pour l’engraissement :
le choix de la sérénité !
Christian Verdin, de Werbomont, s’est résigné à arrêter la
traite pour faire le choix de l’allaitant. Pourtant engagé dans
la défense de son métier, l’éleveur a su aller à contre-courant pour plus de sérénité dans son travail. Retour sur le parcours
d’un éleveur bien connu de la région herbagère.
En 2007, à la retraite de son papa, l’éleveur réalise de gros investissements pour construire une étable semi-paillée avec caillebotis pour 80 vaches laitières. La capacité de la salle de traite est doublée. Il rachète alors 200.000 l de quotas pour arriver à 900.000 l/an.
À cette époque, si 80 laitières sont sur aire semi-paillée, 70 autres sont sur caillebottis-logettes dans une ancienne étable. « Nous tournions alors à 350 bovins sur l’ensemble de la ferme. La sélection se faisait surtout en se focalisation sur la protéine et les aplombs. Ces derniers sont importants quand les animaux sont sur caillebotis et logettes. Mon système me convenait bien. Les hautes productrices étaient toujours sur paille avec un mélange approprié. L’aire paillée permet un meilleur confort pour les vaches en début de lactation. Une fois que la production diminuait, elles repassaient en logettes-caillebottis », explique-t-il.
Investi pleinement durant la crise
En 2009 survient la crise laitière. « Un moment très difficile ! Comme beaucoup, nous n’arrivions plus à payer les factures. » Membre du Belgium Dairy Board (BDB), il s’est alors beaucoup investi, notamment avec Alain Collienne, pour fédérer les agriculteurs dans les manifestations. « Nous devions rester motivés et mobilisés mais le moral dans les fermes était au plus bas… Les fermiers voulaient faire bonne figure mais tout le monde en avait marre ! »
Il l’avoue : « Nous ne savions pas encore à ce moment-là vers quoi nous allions… Et encore moins vers l’événement qui nous marquera tous : l’épandage de lait à Ciney, qui, outre les 4 millions de litres, a fait verser beaucoup de larmes. Nous ne nous attendions pas à voir autant de tonneaux, autant de lait et de foule… Quand nous avons vu l’impact médiatique de l’événement et comment cela a été relayé hors frontière, nous nous sommes dit que si rien ne bougeait avec ça, jamais rien ne changerait. »
« Par la suite, on nous donnait bien de temps en temps une poire pour la soif… mais les prix du lait n’ont pas été beaucoup plus rémunérateurs. À ce moment-là, j’estimais qu’il nous fallait 0,40 €/l. Les frais fixes, les emprunts étaient là ! Beaucoup ont essayé de les reporter mais nombreux sont ceux qui n’avaient pas assez de trésorerie. Des collègues ont dû vendre des biens pour y pallier… Il y a alors eu beaucoup de décapitalisation au niveau des fermes. »
C’est aussi en 2009 que Christian devient le président de l’Association régionale des éleveurs et détenteurs de bétail Ourthe-Amblève, Theux-Verviers. « Nous avons un groupe en or. La dynamique est bonne. Nous sommes encore aujourd’hui l’une des rares régionales à avoir une journée d’études et un souper-théâtre qui draine toujours plus de gens. »
Une décision difficile
Les années passent et se ressemblent. En 2014, les réflexions sont nombreuses et la question du passage en bio se pose. L’année suivante, le choix est acté.
La Simmental avant la limousine
Ayant entamé les démarches bio en 2015, son exploitation le sera totalement en 2017. « Quand j’ai arrêté la traite, je savais déjà que j’allais opter pour un cheptel allaitant. J’avais un coup de cœur pour la Simmental mais je me suis rapidement rendu compte que la vente des veaux n’était pas évidente ; je me suis donc tourné vers la limousine, pour laquelle le marché est plus facile. »
« Aujourd’hui, j’engraisse 150 taureaux limousins que j‘essaye de vendre entre 24 et 28 mois. J’élève également 40 mères et leur suite. Au total, 260 bêtes sont sur l’exploitation. »
La priorité sur le site : l’engraissement ! « J’ai trouvé une collaboration avec un marchand de bêtes. Quand il a des bons taureaux à engraisser, je les lui prends. Il trouve ensuite la filière pour les écouler. »
Le choix de la sérénité
Pour Christian, ce choix est celui de la sérénité. « Avec la traite, j’ai connu des nuits à ne pas dormir, à me demander comment payer les factures… Ici, la partie économique est plus sereine. »
Il faut toutefois trouver les débouchés, il lui faut encore se battre pour sa place. « Ici, je ne sélectionne pas. Je prends des lots quand ils sont de qualité. Quand j’étais en laitier, je sélectionnais, je suivais les conseils de l’Association wallonne de l’élevage. Nous participions au contrôle laitier, et, suivant les résultats, je recevais un conseil d’accouplement. En limousin, rien de tout ça. J’ai un taureau reproducteur et cela s’arrête là. Je n’insémine plus, à part la génisse de mon gamin », rit-il.
Et d’enchérir : « Tout n’est pas rose. Travailler en allaitant c’est aussi un apprentissage. J’ai dû apprendre l’élevage limousin, la manutention des bovins… C’est autre chose qu’en laitier ! Depuis 2019, une routine s’est installée au niveau de l’engraissement des taureaux. Elle me convient, je ne change plus rien. »
« Rétrospectivement, je suis fier d’avoir pu rebondir, trouver des solutions, et avancer à mon rythme. Pour le même prix, je pouvais tout revendre… J’ai su mettre de côté ma fierté pour pouvoir demander de l’aide. J’ai su réagir au bon moment. Et j’ai toujours eu la chance d’être bien entouré. »
