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Bovins en voie de disparition?

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Avec un cheptel évalué à 6,98 millions de têtes, les dernières statistiques montrent que nos voisins français ont perdu 800.000 vaches depuis 2016. Et la barre du million devrait être franchie cette année. Des chiffres qui nous rappellent, toutes proportions gardées, une triste réalité observée également en Belgique. Ainsi, Statbel, l’Office belge de statistique, nous remémore chaque année que le nombre de bovins est en baisse dans notre pays depuis 1990 déjà.

En 2021, on recensait ainsi 2.310.442 bovins à travers notre territoire (1.051.559 en Wallonie et 1.258.883 en Flandre) contre 3.248.780 têtes en 1990 (1.466.874 au Sud et 1.716.286 au Nord). En l’espace de 30 ans, la chute s’élève à près de… 30 % ! Et ce, alors que les bovins sont essentiels à l’économie agricole belge en raison de leur double valorisation : viandeuse, d’une part, et laitière, d’autre part.

Comment expliquer une telle situation ? D’une part, la population agricole, et a fortiori d’éleveurs, est vieillissante. Certains agriculteurs en fin de carrière abandonnent les spéculations animales, plus énergivores et chronophages, tandis que d’autres, ne trouvant aucun repreneur, voient leurs élevages disparaître. Certes, la taille moyenne des troupeaux augmente, mais ces deux phénomènes ont une influence nette et tirent les statistiques nationales à la baisse.

Au-delà de ces constats, les secteurs viandeux et laitiers ont connu, ces dernières années, de nombreuses crises. Coûts de production en hausse et prix d’achat en baisse ont mis plus d’une trésorerie en difficulté. Encore une fois, cela a poussé plusieurs éleveurs vers la sortie… Quant aux jeunes, cela ne les encourage guère à rejoindre ces filières.

Le changement de comportement du consommateur, dicté par son portefeuille et ses convictions, vient compliquer la situation. En effet, la part du budget des ménages alloués à l’alimentation diminue. Les beaux morceaux (steaks, rôtis…) trouvent plus difficilement preneurs tandis que la volaille, considérée par beaucoup comme étant moins coûteuse, est au centre de plus d’un repas. Côté convictions, on observe que le flexitarisme et le végétarianisme gagnent du terrain. In fine, le recul des ventes observé en magasin se répercute sur l’ensemble de la filière et, par conséquent, sur les éleveurs qui en constituent le dernier maillon.

De là à dire que nos bovins sont en voie de disparition, il n’y a qu’un pas… que nous ne franchirons pas. Toutefois, nombreux sont les éleveurs à voir leur avenir d’un œil sombre… et à se demander s’ils ne sont pas eux-mêmes sur le point d’appartenir au passé. Une question légitime, qui doit alerter nos autorités, pourtant habituées à se dire « à l’écoute et attentives à l’évolution de nos filières agricoles ».

Demain, lorsque nos produits laitiers seront façonnés à partir de lait étranger tandis que nos steaks proviendront d’un pays du Mercosur, il sera trop tard pour se retourner et agir. Nombreux sont cependant ceux qui ignorent la réalité du terrain ou, pire, se voilent la face. C’est pourtant maintenant qu’il convient de prendre les décisions qui s’imposent pour soutenir un pan crucial de notre économie agricole mais aussi les éleveurs qui, chaque jour, exercent leur métier avec passion et conviction.

J. Vandegoor

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