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Les robots en bio: «L’investissement semble raisonnable, surtout quand la main-d’œuvre est hors de prix»

Présente en agriculture depuis plus de 20 ans, la robotisation a permis à de nombreux producteurs laitiers de s’affranchir de la lourde contrainte des traites quotidiennes. Aujourd’hui, les robots font leur entrée dans les exploitations agricoles biologiques en manque de main-d’œuvre pour le désherbage manuel. Deux utilisateurs « bio », Jean Baivy et Guillaume Fastré, en témoignent.

Temps de lecture : 4 min

À Awagne (Dinant), aux Jardins du Frech-try, Jean Baivy cultive un grand nombre de légumes tels que des oignons, carottes, panais, poireaux et scorsonères qu’il commercialise en vente directe. Depuis trois saisons, le robot Oz, développé par la société Naïo, a pris place dans son exploitation.

Quelle était votre motivation, lors de l’acquisition de ce robot ?

En maraîchage, le désherbage s’effectue manuellement et fait souvent appel à du personnel supplémentaire pour éviter que l’on soit débordé par les mauvaises herbes. Nous avons dû constater que cela devenait impossible de recruter du personnel, et l’opportunité d’essayer un robot Oz est arrivée au bon moment pour envisager une autre solution de désherbage.

Mon exploitation s’y prêtait bien, avec des parcelles rectilignes, des interlignes de 60 cm et en plein champ. Malgré cela les débuts furent un peu angoissants…

Comment se sont passés vos premiers pas avec ce nouvel outil ?

Je me suis rapidement rendu compte que la programmation était très simple et que la précision de travail était constante tout au long de l’année. Le stress du démarrage a vite été oublié.

À l’aide d’une télécommande sans fil, il suffit de conduire le robot d’un point A à un point B pour définir une ligne de base. Une fois ces points géolocalisés dans le gps RTK embarqué, il faut dessiner la carte que l’on peut compléter avec les lignes à travailler ou non, renommer certains éléments…

Grâce au guidage gps RTK, Oz trouve son chemin vers la parcelle à travailler en quittant le local technique. Ensuite, il attend mon signal pour démarrer les opérations.

Pour faire démarrer le robot, je récupère la carte ad hoc sur l’écran embarqué et programme ce que je souhaite qu’il effectue : passer entre les lignes ou sur la ligne, tourner à gauche ou à droite en fin de ligne… ainsi que la vitesse et la profondeur de travail.

Au départ, nous l’avons utilisé pour tracer les lignes de semis mais avons conservé un semis manuel. Alors que le robot aurait pu s’en charger… Toujours l’angoisse de l’inconnu, peut-être ?

En ayant tracé les lignes de semis, le robot est capable de travailler le sol entre les lignes mais aussi sur celle-ci. Pour le travail sur la ligne, il faut toutefois être très attentif pour intervenir avant le verdissement et au bon stade de croissance de la culture en vue d’éviter les pertes.

Naïo a d’ailleurs développé des fiches de culture pour savoir quand passer, sans dégâts, et avec le bon outil.

Nous avons aussi apprécié l’autonomie du robot, qui lui permet de travailler 8 heures d’affilée et de développer de nouveaux itinéraires en privilégiant le préventif au curatif. Il est là et le coût ne change pas !

Quelle est votre impression après trois saisons d’utilisation ?

Je suis très content, sans doute parce que nos parcelles s’y prêtent bien vu leur dimension (50 x 25 m, interlignes de 60 cm). Le robot faisant 40 cm de largeur, il peut travailler au plus près la culture.

Le travail entre les lignes est assez simple. De nombreux outils différents sont disponibles avec des socs de binage, des versoirs d’ouverture des lignes de semis, des herses étrilles et des brosses. Cette diversité permet de sélectionner le meilleur outil en fonction du stade de croissance du légume et de la météo.

Il faut réussir à vaincre son angoisse pour lancer Oz et lui confier un travail sur la ligne, lorsque les cultures sont un peu plus développées.

Je peux considérer que le robot effectue 95 % du travail de désherbage mécanique en semis direct en carottes, panais ou scorsonères. Là, il prend tout son intérêt.

J’ai rencontré très peu de problèmes techniques. Dès que quelque chose ne fonctionne pas ou si signal RTK est perdu, le robot s’arrête et avertit l’opérateur pour qu’il intervienne afin de résoudre le problème.

Quel regard portez-vous sur la rentabilité de cet investissement ?

Le robot est un investissement conséquent. Cependant, l’économie de travail atteint 95 % par rapport au désherbage manuel. In fine, l’investissement semble raisonnable, surtout dans nos régions où la main-d’œuvre est hors de prix.

En outre, le désherbage robotisé permet de libérer du temps pour une activité valorisante.

Il est primordial d’utiliser au mieux les créneaux propices au désherbage. Même le dimanche ou un jour férié, le robot n’est ni malade, ni en congé. Il peut intervenir au bon moment et avec un travail de qualité constante.

Malgré la question de la rentabilité à long terme et de leur durée de vie, je crois donc à l’avenir des robots en maraîchage bio.

Maurice Malpas

WalDigiFarm

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