Réutiliser les bunkers ? C’est du bon sens paysan !
Les exemples de bunkers situés dans les bois ou en lisière de forêt, réaménagés pour servir d’abris d’hibernation aux chauves-souris, sont bien connus. Mais les vestiges en béton laissés par la guerre dans nos régions trouvent aussi d’autres formes d’utilisation. « L’usage le plus courant des bunkers en zone agricole est le stockage, ou, pour les exemplaires plus grands, l’abri pour les animaux », explique Hannelore Decoodt, chercheuse à l’Agence du Patrimoine immobilier.
Wim Tuyteleers a participé à l’inventaire de la ligne KW, une fortification de plus de 400 bunkers entre Koningshooikt et Wavre, destinée à protéger la Belgique d’une invasion allemande à la fin des années 30. Lors de l’inventaire, plusieurs propriétaires lui ont raconté que leur bunker avait autrefois servi de réserve à pommes de terre. « Lorsque les bunkers ont été construits, toute la région entre Lierre et Wavre était encore assez rurale, et démolir les bunkers aurait été très coûteux. »
Les agriculteurs ont rapidement compris que, grâce à leurs épais murs, la température à l’intérieur des bunkers restait relativement basse et stable. Ils pouvaient donc facilement servir de lieu de stockage pour les pommes de terre. « Lorsque nous avons réalisé l’inventaire en 2008, plus aucun bunker n’était encore utilisé de cette manière. Cela me semble donc être une pratique typique des années 1950, 1960 et 1970, à une époque où les installations de réfrigération modernes n’étaient pas encore courantes. »
Un abri pour animaux
M. Tuyteleers se souvient également de quelques bunkers ayant servi d’étable pour des chèvres et des cochons. De cette manière, la famille de l’éleveuse laitière Susan Mahieu a donné une nouvelle fonction au bunker de l’exploitation agricole de Hollebeke. « Les vaches qui pâturaient sur notre parcelle y trouvaient autrefois refuge, et ma mère y a même élevé des poules », raconte Susan.
Lorsque le bunker de l’éleveuse de porc Heidi Soenen se trouvait encore dans le pré derrière l’ancienne ferme carrée de ses parents, et non coincé entre la maison et quelques hangars, il servait d’abri pour un taureau. « Aujourd’hui, mes enfants y rangent leurs jouets dans le jardin. »
Selon M. Tuyteleers, l’histoire la plus spectaculaire de réutilisation par des agriculteurs est celle du fossé anti-chars à Haacht. « Dans les années 1950, le niveau d’eau pouvait y être régulé grâce au complexe d’écluses d’origine sur la Dyle. Une famille d’agriculteurs locale l’utilisait comme système d’irrigation pour ses champs, jusqu’à ce que des travaux d’endiguement coupent le fossé anti-chars de l’eau de la Dyle. »