pourquoi opter pour
un modèle électrique ?
chargeur sur roues. Il déroule un câble et le branche
à une prise 230V… » Voici une scène qui se répétera de
plus en plus fréquemment avec l’avènement des moteurs
électriques. D’autant qu’outre leurs avantages – absence
de bruit et d’émissions polluantes, notamment – ceux-ci se montrent tout aussi performants que leurs frères au diesel.
Sur n’importe quelle prise domestique
Le modèle eHoftrac électrique du constructeur allemand est apparu sous forme de prototype en 2013 préalablement à une commercialisation lancée en 2015. En 2017 a été présentée la seconde génération de cet engin. « La batterie initiale, à l’acide et à l’eau, a été remplacée par un nouvel accumulateur plomb-acide, plus performant et facile d’emploi », commente Jean-Marc.
« La première batterie nécessitait la pose d’un chargeur mural spécifique. Un remplisseur d’eau distillée doté d’une pompe électrique y était adjoint pour faire un appoint d’eau automatiquement à chaque charge. Toutes ces contraintes ont totalement disparu avec la nouvelle batterie : aucun appoint d’élément n’est requis et le chargeur est directement intégré sous le capot de la machine. Il suffit juste de garer le véhicule, dérouler le câble et le brancher à une prise de 230 V. Pas besoin de circuit électrique de charge spécifique, pas besoin d’une alimentation électrique triphasée, n’importe quelle prise domestique fait l’affaire », ajoute Jordan.
Absence de bruit et d’émissions polluantes
Lors de la phase de développement, le constructeur a soigneusement choisi le modèle à « électriser ». Il a opté pour le Hoftrac 1160, une valeur sûre dans sa configuration à moteur thermique. Compacte et polyvalente, c’est une machine prisée tant au niveau de petites structures qu’au niveau d’exploitations de plus grande taille.
La version électrique a-t-elle tenu ses promesses en termes de ventes ? « Effectivement puisque nous avons vendu en Belgique une vingtaine d’eHoftrac », répond Jean-Marc. « C’est un bon chiffre, sachant que l’on s’adresse actuellement à un marché de niche, à savoir des clients chez qui le bruit et les émissions polluantes sont à proscrire. Nos premiers acheteurs sont, par exemple, issus du milieu équestre, notamment des élevages de chevaux de grande valeur, des haras, des centres d’insémination… La santé et le bien-être des animaux, mais aussi du conducteur, sont assurés et ces bienfaits sont particulièrement appréciés des utilisateurs ».
Et Jordan de poursuivre : « Une autre profession marque un intérêt grandissant pour ces machines électriques : les horticulteurs. Le chargeur électrique est alors principalement utilisé à des fins de manutention à l’intérieur des serres. Là aussi, les absences totales de bruit et de polluants sont unanimement louées par le personnel de ces entreprises ».
« Roder » la batterie, pour assurer son autonomie
Dans sa documentation, le constructeur annonce qu’une charge de batterie suffit pour pouvoir offrir une prestation d’une durée de deux à cinq heures. Ces chargeurs étant essentiellement utilisés dans des stabulations, la durée de ce cycle de travail correspond à celui des nourrissages d’animaux matin et soir, la recharge de la batterie pouvant avoir lieu entre ces deux sessions de travail.
« C’est exactement ce que fait encore aujourd’hui le premier eHoftrac que nous avons vendu », enchérit Jean-Marc. « Il travaille dans un élevage de chevaux où il preste deux périodes d’environ trois heures, six jours sur sept. Il s’emploie alors à la manutention de ballots, la distribution de la nourriture des animaux ou encore l’entretien quotidien de la litière des boxes. Le septième jour, il est utilisé pendant six heures d’affilée, entrecoupées par l’une ou l’autre brève pause, durant lesquelles, outre les tâches précitées, il œuvre au curage complet des boxes et à l’installation des nouvelles litières ».
L’autonomie de la batterie est évidemment un facteur crucial lorsque le choix d’un matériel électrique est envisagé. Cette autonomie peut être influencée par différents paramètres tels que la difficulté des tâches auxquelles on astreint le matériel, le style de conduite des chauffeurs… mais, plus que tout cela, le facteur qui semble essentiel pour optimiser l’autonomie de l’engin est souvent méconnu et parfois négligé : il s’agit de la manière dont la batterie est rechargée.
Jordan réagit immédiatement : « C’est un point sur lequel nous insistons avec force auprès de nos clients. Lors de l’achat d’un véhicule neuf, il est important de vider totalement la batterie et de la recharger ensuite complètement. Ceci est valable pour les trois ou quatre premières charges. Il faut en quelque sorte apprendre à la batterie à se charger et à être chargée correctement. Une fois ce « rodage » effectué, rien ne s’oppose à des charges partielles ou intermédiaires de temps à autre ».
L’exemple suivant d’une expérience malheureuse vécue par Weidemann Belgium avec un eHoftrac neuf utilisé comme véhicule de démonstration est assez explicite à cet égard. « Cet engin est passé d’exploitation en exploitation pendant plusieurs semaines, le plus souvent pour une durée de deux ou trois jours. S’agissant d’une machine de démo présente chez eux pour une courte durée, les différents opérateurs ont peu, voire pas du tout, respecté les cycles de charge prescrits. La conséquence s’est rapidement fait sentir, avec une perte significative de l’autonomie de la batterie. » Heureusement, il a suffi de quelques cycles de décharges et recharges complètes de celle-ci pour qu’elle retrouve ses capacités initiales.
Désigner un responsable des charges
« Il n’y a pas de problème à ce que plusieurs conducteurs se succèdent aux commandes d’un engin pareil dans une entreprise ; par contre, nous conseillons alors de désigner une personne comme responsable des charges, de telle sorte que celles-ci soient exécutées conformément aux prescriptions d’usage. Il convient aussi de noter que la nouvelle batterie dispose d’une forme d’auto-régénérescence : lorsqu’elle n’est plus sollicitée pendant un certain laps de temps, elle parvient à régénérer une certaine quantité d’énergie par le biais de réactions chimiques entre ses composants. Ainsi, il n’est pas rare, si l’engin n’a pas été rechargé entre-temps, de voir apparaître quelques barrettes supplémentaires sur l’afficheur de charge de la batterie lorsque l’on reprend le véhicule après l’avoir laissé à l’arrêt quelques heures. »
Amortissement : 2.800 heures suffisent
La question que beaucoup se posent concerne les gains qui peuvent être obtenus avec une telle machine. Ceux-ci sont de deux ordres : environnemental et économique. Le constructeur avance des performances assez intéressantes sur ces deux tableaux, basées sur des tests menés en Allemagne et tenant dès lors compte du mode de production d’électricité dans ce pays.
Il renseigne ainsi une réduction des émissions de CO2 de 43 % par rapport au modèle Hoftrac 1160 à moteur thermique. Toujours en comparaison avec le même véhicule, les coûts d’exploitation annoncés sont de 41 % inférieurs. Ceci permettrait d’amortir le coût d’investissement dans un modèle électrique, plus onéreux à l’achat que son pendant traditionnel, après environ 2.800 heures de fonctionnement. « Cela s’explique assez aisément », nous informe Jordan. « Un moteur thermique engendre inévitablement des coûts liés à sa maintenance : entretien, filtres, huile, liquide de refroidissement, antigel, coûts d’usure… Ceux-ci n’existent pas avec un moteur électrique, qui ne nécessite aucun entretien. »
Les coûts en matière de consommation électrique liée à la recharge de la batterie sont évidemment fonction des prix du fournisseur d’électricité mais ils sont généralement inférieurs à ceux de la consommation de gasoil d’une machine thermique. « Cette réduction des coûts joue en faveur du chargeur électrique, expliquant que le surcoût de ce matériel à l’achat se résorbe assez rapidement sur la durée de vie de l’engin. »
Cet amortissement peut encore être accéléré : l’une de ces machines travaille dans une exploitation disposant de sa propre unité de production d’électricité, en l’occurrence des panneaux photovoltaïques. « La recharge de la batterie, effectuée avec cette électricité produite sur place, a donc un coût quasiment nul. Le retour sur investissement en est d’autant plus rapide, autant pour l’eHoftrac que pour l’installation photovoltaïque. Parallèlement, la valeur écologique du chargeur sur roues s’en trouve accrue. Le même raisonnement peut être tenu pour des exploitations possédant une éolienne ou une station de biométhanisation, par exemple ».
Quelles performances, par rapport au frère « diesel » ?
En ce qui concerne son maniement, il est identique à celui de la version diesel, le poste de conduite disposant des mêmes commandes et de la même ergonomie. Sa prise en mains ne pose donc aucun problème. Les mêmes accessoires peuvent prendre place sur son tablier porte-outils.
Par contre, ses performances de travail peuvent se révéler supérieures grâce à certaines caractéristiques propres, comme le souligne Jean-Marc : « Le Weidemann eHoftrac 1160 pèse 2,4 t contre un peu moins de 2 t pour le modèle conventionnel, cela notamment à cause du poids de la batterie. Cela se répercute sur la charge de basculement, favorisée par ce poids au sol plus important, qui fait de l’eHoftrac un engin plus fort en poussée que son frère à motorisation diesel. »
Par ailleurs, le chargeur comporte deux moteurs électriques : l’un pour l’avancement, le second pour actionner l’hydraulique de travail. « S’agissant d’une répartition électrique de la puissance, chacun de ces moteurs peut bénéficier de 100 % de cette puissance, indépendamment de l’autre. L’utilisateur peut donc profiter à la fois d’une grande vitesse de déplacement associée à une grande force hydraulique pour ses opérations de manutention. » Il est à noter que, pour économiser la charge de la batterie, une fonction économique peut être activée, ne délivrant que l’énergie nécessaire en fonction de la sollicitation du moment.
Cette vitesse d’exécution est certainement l’une des caractéristiques qui surprend le plus les nouveaux utilisateurs de l’eHoftrac. « Celle-ci est encore améliorée par d’autres facteurs : si l’on doit descendre de la machine, par exemple pour sectionner les ficelles d’un ballot de fourrage, le moteur thermique de la version diesel s’éteint lorsque l’on quitte le siège. Il faut ensuite le redémarrer quand on reprend place derrière le volant. Dans le cas d’un modèle électrique, ce n’est pas le cas : la fonction électrique se désactive par sécurité une fois que l’on quitte le siège mais elle se réamorce automatiquement et instantanément dès que le chauffeur s’y assied de nouveau. Qui plus est, la totalité de l’énergie est directement disponible ; il n’y a pas besoin, comme pour un moteur thermique, de monter dans les tours. Cela n’a l’air de rien mais ces petits gains de temps, glanés ci et là, permettent de raccourcir les cycles de travail et participent donc activement à la rentabilité de l’engin ».
Une place à prendre dans les fermes, et en ville
Cet article se conclut par une dernière question à nos deux hôtes : quelle vision portent-ils sur le marché de ces chargeurs sur roues électriques aujourd’hui mais également à moyen terme ?
C’est Jean-Marc qui prend l’initiative de la réponse : « Il existe une certaine émulation pour ces machines électriques dans le secteur, comme en attestent les développements de différents constructeurs. Je suis persuadé que ce n’est qu’un début. Différents secteurs montrent clairement un intérêt croissant ; outre ceux déjà cités, je pourrais donner en exemple celui des villes et communes. Les zones de basse émission, la réduction des rejets de CO2 et bien d’autres thématiques environnementales figurent souvent à leur programme. Le choix de se porter sur un véhicule de manutention électrique, plus écologique, leur paraît opportun, dans le respect de leur politique. Le silence lors de l’entretien des espaces verts, et a fortiori des cimetières, est un autre atout majeur en faveur de ces engins dans les municipalités. »
« En agriculture, la situation est actuellement quelque peu plus hésitante, pour une raison relativement simple : les engins de manutention y sont appelés à effectuer des tâches lourdes, comme la manipulation du fumier dans des stabulations de grande taille, qui nécessitent des forces de poussée très importantes. L’eHoftrac 1160, mais aussi les machines concurrentes équivalentes, n’ont pas le gabarit nécessaire dans la majorité des cas. Je reste convaincu qu’un chargeur électrique peut se faire une place de choix dans le parc de matériel d’une exploitation, et encore plus si celle-ci dispose de sa propre installation de production d’électricité, mais il faut de manière générale des couples de poussée plus importants. Je suis certain que les constructeurs y travaillent ; le tout est pour eux de trouver le bon compromis entre performances, encombrement, poids et prix. »
« Certaines exploitations possèdent plusieurs engins de manutention : par exemple, un chargeur télescopique pour les travaux lourds et un valet de ferme polyvalent et de moindre taille pour évoluer avec facilité dans les bâtiments d’élevage tels qu’étables, poulaillers, bergeries, et autres porcheries. L’eHoftrac peut occuper la place de ce second véhicule de manière très avantageuse pour les raisons évoquées. Et puis, la motivation d’un tel achat peut aussi venir de l’extérieur : à l’heure où le monde agricole se voit de plus en plus confronté à des relations parfois tendues avec le voisinage direct, le silence de fonctionnement d’un chargeur sur roues électrique peut conduire à l’atténuation de certaines tensions avec les riverains proches de la ferme en supprimant une source de nuisance sonore ».
