Accueil Archive

Qu’est-ce qui va changer ? Pas grand-chose…

Temps de lecture : 4 min

…, je n’ai pas rangé les questions que je me pose. « Tu comprendras plus tard ! », mais on est plus tard, et je comprends pas…

Le jour des élections, cette petite chanson naïve (de Big Flo et Oli) me trottait dans la tête, alors que j’attendais mon tour dans la file pour voter, à quelques minutes de l’instant fatal. Voter pour qui ? Pour quel programme ? En toute honnêteté, je n’en savais rien. Difficile de se faire une idée, quand les discours des uns et des autres se ressemblent, quand presque personne ne parle de l’agriculture, ou alors dans des termes ultra-simplistes et convenus. On nous prend pour des idiots, des demeurés, des enfants qu’il faut prendre par la main, tout leur expliquer, et surtout les empêcher de trop réfléchir. D’avance, on pressent l’inanité de notre démarche de bon citoyen : rien ne va réellement changer. On va demain retrouver les mêmes personnes aux postes clefs, dans des coalitions brinquebalantes où l’on va tirer à hue et à dia, vaille que vaille, durant la future législature.

Pour qui voter ? J’ai essayé le test proposé sur le site de la RTBF ; j’y ai obtenu des résultats bizarres, avec plusieurs partis pratiquement à égalité. Je serais Écolo bariolé de bleu, de rouge et d’orange, une fleur étrange en vérité ! En fait, la plupart des agriculteurs sont écologistes dans l’âme, proches de la nature qu’ils connaissent bien, sensibles aux défis posés par le réchauffement climatique, acteurs de terrain conscients de leur rôle incontournable. Pourtant, il existe une vraie méfiance face à ce parti politique qui se dit Écolo. Ne vont-ils pas accentuer la pression « verte » de la conditionnalité aux aides de la PAC ? Imposer des mesures drastiques en faveur du bien-être animal ? Interdire les pesticides en dépit du bon sens ? Peut-être avons-nous tout faux ? Peut-être ne sommes-nous pas suffisamment à leur écoute, et eux à la nôtre ? N’est pire sourd celui qui ne veut rien entendre. Avons-nous ouvert nos oreilles du bon côté ? Trop à droite ou trop au centre, et pas assez d’où vient le vent ?

Non vraiment, je n’ai pas rangé les questions que je me pose, que tous les agriculteurs se posent. Les débats électoraux, menés par les caciques des grands partis, n’ont guère éclairé notre lanterne. Au bout du compte, on se rend compte que nous sommes dirigés par une poignée de gens dont les noms reviennent sans cesse : Di Rupo, Michel, Lutgen, De Wever, et quelques autres, parmi lesquels très peu de femmes. Comment le beau sexe vote-t-il sans cesse pour de mâles candidats, alors qu’elles dénoncent un système qui fait violence aux égalités des genres ? Mystère… Une oligarchie masculine tient les manettes de commande depuis des lustres, avec un faible pourcentage de renouvellement, d’élection en élection. Hommes et femmes, tout le monde se plaint, et pourtant les suffrages vont chaque fois aux mêmes individus, malgré leurs discours cousus de fil blanc, l’enfumage systématique des grands défis.

Ainsi, durant la campagne défunte, les futurs grands accords commerciaux internationaux, avec le Mercosur par exemple, ont été très peu évoqués. Ils risquent pourtant de sonner le glas pour un très grand nombre d’exploitations agricoles européennes, avec l’importation à venir de produits sensibles, comme la viande bovine et le sucre. L’ultra-libérale Commissaire Européenne au Commerce, Cécilia Malmström, a confirmé ce mercredi 22 mai qu’un « deal » avec le Mercosur pourrait être conclu dans les prochains mois. Quatre jours avant les élections ! Bien entendu, le MR et ses amis de droite n’ont pas osé moufter sur un sujet aussi sensible… J’en ai parlé ce dimanche matin à des membres locaux du parti, lesquels ont eu l’air bête et m’ont avoué ne pas être au courant, ne pas saisir la portée de tels accords, et les conséquences graves qu’ils vont entraîner pour notre agriculture ardennaise.

En fait, les politiciens se fichent pas mal de notre agriculture. Nous ne représentons qu’une très faible minorité, et notre modèle « démocratique » belge, justement, évince systématiquement les minorités au profit des groupes majoritaires. Ils comprendront plus tard, sans doute trop tard, qu’il aurait fallu réfléchir aux questions que les agriculteurs se posent, toutes ces interrogations et toutes ces craintes justifiées que nous ne parvenons pas à ranger, et qui taraude nos vies avec une pernicieuse cruauté. Qu’est-ce qui va changer demain ? Pas grand-chose… C’est la seule question qui ne se pose !

La Une

Voir plus d'articles
Le choix des lecteurs