à intervenir dans les situations
les plus délicates
Se former pour mieux former
L’expérience française des vétérinaires sapeur-pompier (VSP), ainsi que la récente initiative des vétérinaires grand-ducaux (voir encart), a inspiré Hugues Guyot et son collègue et ami, Thomas Degand. « Si l’idée de créer une formation de vétérinaire urgentiste nous est venue en 2011, ce n’est qu’en 2017 que Thomas et moi avons pu concrétiser le projet en collaboration étroite avec l’Union professionnelle vétérinaire (UPV). Le fait que certains services de secours soient venus solliciter la collaboration de la faculté de médecine vétérinaire pour échanger des connaissances sur le sauvetage animalier nous a évidemment boostés. À partir de là, nous nous sommes formés (« Planu », médecine de catastrophe, téléanesthésie, sauvetage animalier avec les équipes spécialisées des pompiers de différents pays européens…). L’objectif ? Mettre en place le meilleur programme possible à la Faculté vétérinaire de Liège, pour engager ces praticiens correctement formés sur toute intervention délicate (urgente ou non), en collaboration avec les pompiers, la protection civile ou la police », explique Hugues Guyot.
« Jusqu’ici, les zones de secours faisaient généralement appel au premier vétérinaire du coin. Mais celui-ci pouvait rapidement se sentir inapte voire dépassé lorsque les conditions d’intervention étaient difficiles, que du matériel spécifique était nécessaire. Il pouvait même parfois gêner les autres intervenants dans leur travail. » Raison pour laquelle il était nécessaire d’intégrer à la formation une partie commune avec les pompiers, de sorte de pouvoir comprendre la chaîne de commandement, de gérer une situation de crise/catastrophe, de comprendre l’organisation des secours… de savoir précisément où est sa place en vue de s’intégrer parfaitement dans l’opération en cours. »
C’est en 2019 que le certificat universitaire voit le jour, avec le soutien de la Wallonie et différents services de secours. La formation est prévue pour des praticiens désireux d’apporter une expertise à la sécurité civile lors de situations urgentes où les animaux sont en danger ou présentent un danger pour d’autres animaux, pour l’homme ou pour l’environnement. Par ailleurs, le rôle dudit vétérinaire est aussi de soutenir les services de secours par des formations ou de la prévention. Il sera enfin amené à conseiller les autorités et services de secours en situation de catastrophe où les animaux sont impliqués directement ou indirectement, en première ligne ou en relais d’autres institutions.
Une formation multi-espèces
« Comme les participants viennent de tous horizons (petits et grands animaux, entreprise…), nous proposons une formation multi-espèces de manière à ce que tout un chacun puisse faire face à n’importe quelle situation. Durant les travaux pratiques, outre les mises en condition avec le sauvetage de grands animaux – ils doivent notamment manipuler un mannequin de vache de 400 kg –, la gestion de chiens dangereux, des mises en situation avec des NAC (nouveaux animaux de compagnie comme les serpents, araignées…), certains gestes techniques sont rappelés, comme l'intubation, le cathétérisme... sur des mannequins dans le SkillLab de la Faculté de Médecine Vétérinaire. Ils sont aussi formés à descendre en rappel dans des cavités pour aller chercher des animaux tombés, comme des veaux, des chiens… »
Hugues énumère ensuite les situations les plus fréquentes pour lesquelles un vétérinaire urgentiste peut être appelé. « La plus fréquente : un animal qui tombe là où il ne devrait pas : un trou, un étang, une rivière…
En attente d’un statut fédéral…
… pour se faire connaître
« Évidemment, il faudrait augmenter le pool afin que chaque zone de secours puisse trouver 7j/7 24h/ 24 du personnel disponible selon un rôle de garde, soit au grand minimum 5 personnes/ province pour une opérationnalité constante. Si au fil des ans, on arrive à multiplier ce nombre, par 4 ou 5, ce serait l’idéal pour couvrir au mieux le territoire et être certain d’avoir un ou plusieurs vétérinaires disponibles en permanence ! »
« Mais c’est aussi auprès des vétérinaires que l’on doit se faire connaître. L’idée est qu’il puisse nous mettre en relation avec la protection civile, s’il ne peut lui-même intervenir. Nous réalisons un gros travail de promotion du certificat au niveau des vétérinaires par le biais du magazine de l’UPV, Veterinaria. Nous travaillons également à l’élaboration d’une liste de personnes à contacter selon les zones de manière à permettre à mettre les différents praticiens en contact en cas de besoin. Pour l’avenir, l’idée serait de pouvoir rendre accessible aux dispatchings 112 et 101 le listing complet des vétérinaires et de leurs coordonnées de manière à pouvoir faire intervenir le VUSC le plus proche du lieu d’intervention. Évidemment libre à eux d’appeler qui ils veulent… Toutefois si on a le choix pourquoi ne pas appeler quelqu’un de parfaitement formé, qui sait parfaitement comment interagir avec les services de secours et qui peut intervenir dans des situations délicates ?
Si la situation sanitaire n’a pas permis d’avancer outre mesure dans l’élaboration de ces outils, M. Guyot voit déjà plus loin. « À l’avenir, il n’est pas impossible que l’on élargisse la formation à des modules de médecine vétérinaire de catastrophe. Si la formation s’en sortirait renforcée, elle permettrait à des praticiens d’être déployés sur des missions à l’étranger notamment pour la gestion de denrées alimentaires dans des zones sinistrées comme le faisait BFast, un groupe d’intervention humanitaire rapide, pour la Défense. « L’idée serait tout au moins de faire ce que le Bfast fait en national, et dans l’avenir pourquoi ne pas être déployé à l’étranger ? Ce serait mon rêve ! », sourit-il.
