Quelle est la rentabilité des céréales en Ardenne?
La récolte des céréales s’est clôturée voici peu. C’est donc l’occasion de faire le point sur leur rentabilité économique en Ardenne ainsi que sur les possibilités se présentant aux agriculteurs pour l’améliorer.

Le Gal Haute Sûre Forêt d’Anlier et le Centre de Michamps se sont alliés pour évaluer la rentabilité des principales cultures présentes sur le territoire du parc naturel (Neufchâteau, Léglise, Martelange, Habay, Fauvillers, Vaux-sur-Sûre et Bastogne). Pour constituer ce faire, près de 200 parcelles d’épeautre, de froment d’hiver, d’escourgeon, d’orge de printemps, d’avoine de printemps mais aussi de colza ont été suivies de 2016 à 2020, tant en agriculture conventionnelle que biologique.
La répartition des coûts et bénéfices pour chaque culture a été détaillée et les deux partenaires mettent en évidence quelques leviers pour améliorer leur rentabilité. Voici un résumé de leur travail.
Épeautre : des bénéfices de 650 €/ha, en moyenne
L’épeautre est la céréale la plus répandue en Ardenne de par sa bonne résistance aux conditions climatiques de la région. Les variétés les plus rencontrées lors de ce suivi sont Cosmos, Zollernspelz, Sérénité et Vif.
La fertilisation azotée recommandée oscille de 105 à 120 uN/ha, en deux fractions (tallage et redressement). L’étude a pu mettre en évidence que seuls 27 % des parcelles suivies ont reçu la fertilisation conseillée de 120 uN/ha ou moins.
En termes de protection phytosanitaire, elle montre que très peu d’agriculteurs font l’impasse sur le désherbage. De plus, la majorité des parcelles suivies ont reçu un fongicide et un régulateur.
Le rendement est 7,1 t/ha toutes variétés confondues pour la période de suivi de 2016 à 2020. En itinéraire bio, il atteint 5 t/ha, en moyenne.
Les frais moyens (fertilisation, pulvérisations, achat des semences, semis et récolte) s'élèvent en moyenne à 923 €/ha. C’est la fertilisation qui occupe la première place des dépenses, suivie des protections phytosanitaires. Les prix de vente étant assez intéressants, les bénéfices dégagés ont été en moyenne de 650 €/ha (hors paille) sur la période du suivi.
Froment d’hiver : la protection en tête des frais
Les variétés de froment d’hiver rencontrées sur le territoire du GAL sont plus diverses, avec notamment Graham, Diderot, Anapolis et Chevignon.
La fertilisation recommandée est de 185 uN/ha, en deux ou trois fractions, pour un rendement moyen, dans les parcelles conventionnelles suivies, de 7,8 t/ha.
Du côté de la protection phytosanitaire, l’apport d’herbicide a été systématique. Les régulateurs sont, quant à eux, moins fréquemment appliqués. La protection fongicide est courante : dans le cadre de cette étude, plus de la moitié des parcelles ont été traitées deux fois.
La sensibilité du froment d’hiver aux maladies fongiques se traduit dans les coûts : la protection phytosanitaire en occupe la première place (plus de 300 €/ha). La fertilisation arrive deuxième, avec 290 €/ha. Les frais totaux moyens s’élèvent à 1.030 €/ha. Avec un prix de vente moyen de 180 €/t, on peut dégager un bénéfice moyen d’un peu plus de 330 €/ha (hors paille).
Escourgeon : la fertilisation, premier poste des dépenses
L’escourgeon est la deuxième céréale la plus cultivée sur le territoire du GAL. Son cycle de végétation court permet l’implantation d’une culture d’hiver à semis précoce comme un colza ou une prairie. Les variétés rencontrées ici sont Quadriga, Smooth, Wootan et Galiléo.
160 uN/ha apportés en deux ou trois fractions sont préconisés pour l’escourgeon. Au sein des parcelles suivies, ce sont celles ayant reçu entre 150 et 200 uN/ha qui obtiennent les meilleurs rendements avec un peu plus de 7 t/ha.
Encore une fois, c’est la fertilisation qui occupe la première place des coûts (245 €/ha en moyenne). Suivent les traitements phytosanitaires, s’élevant à 210 €/ha. L’escourgeon a généré des frais totaux de 850 €/ha en moyenne, pour un bénéfice moyen de 370 €/ha en conventionnel sur la période de suivi.
Orge de printemps : un peu plus de 6 t/ha
Du côté de l’orge de printemps, Planet, Lauréate, Crescendo ou encore Odyssey sont les variétés rencontrées.
Une fertilisation de 80 à 100 uN/ha en deux fractions est conseillée. Les régulateurs ne sont pas nécessaires: la paille est plus courte qu’en orge d’hiver. Les céréales de printemps étant sensibles aux viroses transmises par les pucerons, le recours à un insecticide est recommandé.
Cette étude révèle qu’en moyenne, l’orge de printemps atteint un rendement 6,3 t/ha sur les quatre années de suivi. Les frais totaux se sont élevés à 820 €/ha avec les coûts de fertilisation en tête. Les bénéfices ont atteint 160 €/ha en moyenne.
Avoine de printemps : des rendements très variables
C’est l’avoine de printemps qui a été suivie dans cette étude, les variétés d’hiver étant peu recommandées en Ardenne en raison de leur sensibilité au gel. Lors des quatre années de suivi, les rendements ont été très variables, allant de 3 à 8 t/ha.
Point de vue fertilisation, il est recommandé d’apporter à la culture de 80 à 120 uN/ha en deux fractions. L’avoine ne reçoit généralement pas de protection phytosanitaire de par sa rusticité.
Avec son prix de vente de 150 €/t en moyenne sur la période de suivi, un bénéfice de 340 €/ha a pu être dégagé en conventionnel.
Bénéfices et fertilisation sont étroitement liés
Parmi les céréales suivies, c’est l’épeautre qui s’avère être la plus intéressante financièrement en Ardenne. En effet, cette culture est très adaptée aux conditions pédoclimatiques rencontrées.
L’étude met également en évidence l’importance d’une fertilisation raisonnée. Pour la majorité des céréales suivies, les engrais constituent le premier poste de dépense. Les bénéfices sont donc totalement dépendants du niveau de fertilisation apporté. Suivre la fertilisation conseillée permet donc d’atteindre un équilibre entre bon rendement et bénéfice intéressant.
Les résultats détaillés de cette étude sont compilés dans une brochure disponible en ligne sur le site du Parc naturel Haute Sûre Forêt d’Anlier (https://parcnaturel.be, rubrique « Le Parc », « Publications »), ainsi qu’en version papier auprès du Centre de Michamps (info@centredemichamps.be).