Quand les bousiers ne font pas leur travail…
L’exemple des bousiers en Australie, non adaptés à la dégradation des bouses de bovins introduits dans le pays évoqué par Philippe Wegnez a éveillé notre curiosité. On a voulu en savoir plus… Et le moins qu’on puisse dire, c’est que l’histoire est assez étonnante et toujours d’actualité.
L’histoire commence à la fin du 18ème siècle en Australie, avec l’introduction de bovins par les colons anglais. Ce qu’on ne savait pas à l’époque, c’est que les bousiers présents en Australie – environ 500 espèces- étaient spécialisés dans la digestion des excréments secs et fibreux des marsupiaux. Ils n’étaient pas adaptés à la destruction des bouses bovines, riches en eau, et avec un pH et des odeurs différentes des bouses des marsupiaux présents sur ce continent.
Cela n’avait guère d’importance au début, dans ce pays si vaste où les pâtures ne manquaient pas. Mais le cheptel s’est développé au fil des siècles pour atteindre dans les années 1960 les 30 millions de têtes, produisant quelque 40 millions de tonnes d’excréments par an. En l’absence de bousiers efficaces, les bouses mettaient de 2 à 7 ans selon les endroits pour disparaître. En cumulé, les bouses couvraient chaque année 10.000 km² de près. Quand les bouses finissaient enfin par disparaître, les plantes à haute valeur nutritive qu’elles avaient recouvertes laissaient place à des graminées moins appétentes que le bétail ne consommait pas.
Les éleveurs élargissaient leurs pâtures vers des zones plus arides, réduisant ainsi l’espace réservé à la faune sauvage. Mais ce n’était pas l’unique souci car ces bouses non dégradées ont aussi permis le développement de milliards de mouches préjudiciables au bétail et aux hommes dans le sud de l’Australie. C’était devenu un réel problème environnemental et économique.
Les autorités australiennes ont donc réagi en décidant d’introduire – à grand frais- des bousiers spécifiques à la dégradation des bouses bovines. Durant ces dernières décennies, des bousiers ont été importés, avec toutes les précautions d’usage pour ne pas introduire de nouveaux parasites ou maladies du bétail, de France, d’Afrique du Sud et plus récemment du Maroc.
Plusieurs espèces de bousiers non indigènes participent désormais à la dégradation des excréments bovins dans le sud de l’Australie et en conséquence, à la lutte contre la multiplication des mouches car ils perturbent leur ponte, assèchent les matières fécales et recyclent les bouses, privant ainsi les mouches de leur nourriture. La solution semble bien fonctionner même s’il a fallu des années pour trouver les espèces adéquates agissant t’en été mais aussi au printemps.