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Désherbage betterave: du traitement classique au combiné, quelques conseils de l’Irbab

Lors de ses réunions techniques, l’Irbab a consacré une partie de son exposé au désherbage des betteraves. Un petit rappel des possibilités en la matière qui vient à point en cette saison.

Temps de lecture : 8 min

Pour introduire son exposé, André Wauters rappelle l’un des principes de base du désherbage des betteraves : démarrer tôt et garder le rythme. « Si on veut éviter de se retrouver avec plus d’adventices que de betteraves, il ne faut pas attendre le stade 4 feuilles pour intervenir ! ».

 

Limiter la concurrence et l’effet sur le rendement

Les adventices dont il faut le plus se prémunir sont les chénopodes qui peuvent rapidement devenir dominants et sont très gênants de part leur forte concurrence. L’arroche est devenue compliquée à combattre du fait de la disparition de certaines matières actives. On peut également citer la mercuriale, l’aethusa, la petite ciguë, la matricaire, les crucifères, les renouées… qui peuvent toutes avoir un effet plus ou moins fort sur le rendement et sont donc importantes à reconnaître et à éliminer.

Le système FAR, la base

Le système FAR est pratiqué depuis les années ‘80 et basé sur une combinaison de produits. Aux prémices, il s’agissait d’une combinaison de 3 l de phenmédiphame (Betanal 160) et 2 l d’ethofumesate (Tramat 200) au stade 2-4 feuilles des betteraves, répétée une seconde fois si cela s’avérait nécessaire. « Les doses pratiquées étaient importantes et choquaient les betteraves. À la suite d’expérimentations mises en place par les agriculteurs eux mêmes et relayées par les instituts betteraviers, ce système a été adapté a des procédés plus simples dans les années ‘90. Le traitement de base s’est alors résumé à : 0,5 l de Betanal ; 0,5 l de Tramat, 0,5 l d’huile et 0,5 l de Goltix (métamitrone), (le Tramat étant dosé à l’époque à 200gr/l et non pas 500g/l comme actuellement). « Cette combinaison est rapidement devenue le système de base en Europe ».

S’en sont suivis quelques petits changements et ajouts de produits avec, notamment, la disparition en 2006 de la formulation EC du Betanal et un réajustement de la dose à 0,6-0,7 l, ainsi qu’un passage au Tramat 500 et donc une diminution à 0,2 l. C’est également l’époque des restrictions d’utilisation par ha à maximum 6l pour le Betanal et maximum 2l /3 ans pour le Tramat.

« Ce système fonctionne très bien en conditions optimales mais en sécheresse et humidité relative faibles cela s’avère un peu plus compliqué. On peut alors augmenter l’huile (0,5-1 l) et le Betanal (0,8-1l), sans toucher aux autres composants du traitement ».

On utilisera en général le FAR pour les 2 à 3 premiers traitements en démarrant 2 à 3 semaines après le semis dès l’apparition des premières adventices. On compte 6 à 8 jours entre chaque traitement. « Il faut garder la pression sur les adventices pour qu’elles ne reprennent pas trop vite ».

Évidemment, on peut aussi ajouter d’autres matières actives utiles en fonction des adventices présentes dans la parcelle. On peut notamment citer des substances de contact telles que :

– triflusulfuron-methyl (Safari), contre les crucifères (sené, ravenelle, colza) et les renouées oiseaux, l’aethusa ou la matricaire mais pas avant 70 % de levées ;

– clopryralid (Matrigon), contre la pomme de terre, la chicorée, le laiteron et l’aethusa (2 feuilles), à température élevée et temps poussant.

Des produits racinaires peuvent aussi être ajoutés :

– lenacile (Venzar), contre l’arroche et la renouée liseron mais jamais avec clomazone, à 100 g max et de préférence en T2 ;

– clomazone (Centium), contre la renouée liseron, la morelle. Il peut y avoir du blanchissement mais sans conséquence à long terme et attention à la sélectivité sur sols légers. Il n’est pas recommandé d’utiliser cette substance si la levée est échelonnée et jamais avec lenacile. À 2 feuilles, maximum 35 cc. Le produit peut être combiné avec Goltix (à maximum 700g car plus il y en a moins le Centium agit ) ou, contre mercuriale, à Frontier Elite.

– quinmerac agira contre les ombellifères (aethusa). Elle peut être associée au metamitron en remplacement du Goltix avec Kezuro (0,9l) au FAR 2, ou au dimethenamid-P avec Tanaris (0,3l) au FAR 2. Ce produit a besoin d’eau, sans elle, son action est limitée.

Un autre facteur de réussite des traitements -encore plus quand l’humidité du sol est faible- est leur réalisation par hygrométrie élevée.

Et si le Betanal disparaît ?

Malheureusement, de nombreuses substances actives font désormais l’objet d’une révision. Parmi celles-ci, deux matières actives importantes à la base du désherbage betteraves sont visées : le phenmédiphame (Betanal Se, autorisé jusqu’au 31 juillet 2023) et le triflusulfuron-methyl (Safari, autorisé jusqu’au 31 décembre 2023). Par ailleurs, d’autres matières actives qu’on retrouve dans les eaux posent également problème au niveau de leur utilisation et font aussi l’objet de révision ou de débats quant à d’éventuelles restrictions d’utilisation : lenacil (Venzar- autorisé jusqu’au 31 décembre 2023), s-metolachloor (DualGold- autorisé jusqu’au 31 juillet 2023) et dimethenamide-P (Frontier Elite- autorisé jusqu’au 31 août 2034).

Afin d’envisager des alternatives à la suppression de ces matières, des programmes sans phenmédiphame et des solutions avec quinmerac (Kezuro ou Tanaris en post-émergence) en éventuelle combinaison avec clomazone (Centium, en pré- ou post-émergence) ont été testés.

Pour conclure la partie traitement, André Wauters précise également que dans le schéma classique, la pré-emergence n’est pas toujours utile : « il est parfois mieux de déplacer des produits dont l’utilisation est limitée de la pré vers la post ». En 2023, des protocoles sans phenmédiphame (Betanal) et sans triflusulfuron methyl (Safari )seront à nouveau testés. « On étudiera aussi la possibilité de diminuer l’usage d’herbicides se retrouvant dans les captages d’eau, dont s-metolachloor (Dual gold) et dimethenamide-p (Frontier Elite), voire même de les substituer ».

 

Le système Conviso One : intervenir au beau moment

Conviso One est un autre système de désherbage uniquement utilisable sur des variétés Smart Conviso et non sélectif pour les autres variétés présentes au catalogue. Le potentiel de rendement des variétés Conviso se situe entre 83 et 93 % du potentiel de rendement des variétés classiques. Le traitement est basé sur 2 x 0,5 l de Conviso One associés à des partenaires et de l’huile.

En premier traitement (T2), on agit avec 0,5l de Conviso One avec 1 l/ha de Betanal, 0,25 l/ha de Tramat et 0,5l/ha d’huile. Si le temps est sec, on portera le Betanal à 2 l/ha et l’huile à 1 l/ha sans modifier les autres dosages. On intervient quand le chénopode, l’arroche ou la véronique possède 2 feuilles en respectant 20 m de zone tampon et avec des jets à 90 % de réduction de dérive. « Si on arrive trop tôt ça ne sert à rien mais aussi ne pas attendre trop tard sinon on va vers la catastrophe. On intervient environ une semaine plus tard qu’en FAR ».

En T2, 10 à 21 jours après le T1, avec une betterave à 6 feuilles, le dosage dépendra de la présence ou non de nouvelles levées. Dans le négatif, la combinaison 0,5 l/ ha de Conviso One – 0,5 l/ha de Frontier et 0,5 l/ha d’huile est recommandée. Si l’on observe de nouvelles levées, on interviendra toujours au stade 2 feuilles de l’adventice et on tablera sur 0,5 l/ha de Conviso One- 0,5 l/ha de Frontier -1 (à 2)l/ha de Betanal- 0,25 l/ha de Tramat et 0,5 (à 1) l/ha d’huile.

Le Conviso a une action lente, il faut donc un peu de patience pour voir son effet et s’habituer à ce nouveau mode.

Le Conviso One peut être mélangé à un insecticide si nécessaire. Enfin, il est conseillé de faire attention quand du lin ou de la pomme de terre suivent dans la rotation en travail du sol simplifié.

Un travail avec bineuse nécessite un sol bien ressuyé  et une période sans pluie d’au moins 48h.
Un travail avec bineuse nécessite un sol bien ressuyé et une période sans pluie d’au moins 48h. - Irbab

Le désherbage combiné

Le désherbage mécanique ne doit pas être envisagé comme un rattrapage quand le reste n’a pas fonctionné. Il doit être programmé dès le départ dans le schéma de désherbage et doit permettre d’alléger le désherbage chimique.

Ce type de désherbage est plus difficile à mettre en œuvre au stade jeune de la culture car les betteraves sont très petites. « Les outils fonctionnant avec caméra ne peuvent pas agir et il est pratiquement impossible de désherber mécaniquement autour d’une betterave dans le rang à un stade jeune. À cette période, on préconise donc une pulvérisation généralisée ou sur le rang ».

Plusieurs paramètres sont à prendre en compte quand on envisage le désherbage mécanique. Il est évidemment dépendant de la météo. Les passages sont certainement plus nombreux que dans un système chimique classique du fait de la moindre largeur de l’outil et des actions à répéter rapidement. Enfin, inclure un système mécanique demande d’avoir des terres prêtes à le recevoir, c’est-à-dire planes, rappuyées et sans grosses mottes.

Bineuse ou herse étrille ?

Un travail avec bineuse nécessite un sol bien ressuyé et une période sans pluie d’au moins 48h après le passage afin d’éviter un réensemencement. L’outil est efficace sur petites adventices, au-delà de 4 feuilles cela devient plus problématique. Il ne faut pas biner plus profond que nécessaire au risque de remonter les semences et entraîner de nouvelles levées. Des moulinets peuvent être envisagés pour le travail sur le rang mais ne sont pas efficaces si les adventices sont trop grandes.

La herse étrille ne peut être utilisée avant le stade 4 feuilles des betteraves. Il est souvent possible de régler l’agressivité des machines. L’outil est uniquement efficace au stade « filament » des adventices. Comme pour la bineuse, il faut veiller à travailler à une juste profondeur.

L’utilisation de ces outils peut être envisagée en remplacement d’un passage FAR mais « nous recommandons de conserver les 2 premiers passages FAR et de toujours utiliser un herbicide racinaire en fin de cycle ». « On peut aussi envisager des systèmes avec de la pulvérisation continue sur le rang et du binage en interrang.

Pour conclure, André Wauters rappelle que pour les traitements, des zones tampons sont à respecter selon le type de zone sensible (masses d’eau, fossés,.) ainsi que selon les techniques de pulvérisations et produits utilisés. Il est important de le vérifier, via l’étiquette des produits et/ou fytoweb ou Protect’eau, la réglementation liée au produit et/ou la situation de la parcelle.

Propos recueillis par D. Jaunard

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