La nouvelle a eu l’effet d’une bombe sur le marché du riz. De façon quasi-simultanée, le Vietnam, le Cambodge et Myanmar (ex-Birmanie) ont annoncé une suspension des signatures de certificats d’exportation sur le riz en mars. Les prix des principaux pays fournisseurs se sont alors nettement tendus entre février et mars, sachant qu’ils étaient déjà à la hausse depuis fin 2019 notamment pour la Thaïlande et le Vietnam (respectivement +28 % et +17 % depuis décembre), relève l’étude.
Le Vietnam a décidé de reprendre ses exportations de riz à partir du 11 avril, mais à un rythme estimé à 400.000 t pour avril et 800.000 t sur avril-mai, soit 40 % de moins que l’an dernier.
Restent l’Inde et la Thaïlande pour alimenter le marché, ces deux pays représentant près de la moitié des 45 millions de tonnes (Mt) de riz exportées dans le monde.
La Thaïlande en position de force
La Thaïlande semble en position de force, avec une production deux fois supérieure à sa consommation. Ses disponibilités à l’export représentent 8 à 10 Mt de riz chaque année. Le pays est le seul capable de répondre aux appels d’offres des importateurs sans restriction par rapport à son marché local, souligne l’étude de l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture.
L’Inde a produit 120 Mt sur l’actuelle campagne, mais seuls 10 % sont disponibles à l’export. Avec le confinement de la population au moins jusqu’au 3 mai, les ports indiens se retrouvent incapables d’assurer une partie des expéditions de riz, indique l’étude.
Le manque de personnel et l’incertitude sur la circulation des bateaux ont contraint les traders à stopper la signature de nouveaux contrats d’exportation entre le 26 mars et le 16 avril. Près de 500.000 t de riz devaient rester à quai entre fin mars et début avril, réduisant de près de moitié les exportations mensuelles de l’Inde.
Le spectre de nouvelles émeutes de la faim
Du côté de l’importatation, cette situation impose de s’adapter. Les Philippines, qui figurent dans le top cinq des importateurs de riz, ont fait valoir leurs relations diplomatiques avec le Vietnam pour qu’il garantisse un approvisionnement de quelque 300.000 t de riz sur les prochains mois, malgré l’embargo provisoire. Pour l’Indonésie, dont les approvisionnements vietnamiens représentaient le tiers du riz importé, il a fallu se reporter sur l’Inde. Leur deal inclut une libéralisation des importations de viande de bœuf, d’oignons, d’ail, ainsi qu’une commande de 130.000 t de sucre en 2020.
Au Moyen-Orient, l’impact est varié chez les pays producteurs de pétrole. L’Arabie saoudite dispose de ressources financières suffisantes malgré l’effondrement des cours du baril : ses importations de riz basmati ont augmenté de 12 % (en glissement annuel) sur les neuf derniers mois.
L’Iran, en proie à la chute de ses recettes pétrolières et aux sanctions américaines, a réduit ses importations de riz de 13 % sur la même période.
En Afrique, des pays comme le Bénin, le Sénégal et la Côte d’Ivoire font partie des gros importateurs mondiaux de riz. Les restrictions commerciales décidées par les pays asiatiques risquent de provoquer de nouvelles émeutes de la faim dans les centres urbains, comme celles de 2007-08, considèrent encore les auteurs de l’étude.