’étude les plus efficientes économiquement quant à l’alimentation disposent d’une autonomie alimentaire élevée, allant pour certaines jusqu’à 100 %.

L’impact environnemental étudié

Enfin, le thème de l’environnement et de l’impact de l’agriculture sur celui-ci étant régulièrement abordé, des études du Cra-w portent bien entendu sur le sujet. Le projet « Bioecosys », par exemple, met en lien les services écosystémiques rendus par les prairies avec les modes de gestion appliqués par l’agriculteur.

Les premiers résultats confirment l’influence de la gestion sur la proportion de légumineuses présente dans le mélange herbacé. Or, celles-ci contribuent positivement à la digestibilité et la valeur nutritive du fourrage, à la fertilité des sols, à la séquestration du carbone, et à la fourniture de ressources alimentaires pour les pollinisateurs.

Une gestion modérée de la prairie avec des intrants organiques semble donc être un atout dans le renforcement des services de régulation tout en maintenant un service de production fourragère d’une qualité satisfaisante pour les vaches allaitantes.

Liens entre la météo et les émissions de l’élevage

L’élevage est également, on le sait, fortement critiqué pour ses émissions de gaz à effet de serre, d’ammoniac, et autres. Depuis une dizaine d’années, ces différents aspects sont étudiés au niveau des animaux et des engrais de ferme.

La ration proposée aux animaux et la gestion des matières organiques peuvent ainsi influencer fortement les émissions de gaz à effet de serre. Celles-ci peuvent augmenter de 5 à 15 fois en fonction du type d’étable et de fumier. Ces émissions, lors du stockage des engrais de ferme, peuvent également doubler lorsque les conditions météorologiques sont favorables.

Par ailleurs, un lien étroit a été observé entre les pertes de potassium via les jus s’écoulant des tas de fumier et les précipitations. Si ces jus d’écoulement ne sont pas récoltés, cela conduit à une perte économique pour l’exploitant et à une pression accrue sur l’environnement. Les données de référence produites fournissent donc des informations précieuses pour aider les agriculteurs dans leur prise de décision et contribuent à assurer la durabilité de l’élevage à la fois du point de vue de l’agriculteur et du citoyen.

Au vu des nombreux projets portés dans ces bâtiments, que plus personne n’ose l’oublier : le cra-w, c’est aussi Libramont !

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