Si les objectifs de l’enseigne sont a priori louables, c’est une tout autre réalité qui se cacherait derrière cette communication : une mainmise d’un groupe sur l’agriculteur dépourvu de toute autonomie décisionnelle sur la ferme en contradiction totale avec le modèle d’agriculture familiale défendu chez nous. En effet, le groupe se réserve ainsi le droit d’imposer à l’agriculteur exploitant les terres ses choix tant de la nature de la production que du mode de production.
La Fwa rappelle qu’il est capital que dans cette politique de développement, l’enseigne mesure les conséquences pour les agriculteurs d’un éventuel rachat de terres occupées, et de reprise pour exploitation personnelle par Agripartners, la société filiale du groupe.
En effet, le producteur qui exploitera la ferme « Het Zilverleen » sera responsable de la gestion opérationnelle quotidienne de la ferme, mais devra répondre aux décisions stratégiques de l’enseigne. La grande distribution impose donc, ici, de manière directe et coercitive, son influence sur le producteur. Les deux syndicats s’accordent sur le fait que ces pratiques d’un autre âge rappellent le servage féodal. Un système qui fait fi de la loi du bail à ferme, qui doit régir les relations entre un propriétaire de terre agricole et l’agriculteur qui les loue. Ladite loi consacre d’ailleurs pleinement cette liberté de culture, qui reste entièrement aux mains de l’exploitant. Un principe, selon eux, non négociable !
Par ailleurs, la Fugea craint que si des exploitations bio venaient à être concernées, il y a fort à parier que des fermes qui répondent directement aux décisions stratégiques de la grande distribution soient contraintes d’adopter un modèle de production bio intensif.
En outre, comme la Fédération le déplore souvent, le paysage agricole belge se caractérise notamment par une pression foncière accrue, qui bloque l’installation des jeunes et freine la reprise d’exploitations. L’entrée sur le marché du foncier agricole, d’acteurs aussi puissants que ladite enseigne risque fortement d’accroître encore davantage ce phénomène.
Quand on connaît la problématique des prix non-rémunérateurs appliqués par la grande distribution à l’égard des producteurs et des productrices, il est donc difficile pour elle d’entendre la communication d’un groupe qui se targue de vouloir assurer plus de « durabilité dès le début de la chaîne ».
