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Dossier boiteries : rencontre avec Yves Lorcic, expert en pédicure bovine, à la pointe dans son métier

Yves Loric fait partie des rares pédicures pour bovins présents en Wallonie. Un métier exigeant et très demandé ces dernières années puisque de plus en plus d’éleveurs prennent conscience de l’importance de prendre soin des pieds de leurs animaux. Nous avons suivi ce professionnel à Silly, à la ferme du Sart, où il a analysé et soigné les sabots d’une cinquantaine de vaches de race Normande.

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Sans trop stresser, les Normandes de l’élevage du Sart attendent leur tour. Placées en file indienne, elles grimpent une à une dans l’impressionnante machine d’Yves Loric. Une fois mise dans la cage de contention hydraulique, la vache est soulevée par des sangles. En quelques secondes, le bovin est en lévitation. Le pareur attache alors les pieds, les passe au jet d’eau, et c’est parti, le travail peut commencer.

Sabot après sabot, le pédicure pare l’excès de corne, analyse le tout, et au besoin réalise un soin adapté au type de pathologie. En voilà justement une qui présente un ulcère au sabot. Directement, le pareur lui pose une talonnette afin de la soulager dans ses déplacements, puis applique un pansement.

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Une fois les sabots traités, le bovin peut redescendre et aller rejoindre le reste du troupeau dans lequel se trouvent d’autres animaux avec un pansement rouge autour du pied. « Ici, c’est un troupeau sain », explique le professionnel. « Selon mes statistiques annuelles, une vache sur deux nécessite un soin et une sur dix la pose d’une talonnette ». Et pour nous communiquer ces chiffres, Yves Loric peut s’appuyer sur son expérience riche des nombreux bovins qu’il traite chaque année : entre 12 et 13.000. « À la ferme du Sart, c’est une petite journée. Je ne me déplace jamais pour moins de 50 bêtes, et, grâce à mon équipement, je peux m’occuper de 150 vaches par jour ».

Cet équipement, fabriqué au Danemark, vaut environ 50.000 €. Mais ce prix en vaut la chandelle puisqu’avec cette cage, le pédicure peut se permettre d’avoir un débit de chantier élevé, et de travailler en toute sécurité. « Je n’ai jamais eu d’accident grave. Juste un coup de patte, à cause d’une corde cassée. Je suis d’ailleurs conscient que cela pourrait encore m’arriver, c’est toujours le risque lorsqu’on exerce un métier dans lequel on manipule des animaux. L’autre avantage de cette machine est qu’elle préserve mon dos. Comme les bêtes sont en hauteur, je ne suis pas plié en deux toute la journée, comme le sont, par exemple, les maréchaux-ferrants », confie-il.

Cette cage, à la pointe de la technologie, présente aussi l’avantage d’offrir une vue détaillée de la santé des pieds des animaux. En effet, après chaque passage, le pareur enregistre soigneusement sur un écran les soins prodigués, ses observations ou encore la gravité des lésions. « Cela me permet de voir si les traitements réalisés ont été efficaces lorsque je reviens dans l’exploitation. Puis, les éleveurs sont très heureux d’obtenir, à la fin de mon passage, ce panorama de leur ferme. Comme je le dis souvent, les pieds des bovins sont un livre ouvert. On détecte beaucoup de choses sur la conduite de l’élevage en voyant leur état… ».

Et tandis qu’Yves Loric prend soin des dernières vaches du troupeau, on constate que la majorité d’entre elles présente des problèmes aux postérieurs… « Oui, ils sont plus sensibles. Avec les excréments, ils sont davantage souillés que les antérieurs. De plus, la répartition de la masse de la vache n’est pas équivalente : il y a 60 % du poids à l’avant et 40 % sur les postérieurs. Par conséquent, la corne des antérieurs s’use mieux ».

L’ensemble du cheptel passé entre ses mains expertes, le travail d’Yves Loric est, à présent, terminé. Pour bénéficier de ses services, les propriétaires de l’exploitation devront débourser, en moyenne, 15  € par bovin, un prix variable en fonction du traitement administré. « Les éleveurs savent que cela vaut la peine puisqu’une boiterie sévère peut provoquer plus de 300 € de perte financière ».

L’importance de la prévention

Ainsi, l’agenda du pédicure ne désemplit pas, avec des demandes qui viennent des quatre coins de la Wallonie. « C’est réellement un job à temps plein. De septembre à juin, je suis complet. Il m’arrive même de devoir refuser des clients... Et n’y a qu’en été où, sans mauvais jeu de mots, je peux me permettre de lever le pied », sourit-il.

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Par ailleurs, ce pédicure fait face à une demande croissante ces dernières années puisque, d’après lui, les boiteries sont le problème numéro 1 dans les élevages laitiers. « Avant, les éleveurs faisaient principalement appel à leur vétérinaire quand il y avait un souci. Dans ce cas, il n’y a que la vache boiteuse qui bénéfice d’un traitement. À présent, les exploitants ont compris l’importance de faire de la prévention dans leur troupeau avec le passage d’un spécialiste ».

Au niveau du nombre de parage nécessaire, cet expert en préconise deux à trois par an, histoire d’avoir un élevage bien dans ses baskets.

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