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Nos amies les bêtes

Nous ne sommes pas seuls, avec nos veaux, vaches moutons, cochons, couvées… ! Aux alentours de nos fermes, vivent toutes sortes d’animaux dits « sauvages », petits ou gros, discrets ou envahissants, banals ou surprenants. Ainsi, l’autre soir, j’ai pu observer une drôle de bestiole au pelage hirsute gris-roux, de la taille d’un gros chat. Sa longue queue était annelée, et sa tête présentait un masque de Zorro : un raton laveur ! Il s’est éloigné sans trop se presser, pas effarouché pour un sou, de sa démarche un peu pataude. Que faisait-il là, à des milliers de kilomètres de son Amérique d’origine ? Un bel animal, sans conteste ! Il paraît que son espèce est invasive, et impacte négativement nos écosystèmes. Il faut les dénoncer, les pourchasser, les éliminer. Haro sur les ratons ! Je pense plutôt qu’il faut vivre et laisser vivre nos amies les bêtes, qu’elles soient ratons laveurs, écureuils, chats sauvages, taupes, renards, sangliers, belettes, fouines, rats musqués, blaireaux, chevreuils, et toutes les autres…

Temps de lecture : 4 min

Les agriculteurs aiment les animaux. Si ce n’est pas le cas, ceux qui les détestent n’ont rien à faire dans notre métier, où il faut s’occuper des petits veaux, soigner les vaches et les cochons, tondre les moutons, relever les œufs des poules, etc. Il ne me viendrait même pas à l’idée de tuer une souris qui s’échappe d’un sac de grains. Elles sont si jolies avec leurs petits yeux en boutons de bottine ! C’est plutôt le boulot des chats, souvent nombreux et bien présents dans les exploitations agricoles ; ou du chien, quand il s’agit de rats, de fouines ou de renards trop hardis. « Mon » raton laveur finira peut-être sous les crocs du nôtre, mais il paraît que ces « raccoons » (comme disent les Anglais) sont très malins et ne manquent pas de mordant quand ils sont acculés. Comment sont-ils arrivés en Belgique ? Le chemin classique, sans aucun doute : on a voulu les élever pour leur fourrure, et certains se sont échappés. Par ailleurs, il est assez facile de les apprivoiser, paraît-il, un peu comme des chats domestiques. Leur aspect particulier attire la sympathie ; ils n’inspirent pas le dégoût comme les rats, la répulsion comme les serpents et les araignées, la crainte comme les renards, les sangliers et les loups.

Les loups ! Justement, parlons-en ! Certains spécimens sont de retour en Belgique, protégés comme un bien unique et précieux, remarquable et fragile. Ce dernier adjectif ne convient guère à ces énormes « chiens », à la mâchoire redoutable et impitoyable. Pourtant, les défenseurs de la vie sauvage y tiennent comme à la prunelle de leurs yeux. Les loups exercent une sorte de fascination ; tout un imaginaire leur est associé, qui cristallise des peurs ancestrales venues du fond des âges. C’était LE super-prédateur de nos régions, qui régnait sans partage, et régulait tout un écosystème. À côté de l’être humain, ce n’était hélas qu’un enfant de chœur, et il a disparu de nos contrées depuis plus d’un siècle, pourchassé et tué de toutes les manières possibles. Aujourd’hui, on voudrait le réintroduire. Pourquoi lui, et pas le raton laveur ? Pour nos veaux, nos moutons et chèvres, lequel des deux présente une véritable menace ? C’est toujours triste de retrouver un de nos animaux domestiques occis et dévoré par ce genre de fauve. En France, les éleveurs de moutons en font souvent l’amère expérience, avec le retour du loup et de l’ours, ce dernier dans les régions montagneuses. Comment concilier les demandes d’une société, -laquelle décrète qui est ou non indésirable –, et les réalités du monde de l’élevage ?

Cet automne, j’ai également pu observer un écureuil noir au ventre clair. Il s’agit également d’une espèce « immigrante » nord-américaine, très mignonne mais qui n’a rien à faire chez nous. Chez les insectes, les coccinelles chinoises, les abeilles brésiliennes, les fourmis pygmées et les frelons asiatiques désespèrent les entomologistes et les apiculteurs. Les ragondins sud-américains détruisent les berges des canaux ; les castors construisent des barrages et rongent les bouleaux. Sapristi ! Nos amies les bêtes ont bien compris la mondialisation ; elles se mettent au diapason des sociétés humaines et fourrent leur nez partout. Les espèces dites « invasives » ont été introduites par l’homme, sans le faire ou non exprès. Et bien tant pis, il faut laisser travailler en paix Dame Nature ! Jetez-moi des cailloux si vous voulez, mais jamais je ne dénoncerai ces « migrants » obligés, réfugiés climatiques ou déportés de force, qu’ils soient mouflon surgi de je ne sais où, écureuil de Californie échappé de sa cage, tortue de Floride devenue trop grande, ou raton laveur venu nous faire rire en Ardenne…

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