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Pas le plus grand responsable de la transmission

Dans les troupeaux où circule Mycoplasma bovis, la possibilité de transmission du germe par le colostrum a toujours été suggérée, mais jamais démontrée. La présente étude s’est intéressée à y vérifier la présence de l’ADN de M. bovis par PCR en temps réel dans 368 échantillons de colostrum provenant de 17 troupeaux, récemment infectés par le germe. Seulement 1,9 % des échantillons se sont révélés positifs, 13 troupeaux n’ayant pas d’échantillons positifs. Si dans les troupeaux infectés, l’ADN de M. bovis a pu être prélevé dans le colostrum, faut-il encore savoir dans quelle mesure celui-ci est infectieux.

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Dans l’élevage laitier moderne, Mycoplasma bovis contribue fortement au développement des maladies économiquement importantes, comme la mammite et la pneumonie, et affecte tant le bien-être des animaux que l’utilisation d’antimicrobiens.

Difficile de s’en défaire

Une fois introduit dans la ferme, le germe est très difficile à gérer. Il se transmet par les animaux malades ou porteurs par contact nasal ou voie aérogène. Autre transmission : la consommation de lait contaminé.

Son introduction dans un troupeau se fait généralement par l’achat d’individus. Toutefois, l’utilisation de sperme d’insémination artificielle contaminé, l’importation d’embryons plusieurs sont autant d’autres modes d’introduction potentiels.

Si le colostrum est cité comme source possible de contamination, aucune étude sur la prévalence du germe dans le colostrum n’est disponible. Malgré ce manque d’informations, il est souvent préconisé, d’éliminer ou de traiter thermiquement (on parle de thermisation) le 1er lait par mesure de précaution.

Enlever le colostrum aux nouveaux nés n’est évidemment pas une option tant ceux-ci en dépendent. S’il est possible d’acheter du colostrum décontaminé, celui-ci représente un coût important. Le traitement thermique manque, en particulier dans les petites exploitations, de notions de faisabilité économique et pratique en raison des faibles quantités à traiter. En outre, le traitement thermique détruit la cytokine et la fraction cellulaire dudit lait, ce qui semble affecter la récupération des veaux après une exposition à l’antigène.

La connaissance de la prévalence de M. bovis dans le colostrum est donc essentielle pour guider les éleveurs dans le choix des mesures de prévention.

17 exploitations sondées

L’enquête a donc été menée dans dix-sept exploitations agricoles belges. Les fermes ont été sélectionnées par le vétérinaire local et des échantillons ont été collectés courant 2016-2017. Elles devaient avoir connu une infection récente au germe, documentée par une culture positive ou une PCR. Quatre exploitations viandeuses, cinq laitières et huit mixtes y ont participé.

Les exploitations du groupe A avaient toutes des échantillons positifs chez les veaux, sans information sur les adultes, tandis que les exploitations du groupe B avaient confirmé une infection au germe tant chez les adultes que chez les veaux.

Un total de 368 échantillons ont pu être analysés. Une limite de douze échantillons par troupeau a été fixée dans treize fermes (fermes du groupe A). Quatre fermes où des cas adultes de M. bovis ont été confirmés ont été échantillonnées pendant une période plus longue (six à douze mois) afin de mieux caractériser les périodes potentielles d’excrétion (fermes du groupe B). Des échantillons de colostrum ont été prélevés par l’éleveur immédiatement après la mise bas, après désinfection des trayons. Un échantillon composite (échantillon groupé des quatre quartiers de chaque vache) a été prélevé pour chaque vache.

Une concentration de germes insuffisante

Sur les 368 échantillons analysés, l’ADN du pathogène a été détecté dans 1,9 % (7/368) de ces échantillons, provenant de quatre élevages différents. Treize des dix-sept exploitations échantillonnées ne disposaient d’aucun échantillon de colostrum positif au germe. Dans les quatre exploitations qui avaient des échantillons positifs, la prévalence à la ferme/au sein du troupeau se situait entre 2,8 % (2/71) et 30 % (3/10). La prévalence moyenne au sein du troupeau était de 3,2 %.

Une seule exploitation (2 échantillons) était positive dans le groupe B. Aucune tendance à l’excrétion au fil du temps n’a pu être identifiée dans les exploitations du groupe B, car très peu d’échantillons positifs.

L’utilisation de ces PCR n’a permis de détecter l’ADN du germe que sporadiquement dans le prmeier lait. Il n’est donc pas certain que la concentration de bactéries présentes dans le 1er lait suffise pour infecter les veaux, surtout dans le cas d’échantillons marginalement positifs.

Eviter la mise en commun

L’ADN du pathogène est présent dans les échantillons de colostrum, bien qu’à basse fréquence. Cette présence ne fournit aucune information sur le risque infectieux du 1er lait. Des travaux supplémentaires sont nécessaires pour déterminer le risque de transmission par ce biais et si les vaches dont le colostrum est positif au germe ont continué à en excréter dans le lait plus tard au cours de la lactation.

Sur cette base, les éleveurs et les vétérinaires pourraient vouloir appliquer le principe de précaution et décontaminer le colostrum ou acheter un colostrum de remplacement. L’élimination du 1er lait des vaches souffrant de pathologies liées au germe est probablement un bon conseil. L’auteure recommande également aux praticiens et aux éleveurs d’éviter la mise en commun du colostrum dans les exploitations infectées. La pasteurisation et l’achat de colostrum (substitut) sont des options possibles, tandis que la congélation et la décongélation ultérieure ne font que réduire la concentration du pathogène. Un traitement acide du colostrum pourrait être envisagé comme alternative. Les conseillers en santé des troupeaux doivent être conscients que le coût d’investissement pour la pasteurisation à la ferme et l’achat de colostrum (produits de remplacement) peut être élevé et que cela peut avoir des effets négatifs sur l’immunité des troupeaux. Par conséquent, ces mesures ne sont potentiellement pas en équilibre économique avec le risque de transmission par le colostrum.

D’après Gille L., Evrard J.,

Callens J. et al.

The presence of Mycoplasma bovis in colostrum. Vet Res 51, 54 (2020).

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