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La commission face à l’inquiétude des Vingt-Sept

Réunis le 21 novembre dernier, les ministres ont notamment débattu de la restauration de la nature et sont largement revenus sur la communication de la commission sur les engrais, laquelle expose la nécessité de garantir leur disponibilité en tant qu’élément déterminant pour la sécurité alimentaire.

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Si les mesures proposées le 9 novembre dernier (voir en pages 10 et 11 de la présente édition) par la commission pour faciliter la disponibilité en engrais dans l’UE avaient été favorablement accueillies par les experts nationaux réunis en comité spécial agriculture (Csa) le 15 novembre, plusieurs ministres se sont montrés plus critiques lors de cet avant-dernier conseil sous présidence tchèque.

Aides d’État, l’exemple polonais

Certains ont regretté que les mesures financières (aides d’État, réserve de crise agricole) proposées soient insuffisantes pour soutenir durablement les agriculteurs face à la flambée des prix des engrais. Ils estiment que la solution la plus adaptée serait le recours aux fonds situés en dehors de la Pac.

Le commissaire Wojciechowski a toutefois fait savoir, à l’issue de la conférence de presse finale, qu’il avait « bon espoir que l’argent versé via les aides d’État est utilisé efficacement afin de soulager immédiatement la vie des agriculteurs ».

D’ailleurs à l’heure actuelle, seul son pays, en l’occurrence la Pologne, a mis en place, sur la base de la proposition de la commission, un programme de soutien qui s’élève à 800 millions € en termes de compensation pour les agriculteurs ayant dû faire face à des coûts extraordinaires liés à la hausse des prix des engrais.

Le mécanisme est simple, l’État s’engageant à payer la différence entre les prix actuels des engrais et ceux pratiqués avant la crise, preuve d’achat à l’appui.

Observatoire du marché des engrais

Les ministres ont par ailleurs salué la création à court terme d’un nouvel observatoire du marché des engrais (production et stocks). Ils estiment notamment que l’amélioration de la transparence permettra de se baser sur les dernières données scientifiques disponibles afin d’accélérer la transition vers une utilisation durable des engrais.

Les Vingt-sept ont souligné l’importance de développer une utilisation durable des engrais via le recours aux engrais « Renure » (azote récupéré du fumier) et d’optimiser la gestion des nutriments. À cette fin, ils ont indiqué à la commission qu’ils étaient prêts à contribuer à la mise en œuvre du plan d’action sur la gestion intégrée des nutriments (azote et phosphore) attendu au premier trimestre 2023.

Agriculture de précision et biostimulants

Dans un premier temps, M. Wojciechowski a indiqué aux ministres qu’il serait bon « d’intégrer l’agriculture de précision dans le cadre de la révision des plans stratégiques ».

Plusieurs délégations, à l’initiative de l’Espagne, ont encouragé la commission à renforcer la promotion de biostimulants pour optimiser le recours aux engrais par une meilleure utilisation des nutriments. Ils appellent également à favoriser l’utilisation des nouvelles technologies et de l’agriculture de précision qui permet d’ajuster les doses d’engrais aux besoins des cultures.

Et l’Espagne encore de souligner l’importance de promouvoir les cultures de légumineuses au niveau de l’UE afin d’accroître la biodiversité et la fixation de l’azote. « Cela contribuera ainsi à réduire la dépendance de l’UE à l’égard de l’azote, notamment par le biais des interventions prévues dans les plans stratégiques de la Pac », a assuré le ministre espagnol.

La stratégie « Biodiversité » inspire des craintes

De nombreux ministres ont formulé des craintes quant aux objectifs de la stratégie « Biodiversité » proposée par la commission. Pour rappel, le projet prévoit la restauration d’au moins 20 % des écosystèmes terrestres et marins de l’UE d’ici 2030 et de tous les écosystèmes nécessitant d’être restaurés d’ici 2050, dont les écosystèmes agricoles.

Pour y parvenir, le texte fixe des objectifs contraignants sur le déclin des pollinisateurs, des populations de papillons et d’oiseaux dans les zones agricoles, le carbone des sols ou encore les caractéristiques paysagères à haute diversité. Chaque État membre devra préparer un plan national de restauration. Mais les ministres estiment que ces dispositions risquent de remettre en cause la sécurité alimentaire de l’UE.

Beaucoup dénoncent le manque de réalisme au niveau des délais fixés quand d‘autres s’inquiètent des obligations de suivi et des moyens financiers pour ce faire…

Marie-France Vienne

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